Intervention de Gaby Charroux

Séance en hémicycle du 16 avril 2013 à 15h00
Infrastructures et services de transports — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGaby Charroux :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission du développement durable, madame la rapporteure, monsieur le rapporteur pour avis, chers collègues, deux questions essentielles ont été au coeur de nos débats : celle de l'écotaxe poids lourds et celle, majeure, du dumping social pratiqué dans le transport maritime, conséquence de l'ouverture européenne à la concurrence libre et non faussée.

L'écotaxe poids lourds était un engagement du Grenelle de l'environnement. Votée en 2009, elle n'est toujours pas entrée en application, et pour cause : le précédent gouvernement avait défini des modalités d'application d'une complexité telle qu'elles la rendaient inapplicable. La profession, bien sûr, était vent debout contre le dispositif alors défini.

Nous ne pouvons donc que nous féliciter que cette écotaxe voie enfin le jour, même si nous attendons le texte réglementaire qui en donnera le réel mode d'emploi, notamment en ce qui concerne la fixation des taux appliqués aux régions de chargement et de déchargement. Vous n'êtes pas sans connaître les craintes exprimées par la profession sur ce sujet.

Je crois, par ailleurs, que nous avons fait preuve de discernement en examinant les activités de transport à protéger, telle la collecte du lait, qui sera exonérée. Je rappelle toutefois – comme mon collègue André Chassaigne a eu l'occasion de le dire au cours du débat – que cette taxe n'a d'efficacité que si nous développons les modes de transports alternatifs, c'est-à-dire le rail, avec une vraie politique ambitieuse de fret, et la voie d'eau. Cela implique que la SNCF modifie sa stratégie et cesse de brader le fret, qui a reculé de 40 % entre 2000 et 2011.

En ce qui concerne la voie d'eau, nous sommes très en retard au regard de nos partenaires européens, et les incertitudes qui pèsent sur la réalisation du canal Seine-Nord-Europe, qui permettrait de relier notre pays au réseau européen, ne sont pas de bon augure.

Un débat parlementaire serait nécessaire pour fixer les conditions et se donner les moyens d'un développement de la multimodalité sans lequel l'écotaxe n'aurait que peu d'intérêt.

S'agissant du transport maritime, l'article 23 du projet de loi créant un titre VI du code des transports relatif aux « conditions sociales du pays d'accueil » a concentré l'attention. L'ouverture à la concurrence a transformé ce secteur en une véritable jungle sociale. Des navires sont aujourd'hui affrétés selon des normes internationales qui conduisent à harmoniser par le bas les conditions d'embauche, de rémunération, de protection sociale et de sécurité des équipages.

Le projet de loi a pour objet d'imposer des règles en la matière, lesquelles, nous dit-on, ne peuvent être qu'a minima pour être eurocompatibles. Cela a au moins le mérite de nous confirmer ce que prône l'Union européenne, c'est-à-dire un moins-disant social au service de la concurrence et de la rentabilité.

Pour ma part, je continue de défendre l'application obligatoire des règles sociales et fiscales françaises à ce secteur pour les pavillons naviguant dans nos eaux territoriales, de même que le pavillon français de premier registre à tous les navires opérant au cabotage national et sur les lignes de service public de continuité territoriale. Cela éviterait que nous connaissions les méfaits d'une concurrence sauvage comme celle qui a, vu, par exemple, se développer Corsica Ferries au détriment de la SNCM. Nous avons là, monsieur le ministre, une profonde divergence d'appréciation.

Les marins de la SNCM, de la Compagnie méridionale de navigation, sont très inquiets pour leur avenir, pour l'avenir des compagnies françaises dans leur ensemble. Il est à craindre que la mise en oeuvre de ces dispositions soit un coup mortel porté, entre autres, à la SNCM. Vous comprendrez que nous ne pouvons l'accepter.

Aucun bateau n'assurera les liaisons en Méditerranée aujourd'hui. Les marins et leurs représentants attendent la décision de la représentation nationale, ils attendent notre vote. Nous avons la possibilité de nous opposer à cette logique dévastatrice de la concurrence libre et non faussée que le peuple de France a rejetée le 29 mai 2005. Encore faut-il en avoir la volonté.

Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, chers collègues, notre groupe votera contre ce projet de loi.

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