Intervention de Patrick Bloche

Réunion du 17 avril 2013 à 11h15
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Bloche, président :

Vos interventions, comme cela a toujours été le cas dans notre Assemblée – quelles qu'aient été les majorités – lorsque nous avons évoqué la question de l'exception culturelle, visent toutes à promouvoir ou défendre cette dernière, laquelle est indispensable pour assurer la diversité des exceptions culturelles et, donc, le financement de toutes les créations artistiques, en particulier de celles dont nous savons qu'elles n'auraient sans cela aucune chance de diffusion, soumises qu'elles seraient à la seule logique commerciale.

M. Michel Piron a eu raison de souligner combien nous souhaiterions que le caractère universel de l'exception culturelle soit affirmé.

Les quatre représentants des groupes ont rappelé combien l'action de l'Assemblée nationale est primordiale et il est vrai qu'une proposition de résolution portée par une assemblée parlementaire peut avoir un écho conséquent, en particulier auprès de certains pays de l'Union européenne dans lesquels le poids du Parlement est institutionnellement plus important qu'en France.

Le calendrier, enfin, est parfaitement opportun car si nous travaillons dans l'urgence, nous n'en sommes pas moins efficaces puisqu'un conseil informel de déroulera dans la soirée et demain. Après le vote unanime de la Commission des affaires européennes, celui de notre Commission, affirmant la position de l'Assemblée nationale française, constituera un élément important de cette réunion en attendant le conseil des ministres de la culture et de la communication du mois de mai et le Conseil du 14 juin.

« Et après ? », m'avez-vous demandé. D'un point de vue stratégique, une fois cette proposition de résolution votée, notre pays devra gagner à sa cause d'autres États membres de l'Union européenne afin d'être majoritaire ou, à défaut, de parvenir à une minorité de blocage ou d'user du droit de veto. Vous le savez, nous sommes seuls, jusqu'ici, à vouloir exclure les secteurs culturels et audiovisuels des négociations entre les États-Unis et l'Union européenne.

Les enjeux sont réels, et pas seulement en France. La question du prix unique du livre, M. François de Mazières l'a dit, est évidemment essentielle, – de même, s'agissant du cinéma, que le dispositif vertueux permettant le financement du compte de soutien par les télévisions via trois taxes. Il en est ainsi également de la chronologie des médias ou du financement de la création et de la production audiovisuelles, France Télévisions y consacrant par exemple chaque année 420 millions d'euros. Je pourrais en dire autant s'agissant de la musique enregistrée ou du spectacle vivant.

Toute cette architecture entraîne parfois, au mieux, une incompréhension – M. Rudy Salles a fait état de sa rencontre avec les représentants de la DG de la concurrence à Bruxelles – ou, le plus souvent, une condamnation. Nous sommes en effet très mal vus alors que nous concevons la réglementation comme un moyen de protection de la diversité culturelle.

La Commission européenne instruit ainsi plusieurs contentieux tant en ce qui concerne la gestion collective que la rémunération pour copie privée ou le financement de l'audiovisuel public par une taxe sollicitée auprès des nouveaux acteurs du secteur numérique et, notamment, les fournisseurs d'accès à internet. Il n'est en l'occurrence pas certain que nous parvenions à faire partager nos convictions.

Comme l'a dit Mme Isabelle Attard, nous attendons les conclusions du rapport de la mission présidée par M. Pierre Lescure. Nous ne nous situons évidemment pas dans une perspective passéiste visant à protéger nos frontières nationales – les oeuvres de l'esprit ne connaissent heureusement pas les frontières – mais nous voulons tenir compte de la nouvelle donne numérique en affirmant la neutralité du support car c'est le contenu en tant que tel qui importe.

Je vous remercie chaleureusement de vos propos déterminants, parfois poétiques, illustrant ainsi d'une très jolie façon la nécessité de l'exception culturelle. Ils ne donneront que plus de force au travail que nous portons collectivement.

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