Bien entendu, même si la grande majorité des Français, le samedi, se tournent vers les grandes surfaces.
En matière de transparence, toutefois, les entreprises agroalimentaires reconnaissent qu'elles ont encore des efforts à faire. Elles doivent en particulier mieux se protéger contre les tentatives de fraude ou de tromperie. Nous avons ainsi élaboré avec elles une charte anti-fraude qui sera rendue publique dans les prochaines semaines. Les entreprises de transformation animale s'y engagent à se prémunir contre les risques de dérives et à améliorer l'autocontrôle.
Cette crise, qui a ébranlé la confiance des Français à l'égard de leur alimentation, a donc donné lieu à une réponse immédiate de la part du Gouvernement. Mais il ne suffit pas d'en tirer les leçons à court terme ; nous devons réfléchir à une véritable politique publique pour l'alimentation et l'agroalimentaire en France.
Le premier axe d'une telle politique serait l'emploi. Le secteur de l'agroalimentaire représente près de 500 000 emplois, de surcroît non délocalisables et répartis sur l'ensemble du territoire. Pourtant, bon nombre d'entre eux restent non pourvus. À l'évidence, les métiers de l'agroalimentaire souffrent d'un problème d'attractivité ; ils pâtissent même parfois d'une image négative. Il nous appartient donc de rappeler leur noblesse. Quel plus beau métier y a-t-il, en effet, que celui de nourrir les hommes ? Les métiers de l'alimentation sont d'autant plus nécessaires à l'économie que l'un des grands défis du siècle, pour notre planète, sera de nourrir 9 milliards d'habitant à l'horizon 2050. Nos jeunes ont donc un avenir dans les entreprises alimentaires.
Dès demain, ces dernières seront susceptibles d'ouvrir leurs portes à toute une nouvelle génération. Et les outils créés par le Gouvernement pour les y aider, comme les emplois d'avenir et les contrats de génération, les intéressent beaucoup.
La question de l'emploi étant centrale pour l'agroalimentaire, nous devons également nous préoccuper de l'élévation du niveau de compétences au sein du secteur, et donc de la formation. Les salariés doivent disposer des outils nécessaires pour valoriser les parcours et les compétences professionnels.
Cependant, si nous voulons rendre le secteur attractif, nous devons aussi nous préoccuper des conditions de travail, qui peuvent, on le sait bien, s'avérer rudes dans certaines filières.
Le deuxième axe d'une politique publique pour l'agroalimentaire est ce que j'appelle le « défi vert », c'est-à-dire la mutation écologique appliquée à l'industrie alimentaire. Si nous sommes tous convaincus de la nécessité d'une croissance verte, c'est avant tout parce que nous savons, au vu des exemples que nous observons tous les jours sur le terrain, que les entreprises ayant fait le choix d'économiser leur consommation d'eau, d'investir dans de nouvelles énergies ou d'innover en matière de recyclage sont aussi les plus performantes et les plus créatrices d'emplois. Nous devons donc prolonger dans le secteur agroalimentaire les initiatives prises dans le cadre de l'agroécologie – et dont le plan méthanisation, qu'il a présenté la semaine dernière avec Delphine Batho, est un exemple. Il s'agit d'un vrai levier de croissance, susceptible de nous redonner des marges de manoeuvre.
La lutte contre le gaspillage, autre aspect de la mutation écologique, est un enjeu pour lequel il me semble possible de laisser les étiquettes politiques au vestiaire, car il concerne chacun de nous. Cette lutte doit être menée dans l'ensemble des maillons de la chaîne alimentaire, du producteur jusqu'au consommateur. Sachant que plus de 30 % de la production alimentaire mondiale est jetée, perdue, gâchée, nous ne pouvions rester sans réaction. Nous avons donc lancé, avec l'ensemble des acteurs, une réflexion visant à élaborer des mesures très concrètes, immédiatement opérationnelles et susceptibles de s'appliquer à tous – y compris à la puissance publique. Ces mesures seront présentées dans un pacte national contre le gaspillage alimentaire que nous dévoilerons au mois de juin.
Le dernier axe d'une politique publique pour l'agroalimentaire est la qualité alimentaire pour tous, c'est-à-dire l'idée de justice sociale appliquée à l'alimentation. De même que je ne privilégierai jamais une façon de produire ou de transformer plutôt qu'une autre – par exemple les circuits courts par rapport aux autres modèles –, je ne veux pas d'une séparation entre une alimentation de bonne qualité, parfaitement traçable, destinée à ceux qui en aurait les moyens, et une alimentation différente accessible à tous les autres.
Bien sûr, nous devons favoriser les circuits courts, qui offrent une opportunité de croissance pour nos territoires. Mais nous devons nous montrer tout aussi exigeants pour l'ensemble des produits issus de l'industrie alimentaire. J'ai donc engagé, avec les professionnels du secteur, un travail sur l'amélioration de la valeur – au sens large – du contenu de nos assiettes, qu'il s'agisse des ingrédients – par exemple la teneur en sucre, en sel, en graisses – ou de l'équilibre nutritionnel.
Dans ce domaine, les Français attendent des actes. Pour restaurer leur confiance, il faut non seulement plus de transparence et d'information, mais aussi une meilleure qualité. Grâce aux efforts très importants consentis depuis des années par les entreprises agroalimentaires françaises, la sécurité sanitaire est, à l'évidence, bien mieux assurée aujourd'hui qu'elle ne l'était il y a cinquante ans. Mais nous pouvons encore faire mieux, et ce, dès cette année.
Pour conclure, j'ai la conviction que nos industries alimentaires sont une force économique de premier ordre dans notre pays, mais elles peuvent encore se développer. C'est tout le sens de la politique que je souhaite conduire avec vous.
Soyez sûrs de ma détermination à obtenir rapidement des résultats. Avec le soutien de la politique publique que nous sommes en train d'inventer – car il s'agit d'une nouveauté –, l'industrie agroalimentaire peut contribuer au redressement économique du pays et produire les résultats que le pays attend.