Quel est le lien entre les comités stratégiques de filière et les pôles de compétitivité ? Les premiers, constitués au niveau national, traitent de grands sujets de moyen terme, susceptibles de fédérer une filière en matière énergétique, de formation ou de cap technologique par exemple. Les seconds, beaucoup plus nombreux puisqu'ils sont au nombre de 71, sont territorialisés et traitent davantage de projets concrets, plutôt d'amont, soutenus par l'État et les collectivités territoriales. En réalité, les comités stratégiques de filière et les pôles de compétitivité constituent, chacun, un bout de la chaîne. Il faut essayer de faire converger les deux démarches. C'est d'ailleurs ce qui est en train de se passer. En effet, dans la troisième phase qui vient d'être lancée, les pôles de compétitivité seront davantage des « usines à produit » : au travers de projets plus proches de l'aval et donc plus concrets, on peut espérer coller davantage aux caps technologiques qui auront été fixés dans une filière donnée par le comité stratégique. Les comités stratégiques de filière n'existent que depuis deux ou trois ans, contre près de dix ans pour les pôles de compétitivité. L'idée est bien de faire progressivement converger ces deux dispositifs complémentaires.
Une autre de vos questions est de savoir que faire à court terme quand l'horizon des contrats de filière est, lui, plutôt 2020-2030. La BPI, nouvellement créée pour dynamiser et faciliter aussi bien les financements que les investissements, met au point de nouveaux produits. Il y en aura notamment un – cela répond à la question de Mme Grommerch – pour combler ce qu'on appelle « la vallée de la mort » que représente l'intervalle entre la conception d'un produit et la mise sur le marché de projets innovants. Il prendra place entre les aides à l'innovation en amont des projets industriels et les aides d'aval qu'apporte aujourd'hui le FSI et que fournira demain la branche investissements de la BPI pour aider une entreprise à franchir un seuil dans son développement ou à passer un trou d'air dans son marché. OSEO et BPI Financement y travaillent.
Le crédit d'impôt compétitivité emploi, pour sa part, ne fait que démarrer. Je ne dispose pas encore de données chiffrées, mais la récente réunion sur le sujet avec les préfets de région, présidée par le Président de la République, a montré que le dispositif était très suivi au niveau de chacune des régions. Un effort d'information n'en demeure pas moins nécessaire, car cet outil n'est pas encore bien connu des entreprises les plus susceptibles d'en bénéficier. Suite à ce constat, des campagnes publicitaires ont d'ailleurs été lancées. Pour faciliter l'appropriation du dispositif par ses bénéficiaires potentiels et permettre aux entreprises d'en ressentir les effets concrets dès 2013, la BPI va mettre en place une avance.
Deux questions sectorielles nous ont été posées, concernant l'une l'acier, l'autre la filière numérique.
S'agissant d'Arcelor-Mittal, vous savez qu'il a été décidé à l'automne dernier que M. Mittal investirait 180 millions d'euros sur le site de Florange pour y développer l'usine à froid qui fabrique des aciers à forte valeur ajoutée avec un marché automobile de proximité très porteur – le groupe détient toujours 46% de parts de marché pour les pièces automobiles. Tout l'enjeu est de veiller à ce que ce plan d'investissements soit bien réalisé. Dans le même temps, à Liège, dont le site semblait mieux préservé à l'automne dernier, M. Mittal a décidé de fermer non seulement les hauts fourneaux, mais aussi six chaînes de galvanisation à froid. Alors que le secteur de l'acier reste déprimé, s'il faut rester vigilant, l'évolution à Florange est plutôt favorable pour le site. Les 629 salariés auparavant employés aux hauts fourneaux – lesquels vont être mis sous cocon – seront pour moitié redéployés vers les activités préservées du site, pour une partie bénéficieront d'un départ anticipé ou seront redéployés autre part.
Pour ce qui est de la filière numérique, il est vrai que son comité stratégique partage avec celui des éco-industries la particularité de couvrir un spectre très large. Comment fédérer les acteurs dans un champ aussi large ? La question n'est pas encore pleinement résolue et on se demande toujours sur quoi focaliser ce comité. Il est envisagé de mettre l'accent sur les opérateurs équipementiers. Nous avons en effet en France de grands opérateurs et un équipementier qui souffre actuellement, sachant que par ailleurs d'autres structures ont été mises en place comme le Conseil national du numérique qui traite, lui, davantage des questions liées à l'internet. Notre secteur équipementier, autrefois très structuré et très fort, a beaucoup souffert de l'arrivée d'internet, ainsi que du fractionnement des marchés européens de télécommunications. Bien qu'ayant perdu en poids et en taille, il a toutefois su se reconfigurer. Nos équipementiers sont toujours performants, comme en attestent leurs acquisitions et la vitalité de leur recherche dans le monde de l'internet.
L'arrivée de la quatrième génération de téléphonie mobile va redonner un élan au secteur et permettre d'y créer de nouveau de la valeur, puisque de nouvelles offres à plus forte valeur ajoutée pourront être proposées. Toute la question est de savoir comment se partagera cette valeur entre les opérateurs, les industriels et les consommateurs. C'est là une question de régulation…