Intervention de Philippe Le Ray

Réunion du 17 avril 2013 à 10h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Le Ray :

Je souhaiterais tout d'abord insisté sur le fait que les attentes qu'expriment aujourd'hui nos concitoyens en matière de redistribution des aides en faveur des agriculteurs sont tout à fait légitimes. Mais, il ne faut oublier que cette profession nous a permis de relever des défis majeurs, dont celui de nourrir la population et de gagner notre indépendance alimentaire tout en participant à une répartition équilibrée des activités sur le territoire qui bénéficie de la présence d'agriculteurs un peu partout. Force est cependant de constater que les agriculteurs sont aujourd'hui de moins en moins nombreux et que le revenu agricole global en France est en baisse.

On demande aujourd'hui aux agriculteurs de répondre à d'autres besoins ; la PAC développant de nouvelles orientations en matière non seulement de meilleure répartition des aides mais aussi de « verdissement », d'emploi, de lutte contre le changement climatique et d'aménagement des territoires. Mais, on pourrait attendre de cette politique qu'elle aille plus loin sur d'autres aspects comme la lutte contre la spéculation et les interventions concernant les incidents climatiques notamment. Vous avez évoqué la PAC d'après 2020 et l'affichage sur ce point est clair : on se dirige vers une politique sociale et, sans doute, plus environnementale. Tout cela est très bien mais il faut rappeler que, dans les années 90, le monde paysan et les politiques ont accepté la PAC pour permettre un alignement des prix sur les prix agricoles mondiaux. Cet alignement s'est traduit par une diminution de 30 % de leurs revenus que devaient compenser les aides prévues par cette politique.

Dans cet esprit, il faut le dire clairement, la PAC comprend une composante « revenus » forte. Dans un premier temps, cette politique a assuré un équilibre entre les revenus des agriculteurs des différentes régions. Mais, elle a ensuite fait l'objet d'une dérégulation progressive dont on mesure aujourd'hui les dégâts. Que doit-on attendre aujourd'hui de cette politique ? Je pense qu'avant d'évoquer des compensations de prix et diverses aides, il est indispensable de mettre l'accent sur des mécanismes de réactivité en cas de crise, ce qui n'est clairement pas le cas aujourd'hui comme l'illustre l'insuffisance des revenus des éleveurs. Si rien n'est fait pour soutenir ces revenus, nous courrons clairement le risque de ne plus avoir d'éleveurs dans notre pays, d'ici quelques années. En ce qui concerne le projet de résolution, il me semble tout d'abord qu'il ne faut pas tomber dans l'excès en matière de « verdissement » des aides. On voit en effet déjà poindre certaines dérives, en particulier une déclinaison optionnelle au niveau national qui risque de conduire progressivement à une régionalisation des aides, à une perte de maîtrise de leurs critères d'attribution et in fine à une iniquité entre les agriculteurs.

Un autre enjeu réside dans le fait que le verdissement ne va pas permettre d'aider les éleveurs. Cette idée est fausse. En effet, les éleveurs sont aujourd'hui confrontés au problème des coûts de l'alimentation et la PAC doit s'orienter vers un soutien au niveau de ces coûts de production. Un point positif est, en revanche, le recouplage des aides qui devrait contribuer à soutenir nos éleveurs. Enfin, l'aide bonifiée aux cinquante premiers hectares peut s'avérer vertueuse si la transparence, notamment fiscale, prévaut entre les exploitations, y compris celles relevant du régime sociétaire. En revanche, il y a un vrai point de divergence sur l'extension de cette mesure aux exploitations de 20 hectares car cela ne concerne que peu de structures et il est nécessaire de ne pas tomber dans la logique d'une agriculture « occupationnelle ».

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