Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dès le début de la discussion de ce texte, notre groupe avait indiqué combien il lui semblait incohérent de décider d'un mode de scrutin avant de connaître le nouveau paysage institutionnel annoncé avec l'acte III de la décentralisation.
La révision du calendrier s'imposerait encore plus aujourd'hui, du fait de l'étalement dans le temps de l'examen du projet de décentralisation, mais aussi de l'échec retentissant, dimanche dernier, du projet de collectivité territoriale d'Alsace, qui rappelle l'attachement de nos concitoyens aux départements et à la proximité.
Oui, il faut prendre le temps du débat et de l'écoute des élus locaux. Un temps d'autant plus indispensable pour respecter le choix des citoyens lors des prochaines consultations électorales. Il serait en effet incompréhensible que la volonté populaire et les choix exprimés pour l'avenir de chaque commune au printemps 2014 soient contredits par une réforme donnant presque tous les pouvoirs aux métropoles à partir du 1er janvier 2015.
Ce sont autant de raisons qui plaident au moins pour différer l'application de la partie du texte relative au mode de désignation des conseillers départementaux, afin que celui-ci ne soit déterminé qu'une fois connu le sort réservé aux départements, et afin que la reprise du dialogue avec les associations d'élus puisse aussi porter sur la proposition du binôme, rejetée à deux reprises par le Sénat et par cinq groupes sur six de notre assemblée, et qui suscite perplexité et scepticisme sur le terrain.
Ce serait la voie de la sagesse. Faute de l'emprunter, le Gouvernement, par son intransigeance, ne peut que nous amener à réaffirmer, lors de cette troisième lecture, notre opposition aux deux points majeurs du texte.
D'abord la création de ce curieux binôme dont le premier effet sera de renforcer le bipartisme sans permettre une réelle représentation des territoires. Je veux une nouvelle fois rappeler ici qu'il est possible de conjuguer la parité, le pluralisme et la représentation des territoires tout en évitant les aléas d'un découpage toujours sujet à caution. Il suffit pour cela de s'inspirer, comme nous l'avons proposé, des modes de scrutin en vigueur pour les municipales et les régionales.
Nous sommes également opposés au nouveau mode de désignation des délégués des communes à l'intercommunalité. Ils doivent rester les représentants des conseils municipaux. À terme, le fléchage ouvre inéluctablement la voie à un scrutin séparé, synonyme de mort programmée des communes. C'est d'ailleurs pourquoi l'appellation de « conseillers communautaires » retenue par la commission mixte paritaire dans le projet de loi organique nous convient encore moins que celle de « conseillers intercommunaux ».
À ces deux motifs d'opposition s'ajoute désormais un troisième, la remontée à 1 000 habitants du seuil d'application du mode de scrutin des municipales. Nous restons favorables au seuil de 500 habitants, qui permettrait de garantir la parité et d'éviter le panachage dans 7 000 conseils municipaux supplémentaires, afin que le débat porte davantage sur les projets que sur les personnes.
C'est pour l'ensemble de ces raisons que, tout en appelant à un nouvel âge de la démocratie locale qui respecte pleinement la souveraineté populaire, les députés du Front de gauche voteront une nouvelle fois résolument contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)