Intervention de Guillaume Garot

Réunion du 2 avril 2013 à 17h15
Commission des affaires économiques

Guillaume Garot, ministre délégué auprès du ministre de l'Agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, chargé de l'agroalimentaire :

Dominique Potier a insisté sur la force économique de l'agroalimentaire. Je suis convaincu que ce secteur représente un levier puissant pour développer la présence de notre pays à l'export. Aujourd'hui, en effet, les 11,5 milliards d'euros d'excédents commerciaux générés par le secteur proviennent essentiellement des vins et spiritueux, des produits laitiers et des céréales. Et d'autres filières agricoles – les viandes, en particulier – sont en grande souffrance.

C'est pourquoi nous avons défini, avec Nicole Bricq, une stratégie de dynamisation des exportations agroalimentaires, en faisant de l'Asie un objectif pour 2013. Nous avons ainsi installé un « comité Asie » comprenant des opérateurs publics, des représentants de nos ministères et des professionnels du secteur. L'idée est de constituer un arsenal d'outils au service des entreprises françaises de l'agroalimentaire soucieuses d'exporter sur ces marchés émergents. Le comité devra formuler ses propositions avant l'été, car dans ce domaine également, nous avons l'obligation de prendre des mesures concrètes et opérationnelles. Ce qu'il nous faut développer, c'est une culture commune de l'export, partagée entre l'État, les collectivités territoriales et les entreprises. Si nous voulons être forts à l'export, nous devons agir ensemble : c'est seulement à ce prix que nous pourrons surmonter les barrières douanières ou tarifaires et améliorer notre balance commerciale.

Mais nos entreprises doivent être capables de s'adapter à ces marchés émergents. Un produit fabriqué en France, pour se vendre à l'étranger, doit tenir compte du mode de vie, des traditions culinaires, du goût des consommateurs visés. Les fabricants de foie gras l'ont bien compris, mais ce n'est pas le cas de toutes les filières de production – on pourrait même citer de parfaits contre-exemples. J'invite donc les entreprises françaises à être extrêmement attentives aux attentes de leurs consommateurs étrangers.

Plusieurs orateurs ont évoqué les relations au sein de la chaîne alimentaire. La chaîne de valeur, pour reprendre l'expression de Dominique Potier, est-elle optimale ? Non. Nous le savons, des producteurs, des PME souffrent, et la grande distribution, parfois, refuse de voir les problèmes.

La loi LME, au risque de froisser certains, n'a pas produit les effets que l'on en attendait en termes de soutien à notre appareil de production. Combien de producteurs, combien de responsables d'entreprises de transformation nous disent qu'ils ne s'en sortent pas, qu'ils sont étranglés ? Il est donc nécessaire d'adapter, de corriger la loi, comme le Gouvernement s'y est engagé.

Selon moi, il est possible d'avancer sur deux questions.

La première concerne la volatilité du prix des matières premières, qui doit être prise en compte dans le prix final, ou du moins être reconnue par la grande distribution. Aujourd'hui, ce sont pour l'essentiel les producteurs qui en subissent les effets, de façon parfois dramatique.

La deuxième tient aux conditions de la négociation commerciale, parfois très rudes, au point que certaines PME ne peuvent ou ne veulent s'y soumettre. Je souhaite pour ma part apporter de la clarté à ces négociations, de façon à ce que chacun sache à quoi s'en tenir. Cela implique de partir des conditions générales de vente et de se montrer précis et clairs sur les prix, les volumes et les conditions de promotion.

Sur ces deux aspects, il est essentiel que les choses changent. Et l'examen du projet de loi sur la consommation porté par Benoît Hamon vous donnera l'occasion de vous prononcer sur les moyens de rétablir un équilibre économique dans le secteur.

Beaucoup d'entre vous m'ont interrogé sur les circuits courts. Ces filières, nous en sommes convaincus, sont un facteur de dynamisme économique, de développement de l'emploi local et de croissance. Même si elles ne peuvent suffire à nourrir l'ensemble des Français, ni contribuer, par définition, aux exportations au long cours, elles doivent donc être confortées. Pour cela, nous explorons deux pistes : le recours à la commande publique et l'amélioration de la formation des producteurs – ce qui implique aussi de les protéger, de les accompagner et de leur donner les instruments nécessaires pour ne pas subir un rapport de forces déséquilibré lors des discussions commerciales.

Dans ces deux domaines, nous vous présenterons des propositions dans le cadre de la loi d'avenir pour l'agriculture, dont l'inscription à l'ordre du jour des assemblées aura lieu avant la fin de l'année.

J'en viens aux farines animales. La France s'est opposée, sans succès, à la décision, prise le 18 juillet 2012, d'autoriser à nouveau l'usage des protéines animales transformées – PAT – pour l'alimentation des poissons. Mais les pisciculteurs français se sont engagés, dans le cadre d'une charte de filière, à ne pas utiliser de produits issus d'animaux d'origine terrestre. Le consommateur est donc en mesure de choisir, entre deux produits, celui qui a été fabriqué à partir de poisson élevé sans farines animales.

En ce qui concerne l'usage des farines animales dans les élevages porcins et avicoles, le Gouvernement ne déviera pas de sa position, car nous considérons que la société française – comme d'ailleurs celles d'autres pays d'Europe – n'est pas prête à l'accepter. Au moment où nous sortons à peine d'une crise de confiance relative à l'alimentation, cette question ne peut, selon nous, être mise à l'ordre du jour.

De même, nous continuons à souhaiter une remise à plat du dispositif européen de contrôle des OGM et des pesticides. À nouveau, il y va de la confiance éprouvée par les consommateurs à l'égard de leur alimentation. La France a saisi les instances communautaires de cette question, et nous souhaitons que le débat à venir prenne en compte les attentes et les inquiétudes des citoyens.

S'agissant des ingrédients alimentaires, y compris les huiles et les graisses, il est nécessaire d'obtenir des engagements collectifs de la part des professionnels de l'industrie agroalimentaire. Jusqu'à présent, des efforts ont été consentis par certaines entreprises, sur tel ou tel aspect de la composition de leurs produits, mais cela ne suffit pas. Si nous voulons rétablir la confiance des Français, la filière alimentaire, dans son ensemble, doit montrer qu'elle a compris leurs attentes et qu'elle est en capacité d'y répondre concrètement, par des améliorations substantielles. C'est ce à quoi nous travaillons actuellement.

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