Intervention de Antoine Herth

Réunion du 17 avril 2013 à 10h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAntoine Herth, rapporteur :

Le rapport que nous vous présentons aujourd'hui est l'aboutissement du premier travail de la législature sur la politique agricole qui soit commun à la Commission des affaires économiques et à la Commission des affaires européennes. Cette première incursion dans le sujet était l'occasion d'écouter et de comprendre les positions respectives de chacun. À ce titre, je remercie Mme Auroi d'avoir accepté que nous prolongions notre séjour à Berlin pour rencontrer les membres de la Commission agricole du Bundestag. Nous avons ainsi pu constater la différence d'approche entre la France et l'Allemagne.

Je souhaiterais également remercier la mission pour l'écoute attentive d'un certain nombre de remarques que j'ai portées, notamment sur le rôle macroéconomique de l'agriculture dans l'équilibre économique général et sur la nécessité de mettre en place des outils de régulation et de stabilisation des prix à l'échelle mondiale.

Mais, contrairement à ce qui s'est produit au sein de la Commission des affaires européennes, où il semblerait qu'il s'agisse d'une tradition, je ne pense pas qu'il soit possible de parvenir à recueillir l'unanimité sur la proposition de résolution que nous examinons aujourd'hui. Notre rôle est différent de celui des affaires européennes : nous devons analyser les conséquences économiques d'une politique sur l'équilibre général de l'économie nationale, ce qui explique les divergences d'opinion entre nous.

Si le dernier considérant souligne l'enjeu macroéconomique de la politique agricole, cela n'a pas été le fil conducteur du rapport, qui s'est concentré sur la question de la répartition des aides versées aux agriculteurs. Sur plusieurs points, il me semble que l'essentiel n'est pas traité.

Premier exemple, à la page 24, il est fait référence à l'un des volets de la PAC : « soutenir l'emploi agricole ». Mais qu'en est-il des emplois dans l'agroalimentaire ? La discussion passe ainsi à côté de 400 000 emplois.

Deuxième exemple, le rapport dresse le constat de l'inégale répartition des aides. Que les montants financiers transférés aux agriculteurs soient inégalement répartis, personne ne peut le contester. Mais encore faut-il que le postulat de base soit solide : or, nulle part n'est traitée la question de la nature des transferts financiers à destination des agriculteurs. Sont-ce véritablement des aides ? Certains considèrent que ce sont en réalité des revenus, qui visent à rémunérer une contribution économique des agriculteurs, les aménités positives de l'activité agricole. À partir de là, se poser la question de l'inégale répartition des « aides » a-t-il encore un sens ? Quand on parle de l'indemnité compensatrice de handicaps naturels (ICHN), là il n'y a aucune ambiguïté, il s'agit bien d'une aide. Au total, ce constat de l'inégale répartition des aides est, selon moi, peu éclairant.

Troisième exemple, il n'est pas fait mention du fait que, dans la très grande majorité des cas, les aides ne sont pas un revenu pour l'agriculteur, mais une composante du résultat d'exploitation d'une société, ce qui est fondamentalement différent. En face des aides, dans le bilan de ces sociétés, il y a une rémunération du capital, des charges, etc.

Le rapport n'a pas approfondi la question essentielle : à quoi servent les aides PAC ? Si l'on part du postulat selon lequel c'est un complément de revenu pour l'agriculteur, effectivement le constat de leur inégale répartition a un sens. Mais encore faudrait-il que ce postulat soit juste.

Quatrième exemple, à la page 39 du rapport, il est dit que « l'ensemble des personnes auditionnées par vos rapporteurs considèrent que le système des références historiques a vécu et que l'on doit s'orienter vers un rééquilibrage des niveaux d'aides entre régions ». Soyons clair : dans un format d'audition avec des intervenants de cinq organisations différentes disposant d'un temps de parole maximum de cinq minutes, je ne crois pas qu'il soit possible de dire que nous ayons véritablement entendu le point de vue de tout le monde. Il aurait fallu mener un entretien en tête à tête avec chaque personne auditionnée, pendant un minimum de trois-quarts d'heures à une heure. Il ne s'agit pas de critiquer le fonctionnement de la mission : nous avions des contraintes de calendrier qui nous imposaient de travailler ainsi. Mais peut-être sommes-nous passés à côté d'avis importants de la part d'acteurs centraux, qui ne manqueront pas alors de déplacer le débat hors de l'Assemblée nationale, ce qui n'est jamais bon pour la démocratie.

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