Intervention de Guillaume Larrivé

Séance en hémicycle du 9 avril 2013 à 15h00
Élection des conseillers départementaux des conseillers municipaux et des délégués communautaires et modification du calendrier électoral — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuillaume Larrivé :

Nous continuons, de même, à demander la suppression du nouveau mode de scrutin départemental binominal, qui n'est réclamé par personne sur le terrain, car personne ne pense sérieusement que l'instauration d'un binôme va rendre plus efficace le travail des différents échelons de collectivités. Nous nous en sommes expliqués lors des deux premières lectures : à aucun moment, mes chers collègues de la majorité socialiste, vous ne nous avez donné le début d'une esquisse d'argument démontrant qu'il était nécessaire de créer ce binôme pour améliorer l'efficacité des départements. En réalité, nous l'avons dit et nous persistons à l'affirmer, ce n'est qu'un prétexte pour redécouper à votre guise tous les cantons de tous les départements de France. L'opacité de ce redécoupage cantonal n'est plus à démontrer.

Vous improvisez aujourd'hui même, monsieur le ministre, à la dernière seconde, un amendement du Gouvernement que nous avons découvert à quatorze heures trente et qui précise que le redécoupage se fera « sur des bases essentiellement démographiques ».

Il est vrai que l'eau bout à 100 degrés et que la Constitution demande de respecter les équilibres démographiques. Mais il faudra aller un peu plus loin au moment de la discussion de l'amendement. Est-ce à dire que le tunnel de 20 % que vous aviez défini en première lecture et que vous aviez porté à 30 % en deuxième lecture se trouve abandonné, rétréci ou élargi ? Il faudra choisir ou, en tout cas, nous dire quelle lecture vous faites de votre amendement. L'improvisation de cette rédaction appelle à tout le moins des précisions. J'ajoute surtout qu'elle ne règle en rien le problème majeur que nous avons soulevé, celui de la transparence du redécoupage.

Oui, monsieur le ministre, nous persistons à vous demander, sans grand succès jusqu'à présent, la création d'une commission pluraliste, présidée par un parlementaire de l'opposition et dont le rapporteur serait un parlementaire de la majorité, qui donnerait un avis, publié au Journal officiel, sur chaque redécoupage, dans chaque département.

C'est cette commission pluraliste – je le dis sous le contrôle de M. Marleix et de M. Marleix (Sourires) – qui, seule, permettrait d'assurer la transparence politique de cette opération de redécoupage. Si vous persistez à la refuser, c'est parce que vous faites le choix de l'opacité.

Plus de transparence politique : c'est à cet effort que nous continuons à vous appeler, dans l'intérêt des territoires de notre pays.

Mais l'intérêt des territoires, le Gouvernement y a-t-il vraiment réfléchi ? Nous ne le pensons pas, et c'est notre deuxième motif d'opposition à votre projet de loi, Car vous vous obstinez à vouloir modifier les règles d'élection dans les régions, les départements et les communes, alors que personne ne sait aujourd'hui quelle organisation le Gouvernement souhaite dessiner pour les collectivités territoriales dans les années à venir.

Le Président de la République – oui, nous le citons, monsieur le ministre –, dans un discours supposé fondateur, prononcé à la Sorbonne, cet automne, avait annoncé que le Parlement serait saisi, au début de l'année 2013, d'une réforme tendant, notamment, à clarifier les compétences de chaque collectivité.

Nous en sommes bien loin. En réalité, le Gouvernement est dans l'incapacité d'indiquer à l'Assemblée nationale où il veut aller et s'il a, oui ou non, un vrai projet pour les collectivités territoriales de notre République.

Nous comprenons, à la lecture de la presse – et seulement à la lecture de la presse puisque, pour l'instant, aucun ministre n'a daigné s'exprimer dans cet hémicycle sur cette question –, que le Premier ministre a dû faire marche arrière, mardi dernier, et a décidé de retirer l'avant-projet de loi sur la décentralisation, qui comptait près de 175 pages et plus de 120 articles. Sans doute était-ce là une manifestation paradoxale du « choc de simplification » évoqué par le chef de l'État.

Le président de l'association des maires ruraux, Vanik Berberian, a qualifié ce projet d'usine à gaz. Notre collègue Alain Rousset, député socialiste de la Gironde, a expliqué, en sa qualité de président de l'Association des régions de France, qu'à vouloir contenter tout le monde, le texte n'a donné satisfaction à personne. Et le président du groupe socialiste au Sénat, François Rebsamen – vous voyez, mes chers collègues, que j'ai de bonnes références ! – a été plus clair encore, en affirmant l'opposition résolue de son groupe au texte du Gouvernement !

Aussi, devant l'opposition générale, le Gouvernement a été contraint de renoncer à son projet, en se résignant à le découper en tranches : une loi sur les métropoles, d'abord, puis, sans doute, une loi sur les régions et, peut-être un jour, une loi sur le reste, c'est-à-dire les départements, les intercommunalités et les communes. Le président socialiste du conseil général des Côtes-d'Armor, Claudy Lebreton, en tant que président de l'Assemblée des départements de France, a eu raison, je crois, de souligner que cette reculade du Gouvernement était un échec collectif pour la gauche.

Mais c'est aussi, hélas ! un échec pour notre pays. Car l'incapacité du Gouvernement et de la majorité à définir, après presque un an de législature, un projet pour les collectivités territoriales, va se payer très cher.

Vous ne savez pas quelles compétences vous souhaitez confier à quelles collectivités.

Vous ne savez pas non plus quelles relations entretiendront les collectivités avec l'État.

Le Gouvernement a décidé de diminuer de 4,5 milliards d'euros, dans les deux ans, le montant des dotations versées par l'État aux collectivités, mais personne ne sait, ici, comment cette diminution sans précédent va s'appliquer.

Je prendrai un seul exemple, très concret, qui nous concerne tous : l'avenir des contrats de projet entre l'État et les régions. L'exécution des contrats actuels, préparés par le précédent gouvernement, s'achève dans quelques mois, en décembre 2013. Le Gouvernement entend-il, oui ou non, préparer de nouveaux contrats ? Ces contrats seront-ils déclinés, comme c'était jusqu'alors le cas, dans les départements, dans les aires urbaines comme dans les territoires ruraux, dans les agglomérations et les pays ? Quel en sera le volume ? Quelles en seront les priorités ? Des milliers d'élus locaux attendent, monsieur le ministre, non pas la création du binôme, mais des réponses précises à ces questions qui engagent l'avenir, puisqu'elles conditionnent le financement des projets d'infrastructures et le développement des territoires.

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