Mesdames et messieurs les députés, j'ai eu l'occasion au cours des derniers jours de rencontrer le président de votre commission et de l'assurer de mon entière disponibilité pour répondre aux questions que vous souhaiteriez me poser en matière budgétaire et fiscale. J'ai également déjà rencontré le rapporteur général et plusieurs membres de votre commission sur des sujets spécifiques qui font l'objet de réflexions ou de rapports en cours, en vue d'alimenter le dialogue que le Gouvernement souhaite entretenir avec les parlementaires.
Vous vous interrogez notamment, monsieur le président, sur le décalage existant en matière de déficit entre l'objectif de 4,5 % et le chiffre atteint : 4,8 %. Pour répondre, il convient tout d'abord de rappeler la situation que nous avons trouvée à notre arrivée : le budget 2012 a en effet été exécuté par deux gouvernements successifs, qui ont, chacun, été six mois à la tête du pays. Il faut également nous pencher sur notre action puis sur les résultats enregistrés. Je m'appuierai sur des chiffres, afin d'aborder ce sujet de façon incontestable.
Le précédent gouvernement avait élaboré au mois de septembre 2011 le projet de budget pour 2012 sur une hypothèse de croissance de 1,75 %, une hypothèse alors en décalage avec le consensus des principaux instituts spécialisés, qui l'établissait entre 1 % et 1,2 %. Le déficit attendu pour 2011 tournait alors autour de 5,2 %, le niveau des dettes avait augmenté de vingt-cinq points de PIB au cours des cinq précédentes années et le déficit du commerce extérieur atteignait les 75 milliards, un chiffre qui traduisait l'absence de compétitivité de notre économie.
Le nouveau gouvernement a commandé dès le 18 mai un audit à la Cour des comptes de manière à élaborer un projet de loi de finances rectificative dans des conditions objectives et incontestables. Ce rapport nous a été rendu au mois de juillet. Les hypothèses de croissance avaient du reste déjà été révisées, puisqu'elles étaient passées de 1,75 % au mois de septembre 2011 à 1 % au mois de février 2012, puis à 0,7 % en avril 2012, lors de la présentation, par le précédent gouvernement, de son programme de stabilité.
Pour la Cour des comptes, il était impossible de tenir les objectifs de dépenses du fait que celles-ci avaient été manifestement sous-évaluées à hauteur de 2 milliards d'euros, s'agissant notamment du financement de la prime de Noël pour les bénéficiaires du RSA ou de l'évolution de l'allocation adulte handicapé. Les hypothèses sur lesquelles le budget de 2012 avait été élaboré n'étaient donc pas les bonnes – elles chuteront même à 0,3 % au mois de juillet. Nous devions également contenir les 2 milliards d'euros de dérapages éventuels précités si nous voulions atteindre les objectifs budgétaires que nous avions fixés devant la Commission européenne.
C'est pourquoi nous avons immédiatement pris des mesures de nature fiscale à hauteur de 7 milliards d'euros. Pourquoi de telles mesures ? Parce qu'il est très difficile de prendre en quelques semaines seulement des mesures d'économie sur les dépenses qui soient ciblées avec discernement, car cela implique de mener, en amont, un travail approfondi de réorganisation budgétaire avec les administrations des différents ministères. Nous avons donc demandé un effort aux contribuables les plus riches tout en épargnant ceux dont la capacité contributive est plus faible. Nous avons par ailleurs gelé 1,5 milliard d'euros, somme qui n'a à aucun moment été dégelée. Cette décision nous permettra de disposer en fin d'exercice d'une réserve de précaution de 5,9 milliards d'euros.
D'aucuns prétendent que nous n'aurions pas atteint nos objectifs de dépenses pour 2012 : c'est pourquoi je tiens à donner les chiffres incontestables de l'évolution de la dépense. Entre 2002 et 2007, la croissance moyenne annuelle de la dépense publique tourne autour de 2,3 %. Entre 2007 et 2012, elle tombe à 1,7 %. En 2012, elle atteint 0,7 %, alors qu'on attendait 0,5 %, l'écart de 0,2 point étant essentiellement dû à une évolution plus dynamique que prévue des dépenses des collectivités locales. L'évolution de la dépense pour 2012 demeure toutefois dans un rapport de 1 à 3 avec l'évolution tendancielle de la dépense constatée au cours des précédents exercices budgétaires. Les mesures que nous avons immédiatement prises ont donc permis de contenir l'évolution de la dépense publique et donc d'améliorer la situation de notre déficit. En effet, d'après les calculs des services de la direction du budget, si nous n'avions pas fait adopter une loi de finances rectificative, le déficit budgétaire se serait aggravé, puisque, compte tenu de l'évolution des hypothèses de croissance et des dépenses publiques non documentées, qui dérapaient, il aurait atteint 5,5 %, avec un déficit structurel de 4,2 %. L'effort d'ajustement structurel n'aurait donc été que de 0,7 % alors que nous nous étions engagés sur une baisse de 1,2 %. La maîtrise des dépenses publiques a donc eu un effet immédiat sur l'évolution du déficit. Compte tenu des mesures que nous avons prises tant en recettes qu'en dépenses, nous avons ramené en 2012 le déficit structurel à 3,7 %, ce qui correspond à un effort d'ajustement structurel de 1,2 % – et non de 0,7 % seulement si, comme je l'ai dit, nous n'avions rien fait.
Je tiens également à insister sur la baisse, en 2012, de 300 millions d'euros des dépenses de l'État. Quant à l'ONDAM, la correction de la trajectoire a permis de réaliser 1 milliard d'euros d'économie par rapport au PLFSS. Ces deux chiffres témoignent donc d'une absolue maîtrise des dépenses publiques – État et santé – en 2012.
S'agissant des prélèvements, j'ai souvent entendu dire que les 7 milliards de prélèvement décidés à l'été avaient conduit à une pression indue en raison de la préférence donnée à la fiscalité sur les économies de dépenses. Il faut savoir que, compte tenu du taux de croissance réelle par rapport aux prévisions, nous avons dû, à notre arrivée, réduire de 8 milliards le niveau des recettes fiscales attendues, 6 de ces 8 milliards résultant d'une erreur manifeste de prévision du budget initial. Toutefois, alors que la loi de finances initiale tablait sur 915 milliards d'euros de prélèvements obligatoires pour 2012, ceux-ci se sont élevés à 914 milliards – ce chiffre inclut les 7 milliards d'ajustement –, soit un montant inférieur d'1 milliard aux prévisions initiales.
Je souhaite enfin vous indiquer les raisons précises pour lesquelles le déficit s'élève à 4,8 % et non à 4,5 %. Tout d'abord, le déficit réel a été en 2011 de 5,3 % et non de 5,2 % : 0,1 % se trouve donc mécaniquement reporté aussi sur 2012. Ensuite la France a dû, à la demande de l'Union européenne, réajuster à hauteur de 800 millions d'euros les crédits de paiement nécessaires au financement des grandes politiques européennes – Erasmus et autres projets financés par des fonds structurels –, pour compenser la décision de novembre 2010 de les « raboter ». Il a également fallu comptabiliser dans notre déficit les 2,5 milliards d'aide à la deuxième recapitalisation de Dexia, qu'Eurostat a considérée comme une dépense de fonctionnement, contrairement à la première. Nous avons enfin dû tenir compte du décalage existant entre les hypothèses de croissance de la troisième loi de finances rectificative et le chiffre réel, inférieur de 0,2 point.