Intervention de Pascal Canfin

Séance en hémicycle du 22 avril 2013 à 17h00
Déclaration du gouvernement sur l'autorisation de la prolongation de l'intervention des forces françaises au mali débat et vote sur cette déclaration

Pascal Canfin, ministre délégué chargé du développement :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, comme l'a fait Laurent Fabius, je veux rappeler le triptyque qui structure notre action : le militaire, le politique et le développement. Pour ma part, je développerai davantage les modalités et les objectifs de notre politique de développement au Mali.

La première modalité concerne bien évidemment notre aide bilatérale. Nous avons annoncé la reprise de cette aide de 150 millions d'euros qui avait été gelée par le précédent gouvernement dans des conditions parfaitement légitimes dans le cadre européen. Cette somme permettra de financer des projets qui avaient été stoppés du fait de l'arrêt du financement. Je pense notamment à une station de pompage à Bamako qui permettra à 100 000 habitants d'avoir accès à l'eau potable dans les prochains mois.

D'autres exemples concrets reposent sur des réalités qui ont changé. Par exemple, il faut rétablir l'eau et l'électricité à Tombouctou. C'est aussi l'une des conditions de la sécurité puisque quand il fait nuit noire, il est plus facile de déstabiliser une ville. Il y avait zéro minute d'électricité à Tombouctou il y a quelques mois, contre six heures par jour maintenant grâce à notre aide publique au développement et à nos actions par le biais soit d'organisations non gouvernementales soit des Nations unies.

Le deuxième pilier, ce sont les collectivités locales. Nous avons organisé à Lyon, le 19 mars, une réunion à laquelle participaient plus de 100 collectivités locales. Au Mali, une ville sur six a un partenariat, une coopération avec une collectivité locale française. C'est un canal essentiel pour faire circuler notre aide publique au développement de manière efficace. Les collectivités locales visent d'abord les services publics locaux, la santé, l'éducation, au bénéfice direct et immédiat des populations.

Le troisième pilier, c'est la diaspora. Le 10 avril dernier, à Montreuil, nous avons réuni plusieurs centaines de représentants des diasporas maliennes en France, en Belgique, mais aussi ailleurs en Europe, au Canada et en Côte d'Ivoire, afin de voir comment mieux mobiliser les diasporas au service du développement du Mali. Vous le savez sans doute, l'argent des diasporas, des 120 000 Maliens ou Franco-maliens qui vivent en France est, dans certaines régions, bien supérieur aux flux financiers de l'aide publique au développement. C'est donc un enjeu majeur en termes de développement économique local.

Le quatrième pilier, c'est bien évidemment l'Europe. Je tiens à saluer le fait que, la semaine dernière, nous avons réussi à nous mettre d'accord sur une aide budgétaire de 225 millions d'euros qui vient compléter les aides d'urgence. Nous en sommes déjà aujourd'hui à un paquet de 300 millions d'euros qui provient de l'Union européenne et qui sera affecté très rapidement pour le retour de l'État, le déploiement des services publics et, bien évidemment, le développement économique du Mali.

Le dernier pilier auquel plusieurs d'entre vous ont fait référence, c'est la conférence qui aura lieu le 15 mai prochain, à Bruxelles. Nous avons souhaité, avec Laurent Fabius, que cette conférence ait lieu là-bas, pour bien montrer l'engagement de l'Union européenne sur la politique de développement. Cette conférence sera coprésidée par la France et par l'Union européenne, par François Hollande et José Manuel Barroso. Nous mobilisons aujourd'hui l'ensemble de la communauté internationale pour avoir le maximum d'ambition possible le 15 mai à Bruxelles.

J'étais, la semaine dernière, à New York, pour travailler sur la mobilisation de la Banque mondiale. Je serai, ce week-end, à Bamako, pour préparer cette conférence avec la société civile malienne, de façon que le plan de développement qui sera proposé et sur lequel nous nous mettrons d'accord le 15 mai recueille le consensus le plus large dans la société malienne, qu'il ne s'agisse pas uniquement d'un exercice technocratique ou bureaucratique mais bien d'un plan d'accord politique. L'objectif de cette conférence, c'est de se mettre d'accord sur le financement des deux prochaines années s'agissant des demandes des Maliens en matière de développement économique et de services publics, de lutte contre l'extrême pauvreté, d'agriculture, d'éducation, et de santé.

L'enjeu à Bruxelles est déterminant puisque nous pouvons réussir, grâce à cette conférence, la mobilisation de la communauté internationale en faveur du Mali pour les deux prochaines années.

Au-delà des aspects quantitatifs, il y a aussi les aspects qualitatifs. Il faut le reconnaître, nous n'avons pas toujours réussi, par le passé, à faire que cette aide publique au développement lorsqu'elle était quantitativement suffisante soit qualitativement pertinente. En matière d'agriculture et de lutte contre les effets du changement climatique, nous pouvons progresser s'agissant de la qualité de notre aide publique, et c'est ce que nous avons d'ores et déjà commencé à faire au niveau bilatéral.

Il faut veiller également à ce que cette aide aille bien aux populations locales. Il ne faut pas se cacher derrière son petit doigt, dans le passé toute l'aide internationale n'est pas forcément allée à ces populations ; il a pu y avoir des pertes en ligne parfois importantes. Il est de notre responsabilité, au-delà de la mobilisation de la communauté internationale, de faire en sorte que cette aide soit bien affectée aux populations. C'est pourquoi nous adopterons – nous sommes en train d'y travailler, nous l'annoncerons mi-mai – des solutions innovantes pour s'assurer de la traçabilité et du contrôle de l'aide publique. Nous le devons aux citoyens maliens, pour qu'ils voient le bénéfice de cette aide, mais aussi aux contribuables français parce que dans les temps de contraintes budgétaires que nous connaissons tous, il faut montrer en permanence l'efficacité, l'utilité, la légitimité de cette aide publique.

Je conclurai sur une équation qui a déjà été évoquée par certains et derrière laquelle nous pouvons tous nous retrouver : pas de développement sans sécurité, pas de sécurité sans développement. (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste, SRC et RRDP.)

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