Intervention de Christian Eckert

Réunion du 17 avril 2013 à 16h15
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristian Eckert, rapporteur général :

Je voudrais confirmer – s'il en était besoin – que les documents que j'ai demandés en votre nom, mes chers collègues, m'ont tous été communiqués en temps et en heure. L'un d'eux m'est même parvenu au moment même où je signais la lettre pour le demander, puisque le ministère m'a transmis les documents demandés par mes collègues Philippe Marini, François Marc et Gilles Carrez.

L'administration fiscale a agi dans cette affaire, et certains se sont interrogés sur ce fait. Mais qu'auriez-vous dit si elle était restée sans réaction face à la publication d'articles de presse si précis et portant des accusations si graves contre le ministre du budget, chargé notamment de la lutte contre la fraude fiscale ? Il était impossible que l'administration fiscale, sous la conduite du ministre de l'économie, n'agisse pas au niveau tant national qu'international.

Je voudrais également confirmer les propos de M. le ministre sur la demande de déport de M. Cahuzac, en date du 10 décembre. Je possède ces documents, dont je ne pense d'ailleurs pas qu'ils soient couverts par le secret fiscal. Dès lors, c'est le ministre de l'économie lui-même qui est devenu destinataire de toutes les informations concernant Jérôme Cahuzac.

Je confirme encore ce qui a été dit de la demande faite le 14 décembre à Jérôme Cahuzac, dont j'ai copie.

Sur certains points, le président Carrez et son collègue Marini laissent entendre que le ministre et son administration n'auraient pas suffisamment agi. Je voudrais vous donner ma lecture des événements.

L'échange de renseignements entre la France et la Suisse est régi par deux documents. Le premier est l'avenant signé en 2009, et entré en vigueur en 2010, et notamment son article 10 qui stipule qu'il n'est pas « loisible aux États contractants “d'aller à la pêche aux renseignements” ou de demander des renseignements dont il est peu probable qu'ils soient pertinents pour élucider les affaires fiscales d'un contribuable déterminé. » Cet avenant précise également que la demande de l'État requérant comporte « dans la mesure où ils sont connus, les nom et adresse de toute personne dont il y a lieu de penser qu'elle est en possession des renseignements demandés. » Comment notre administration aurait-elle pu ne pas citer, dans sa demande, le fait que le compte présumé était ouvert à l'UBS ?

Les règles de l'échange de renseignements entre les administrations française et suisse sont également précisées par deux lettres en date du 11 février 2010. On y lit que « les demandes de renseignements seront formulées par l'autorité compétente de l'État requérant dans le respect de cette norme internationale qui, tout en assurant un échange de renseignements le plus large possible, prohibe la “pêche aux renseignements”, notamment les demandes afférentes à des catégories de contribuables non identifiés. […] Dans tous les cas où l'État requérant, dans le cadre d'une demande d'échange de renseignements de nature bancaire, aura connaissance du nom de l'établissement bancaire tenant le compte du contribuable concerné, il communiquera cette information à l'État requis. »

À mon sens, ces textes conduisaient très légitimement l'administration fiscale à rédiger sa demande comme elle l'a fait.

Fallait-il poser des questions sur la banque Reyl ? Les articles de Mediapart en date du 11 décembre ne mentionnent M. Reyl que comme demi-frère de M. Dreyfus, identifié comme l'interlocuteur de M. Cahuzac sur le fameux enregistrement. Jamais il n'est suggéré que la société financière Reyl & Cie – qui n'était donc pas une banque à l'époque – pourrait avoir un compte ouvert au nom de M. Cahuzac.

Ce que je regrette, monsieur le président, c'est que votre collègue – qui a été plus virulent que vous – ait à plusieurs reprises déclaré que la réponse de l'administration suisse laissait des doutes. M. Marini a pourtant reçu les mêmes documents que nous : la réponse suisse ne laissait aucun doute ! Sur la période postérieure à 2010, c'est-à-dire sur la période couverte par la convention, elle précise qu'il n'y avait pas de compte ouvert à l'UBS au nom de M. Cahuzac, ou de compte dont celui-ci aurait été l'ayant droit. Sur la période courant de 2006 à 2009, les Suisses n'avaient pas à répondre, mais l'ont quand même fait sur l'insistance de M. le ministre : il n'y avait pas non plus de compte à l'UBS pour cette période. Je déplore donc très vivement, monsieur le président, que vous-même et surtout votre collègue ayez laissé entendre que cette réponse laissait des zones d'ombre. C'est faux.

Il est désormais clair également que la France ne pouvait absolument pas demander de renseignements sur la période antérieure à 2006, en raison de la prescription fiscale.

Il y a eu ensuite l'épisode de Valeurs actuelles. Je regrette là encore, monsieur le président, que vous ayez accordé tellement de foi à cet article, dont le contenu aurait pu faire germer quelques doutes : comment imaginer qu'une escouade d'inspecteurs de Bercy ait pu se rendre en Suisse, en secret, et y rencontrer l'administration suisse pour mener une enquête parallèle ? Je regrette donc la mise en scène de votre déplacement à Bercy, monsieur le président, et ce d'autant plus que je n'en ai été informé que plusieurs heures après la presse.

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