Parmi vos nombreuses suggestions, je retiens celle relative au logement intermédiaire. Celui-ci bénéficiait du dispositif Girardin, qui a été supprimé il y a deux ou trois ans et dont ne subsistent que quelques crédits résiduels, de l'ordre de 265 millions en 2013. Le taux est meilleur que dans l'hexagone – 29 % sur une assiette de 300 000 euros – avec une obligation de location de neuf ans, comme ici. Ce type de dispositif avait bien marché en son temps. Il faudra donc surveiller très attentivement le nouveau dispositif, quitte à l'améliorer par le travail parlementaire.
Je peux entendre la demande du président Fruteau de maintenir la défiscalisation du logement social. Elle est frappée au coin du réalisme puisque, de toute évidence, le dispositif fonctionne. Je ne vous cache pas que, malgré les engagements pris au plus haut niveau, la censure du Conseil constitutionnel et la nécessité de faire des économies nous causent quelques embarras, auquel s'ajoute, pour moi, un souci d'efficacité. Aujourd'hui, il faudrait construire 10 000 logements pour répondre aux besoins sociaux. La combinaison « un tiers LBU – deux tiers défiscalisation », soit à peu près 500 millions contre 250 millions pour la défiscalisation, serait le dispositif le plus efficace et le plus rapide. Reste à analyser comment le maintenir tout en respectant nos contraintes budgétaires et de redressement des finances publiques.
Serge Letchimy veut connaître le montant des défiscalisations. J'ai pris la précaution de citer une moyenne, mais je peux préciser les chiffres : en 2011, le montant total de la défiscalisation était de 1,298 milliard ; en 2012, de 1,225 milliard ; en 2013, il est prévu 1,065 milliard. Sont compris les trois dispositifs liés à l'impôt sur le revenu (IR), à savoir ce qui reste du Girardin locatif pour 265 millions, le Girardin industriel pour 410 millions, le Girardin logement social pour 210 millions, ainsi que la défiscalisation liée à l'impôt sur les sociétés (IS), qui comprend aussi une part de logement social et de l'investissement productif pour un total de 180 millions. En résumé, 885 millions pour les trois dispositifs à l'IR et 180 millions pour la défiscalisation à l'IS, dont 500 millions à peu près sont dédiés au logement social.
Dans les arbitrages ministériels, c'est le seuil de départ qui déterminera les éventuelles économies, et c'est ce qui fait débat entre la commission des Finances, Bercy et moi-même. En accord avec Bercy, nous partons sur une épure de 1,1 milliard.
Sachant que chacun doit contribuer à l'effort de redressement, dans le contexte actuel de gel et de « surgel » des dotations budgétaires, mon souci de ministre des outre-mer, c'est de conserver aussi l'avance de 5 % que nous avons obtenue pour 2013 et de 13 % sur le triennal 2014-2016. Faire mieux avec moins, c'est ce que nous devons nous attacher à rechercher. Même si j'ai obtenu des assurances qu'il n'y aurait pas d'économies sur les outre-mer, il faut être honnête, il y a des incertitudes sur les montants.
La coordination entre les différentes autorités – préfecture, services fiscaux, DEAL – est un vrai sujet. J'ai proposé ce matin que les directions régionales des finances publiques (DRFiP) des outre-mer, qui sont gérées dans quatre villes différentes – Lyon, Marseille, Orléans et Paris –, soient rassemblées de manière à offrir à Bercy et au ministère des Outre-mer une vision plus globale des finances de ces territoires. Sur le plan local, il faut véritablement améliorer la coordination entre les projets qui sont éligibles de plein droit et ceux qui relèvent des agréments et définir qui délivre quoi. Il faudra trouver aussi un haut responsable pour le fonds d'initiative locale pour l'agriculture (FILA), une personne bien assurée, qui sache réduire les temps d'instruction des dossiers, car des durées trop longues sont préjudiciables aux investissements. Ce sera un élément de la nouvelle organisation.
Organiser des filières peut être pertinent, à condition de flécher. La LODEOM avait prévu une organisation, soit en filières, soit en zones géographiques, avec notamment les zones franches d'activité (ZFA). La Martinique, la Guadeloupe et La Réunion ont choisi les zones. J'ai demandé une évaluation de cette loi pour éventuellement réactiver des dispositifs encore bons. Or, la réforme de la taxe professionnelle a fait perdre tout intérêt à la ZFA. Du reste, celle-ci ne concernait pas la défiscalisation mais les exonérations de charges patronales de sécurité sociale pour les entreprises de plus de onze salariés. Il y a là un reprofilage à faire au bénéfice des entreprises. Je crains que cibler la défiscalisation sur l'agroalimentaire, le BTP ou l'agriculture n'empêche, en cette période d'économies, de financer aussi le tout-venant ; ou encore que l'on ne puisse pas financer à la fois la globalité, le polyvalent et la filière. Il y aura nécessairement concentration et je me méfie des concentrations thématiques, comme on en trouve en Europe et dont on veut sortir aujourd'hui, parce que, dans le cadre de ces concentrations, il n'y a pas de crédits pour tout le monde.
