Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je commencerai par revenir sur la méthode retenue et son calendrier.
Dès le début, notre groupe a indiqué combien il lui semblait curieux de décider du mode de scrutin des collectivités territoriales avant de connaître le nouveau paysage institutionnel. Il nous semblait en effet plus judicieux, plus logique, de commencer par abroger la réforme territoriale de 2010, comme nous ne cessons de le demander, pour ensuite reporter les élections régionales et départementales à 2015, puis discuter du contenu du nouvel acte de décentralisation et, après tout cela seulement, examiner la question des modes de scrutin.
Cette position, que nous avons affirmée au cours de la première comme de la deuxième lecture, est confortée par deux éléments nouveaux qui viennent plaider, selon nous, pour une révision du calendrier des réformes territoriales. Premier élément : le report, à la demande du président du Sénat lui-même, du projet d'acte III de la décentralisation sous la forme qui était annoncée. Ce projet a été non seulement reporté, mais aussi divisé en trois parties, dont l'examen sera étalé dans le temps. Nous examinerons d'abord le texte sur les métropoles, avant l'été, puis celui portant sur les régions, à l'automne. Le reste, rassemblé dans un texte intitulé « compétences et solidarités territoriales », sera inscrit plus tard, peut-être même après les élections municipales de 2014.
Plusieurs de mes collègues ont déjà fait référence au deuxième élément nouveau : c'est l'échec retentissant du référendum sur la collectivité unique d'Alsace, qui a eu lieu dimanche dernier. Au-delà des éléments conjoncturels, en votant non, nos concitoyens ont clairement rejeté cette dangereuse collectivité unique qui n'apportait à leurs yeux aucune solution concrète à leurs problèmes. Par ce vote, ils ont réaffirmé leur exigence de proximité, et leur opposition à tout big bang territorial.
Nous en tirons, pour notre part, deux conclusions. Premièrement, il faut prendre le temps du débat, écouter les élus locaux et leurs associations représentatives. C'est indispensable pour mener à bien une réforme de cette importance. Il faut également prendre le temps de réécrire cet acte III, en prenant pour fil rouge la réponse aux besoins humains et aux défis de la démocratie à tous les niveaux. Cette réécriture devra rappeler le rôle essentiel de la commune, véritable lieu de démocratie et de citoyenneté, ainsi que la pertinence des trois autres niveaux : département, région, et État. L'État était le grand absent de la première version de la réforme, celle qui a été reportée. Il doit rester le garant de la solidarité et de l'égalité républicaines.
Le temps est d'autant plus nécessaire qu'il doit permettre – je veux insister sur ce point – le respect du choix des citoyens à l'occasion des prochaines élections municipales. Il serait en effet incompréhensible que la volonté populaire et les choix qu'elle exprimera pour l'avenir de chaque commune au printemps 2014 soient contredits par une réforme votée avant ce scrutin qui donnerait tous les pouvoirs ou presque aux métropoles à partir du 1er janvier 2015.
Tout cela nous conduit à penser, monsieur le ministre, que le mieux – et il n'est pas trop tard, même si je ne me fais guère d'illusion – serait que le Gouvernement maintienne, bien sûr, les dispositions du projet de loi qui tendent à reporter à 2015 l'organisation des élections cantonales et régionales, mais qu'il remette à plus tard l'examen des dispositions relatives au mode de scrutin des élections départementales. Il nous paraît, en effet, plus logique de décider du mode de scrutin de ces élections départementales lorsque nous aurons une connaissance précise du sort qui sera réservé aux départements. Ce temps de réflexion et de débat indispensable nous permettrait aussi, dans le cadre de cette reprise de dialogue avec les associations représentatives des élus locaux, d'organiser la concertation sur ce mode de scrutin départemental rejeté à deux reprises par le Sénat, rejeté par cinq groupes sur six de notre assemblée, mode de scrutin, on le sait, qui suscite sur le terrain perplexité et scepticisme. Si telle ne devait pas être la position du Gouvernement, notre groupe serait, évidemment, amené, en cette nouvelle lecture, à réaffirmer ses positions des deux premières lectures. Je les résume brièvement.
Nous sommes, ainsi, opposés à la création de ce curieux binôme dont le premier effet sera de renforcer le bipartisme…