Intervention de Dominique Hoorens

Réunion du 27 mars 2013 à 18h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Dominique Hoorens, directeur des études économiques et financières de l'Union sociale pour l'Habitat :

Le modèle économique d'une opération de construction de logement social est fondé, pour l'essentiel, sur l'effet de levier de l'endettement. En arrondissant les chiffres, un logement social de 140 000 euros est financé – en moyenne car cela varie beaucoup d'un produit à l'autre et d'un lieu à un autre – par 100 000 euros d'emprunt, 20 000 euros de fonds propres et 20 000 euros de subventions. Ainsi, dès lors que nos organismes disposent des 40 000 euros d'apport, l'emprunt peut être souscrit auprès de la Caisse des dépôts, qui n'a jamais eu, jusqu'à présent, de problème de liquidité. Cet accès, quasi mécanique, aux liquidités de la Caisse des dépôts est une chance. Le modèle est, en effet, basé sur les prêts de la Caisse, lesquels s'appuient sur l'épargne des livrets A garantis par l'État. Tous les acteurs doivent s'assurer qu'il n'y a pas de risque dans l'utilisation de ces ressources ; l'effet de levier fonctionne grâce à un endettement sécurisé, qui doit lui-même être sécurisé.

Or, l'endettement des organismes n'est possible que parce que les ressources à venir sont anticipées, à savoir les loyers que paieront les futurs occupants du programme. En dernière analyse, ce sont donc les loyers bien plus que les aides qui financent le logement social, et qui autorisent l'effet de levier initial. Il est donc nécessaire de les sécuriser. Comment le modèle HLM les garantit-il ? Le plan de financement d'un programme de logements sociaux est construit sur des niveaux de loyers prédéfinis. Le modèle HLM ne prévoit donc pas un loyer en fonction des revenus des habitants. La fixation des loyers par types d'opérations sécurise le niveau des ressources ultérieures, alors que faire varier les loyers selon les revenus des locataires introduirait une grande incertitude.

Le logement social s'adressant bien évidemment à des populations modestes, pour qu'elles puissent supporter les niveaux de loyers attendus il doit y avoir une bonne connexion des programmes avec les aides à la personne. Le développement du logement social suppose donc de conjuguer aides à la pierre, emprunts et aides à la personne. Par ailleurs, les organismes HLM ne sont pas que des producteurs, mais aussi des exploitants sur le long terme des logements qu'ils ont produits. Les organismes savent ce que coûte un logement social en exploitation : ils connaissent le niveau de loyer qui est défini par la législation. C'est la différence entre ces loyers et les frais d'exploitation qui définit leur capacité à rembourser, donc leurs possibilités d'endettement.

À partir du moment où vous connaissez ce dont vous allez disposer chaque année pendant une vingtaine ou une quarantaine d'années, vous pouvez ensuite calculer mathématiquement l'emprunt (capital et intérêts) que vous pourrez réaliser. Le calcul est assez facile mais dépend de deux variables extrêmement importantes : la durée et le taux de l'emprunt.

Concernant la durée, la Caisse des dépôts et consignations prête aux organismes de logement social généralement sur quarante ans, voire sur cinquante ans pour le foncier. Existe-t-il une marge de manoeuvre ? Peuvent-ils emprunter sur une plus longue durée – ce qui permet, à capacité d'endettement donnée, d'emprunter davantage. Emprunter plus longtemps est-il une solution ? Peut-être est-ce envisageable pour un certain nombre de programmes ; mais quarante ans, c'est déjà long. Je ne pense pas qu'il puisse y avoir là une marge de manoeuvre systémique.

De même s'agissant de la deuxième variable, peut-on avoir un taux plus bas ? La Caisse des dépôts et consignations transforme la durée des ressources utilisées, mais non leur prix. Le coût des ressources dont elle dispose découle du taux du livret A (de 1,75 % actuellement), auquel s'ajoute la rémunération des banques (un peu plus de 0,5 %). À l'égard des organismes de logement social, sa marge est relativement faible, voire nulle sur le produit standard qu'est le PLUS (prêt locatif à usage social) puisque le taux demandé s'établit à 1,75 % plus 0,6 %, soit quasiment au coût de la ressource.

Sur un PLAI (prêt locatif aidé d'intégration), la Caisse prête à un taux encore inférieur, soit en dessous de son coût de ressource.

Sur un PLS (prêt locatif social) enfin, elle prête un peu au-dessus de son coût de ressource.

Comment la Caisse des dépôts et consignations peut-elle faire varier à la baisse ces taux ? Soit on baisse le taux du livret A mais si le taux est trop bas, les gens n'y placeront plus leur argent ; soit on baisse le niveau de commissionnement des banques.

Structurellement, pour faire passer une capacité d'endettement donnée à un volume d'emprunts plus important, il faut diminuer les taux de prêt ; et pour ce faire, l'approche systémique consiste à baisser la commission de centralisation perçue par les banques. On peut trouver des arguments à cette baisse : avec le relèvement du plafond du livret A, la masse des épargnes collectées est plus importante, sans que le travail ne soit sans doute plus important pour les banques.

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