Pour le moment, la défiscalisation s'adresse à tout promoteur qui propose quelque chose. Les élus souhaitent un ciblage sur une activité locomotive pour le développement de la production locale. C'est là un point intéressant que, dans l'attente d'une évaluation, je n'ai pas encore tranché. Je suis preneur de toute information supplémentaire.
Annick Girardin a plaidé pour les petits projets de logements intermédiaires à la taille de son territoire. C'est vrai qu'il ne faut pas les négliger. Nous allons prendre des ordonnances qui devraient améliorer les choses et permettre à la défiscalisation de s'appliquer à des petits projets à taille humaine.
Saint-Martin, comme les collectivités du Pacifique, ont la compétence fiscale. Le problème avec notre réforme, c'est que les solutions qui pourraient être efficaces très rapidement ne peuvent pas s'appliquer dans les collectivités de l'article 74. Il faut trouver un dispositif général qui réponde aux spécificités de chaque territoire, y compris de ces collectivités et notamment de Saint-Martin.
La moralisation a commencé depuis longtemps, monsieur Nilor, à l'initiative d'Alain Richard, après que M. Séguéla a baptisé son yacht « Merci Béré ! » Même si cela remonte à plus de vingt ans, c'est l'image qui est malheureusement restée gravée dans les esprits, et c'est cette anecdote que rappellent les médias. Pourtant, aujourd'hui, il n'est plus possible pour la nomenklatura ou pour les privilégiés d'acheter en défiscalisation des biens à des fins de loisirs personnels sous les cocotiers. La seule chose qui n'ait pas été faite par nos prédécesseurs, alors pourtant qu'un décret était prêt, est la moralisation des sociétés de défiscalisation, dites « monteurs », pour éviter que certains n'accaparent une part essentielle des ressources collectées. Ce sera l'une des dernières étapes pour finaliser la moralisation, mais il faudra toutefois veiller à ne pas rendre inefficace le dispositif. Pour autant, même si cela contribue à une meilleure acceptation par l'opinion publique, ce n'est pas là que réside la solution.
La défiscalisation doit effectivement servir au développement des productions locales, d'où l'utilité des schémas de développement économique. Si l'on n'arrivait pas à placer le curseur pour le développement de filières, il y aurait moyen, à travers un partenariat avec les régions et les départements, d'associer à la défiscalisation des incitations pour diriger l'investissement productif, même porté par des promoteurs privés, vers une filière ou une autre. Demain soir, vous allez voter sur un dispositif nouveau concernant l'accès au marché de la restauration collective, dispositif qui n'avait pas été intégré dans la loi contre la vie chère par erreur. Nul besoin de loi, cependant, pour que, en amont, l'État s'entende avec les collectivités sur des plans d'action pour développer l'agriculture et l'agroalimentaire. En même temps qu'un gain en produits frais ou une plus-value consistant en de moindres émissions de CO2, on devrait ainsi, tout en respectant les législations européenne et nationale, pouvoir prioriser la production locale, en particulier l'agriculture et l'agro-transformation. C'est considérable ! Si l'on arrive à flécher une défiscalisation accompagnée d'aides incitatives des régions, on pourra donner une vraie impulsion aux filières choisies par les élus. C'est une voie qui pourrait passer par le fameux contrat territorial de développement dont je discute actuellement avec les uns et les autres.
Enfin, il pourrait y avoir un lien entre défiscalisation et BPI à travers le crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE), ce crédit d'impôt étant un bon moyen pour favoriser les investissements et la BPI intervenant en préfinancement. Le crédit d'impôt est refusé par les entreprises au motif que toutes ne paient pas d'impôt. Mais ce n'est pas pour autant qu'elles n'y sont pas assujetties. Elles pourraient donc bénéficier du crédit d'impôt sous la même forme que les personnes physiques reçoivent la prime pour l'emploi : un chèque du Trésor. La difficulté du crédit d'impôt, c'est qu'il est perçu ex post, ce qui pose un problème de financement ex ante. La réflexion est en cours pour trouver les dispositifs appropriés pour financer la trésorerie. De même, l'organisation de la présence de la BPI dans les régions est en discussion. En particulier, n'est pas encore tranchée la question de savoir qui, de l'Agence française de développement, d'OSÉO, de la Caisse des dépôts ou de la BPI elle-même, fera office de correspondant. Nous avons déjà quelque idée sur cette question et nous rencontrerons prochainement les parlementaires et les présidents de région pour choisir la formule définitive