Intervention de Bernard Cazeneuve

Séance en hémicycle du 23 avril 2013 à 15h00
Déclaration du gouvernement en application de l'article 50-1 de la constitution sur le programme de stabilité de la france pour 2013-2017 débat et vote sur cette déclaration

Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget :

Dès lors que ces impôts ont déjà été intégrés dans le budget de 2013 et que les dispositions que nous allons prendre ont vocation à les pérenniser, vous ne pouvez pas considérer qu'il s'agit d'une augmentation de la pression fiscale. Vous ne pouvez pas non plus considérer que les 6 milliards d'augmentation de la TVA déjà votés et nécessaires au financement du CICE, donc déjà intégrés, correspondent à une augmentation de la pression fiscale en 2014.

En revanche, il y a, c'est vrai, une augmentation de 0,3 % de la pression fiscale en 2014, ce qui correspond aux 6 milliards d'euros dont je viens de parler. Mais ces 6 milliards sont documentés, et je vais vous expliquer la manière dont nous allons procéder pour les prélever. Tout d'abord, 1 milliard d'euros correspond à des mesures déjà décidées dans le cadre de la négociation entre les partenaires sociaux, au titre de l'augmentation des cotisations de retraite complémentaire AGIRC et ARRCO. De plus, certains prélèvements prévus en 2013 n'ont pas pu être effectués pour des raisons qui tiennent au fait que le Conseil constitutionnel a annulé des dispositions telles que, notamment, la taxe de 75 %. Nous pérenniserons donc, en 2014, des recettes que nous devions percevoir en 2013 et qui ne l'ont pas été pour les raisons que je viens d'indiquer.

Par ailleurs, nous avons l'intention d'agir sur deux plans qui font consensus dans cet hémicycle, ce dont je me réjouis. Le premier, c'est celui de la lutte contre la fraude fiscale. Je rappelle qu'en 2012, au titre de la lutte contre la fraude fiscale, nous avons enregistré 18 milliards d'euros de recettes, soit 2 milliards de plus qu'en 2011. Nous avons par conséquent l'intention d'intensifier cette lutte contre la fraude fiscale en 2014 pour atteindre, nous l'espérons, entre 2 et 2,5 milliards d'euros de recettes supplémentaires. Qui peut ici ne pas se réjouir de l'effort que nous faisons pour lutter sans concession, de manière drastique et massive, contre la fraude fiscale, ce qui aura, bien entendu, un effet sur nos recettes et, par conséquent, sur l'augmentation de la pression fiscale ?

Nous avons, deuxièmement, indiqué une orientation : celle de la lutte contre les niches fiscales et sociales, qui doit permettre également d'augmenter nos recettes. Cela fait partie de ces 6 milliards, qui ne proviennent donc pas d'impôts nouveaux. Je ne sais donc pas d'où viennent les 20 milliards dont vous nous parlez, et que vous trouverez exclusivement dans votre imagination. Voilà pour ce qui concerne la politique fiscale et la manière dont nous avons l'intention d'agir en 2014.

Le troisième sujet que j'aborderai, après les économies et les impôts, est celui du rétablissement de nos comptes. Je rappelle que les déficits nominaux comme les déficits structurels ont diminué en 2012 et qu'ils continueront à baisser en 2013. Nous souhaitons qu'ils poursuivent leur décrue en 2014. Quels sont les chiffres ?

Pour la première fois depuis de nombreuses années, le déficit structurel en 2012 a été réduit de 1,2 point de PIB. Je rappelle qu'il s'était accru considérablement entre 2007 et 2012 : de 1,9 point. Il y avait donc une dégradation tant du déficit structurel que du déficit nominal.

Notre objectif, c'est une diminution du déficit structurel de 1,8 point en 2013 et d'un point en 2014. Nous pourrons regarder lors des séances à venir l'adéquation qui existe entre les objectifs que nous nous sommes assignés et les résultats que nous avons obtenus. Ce que nous pouvons en tout cas dire aujourd'hui, c'est que les déficits diminuent alors qu'ils ont sensiblement augmenté au cours des dernières années.

Le ministre de l'économie et des finances a insisté sur la nécessité de diminuer la dette. Notre objectif, c'était 89,9 % du PIB à la fin de l'année 2012. Nous sommes à un peu plus de 90 % car, en raison des événements exceptionnels que j'évoquais tout à l'heure, nous n'avons pas atteint le niveau de déficit que nous escomptions, mais notre objectif est bien, à travers l'effort d'ajustement structurel dont nous venons de parler, de faire en sorte que la dette diminue, de la même manière que nous souhaitons que l'augmentation de la pression fiscale cette année soit suivie dans les années qui viennent, au-delà de 2014, d'un effort de diminution lui permettant de revenir en 2017 exactement à son niveau de 2013.

Enfin, je voudrais dire, pour conclure, quelques mots sur la croissance. Le ministre de l'économie et des finances a précisé tout à l'heure que les mesures que nous prenions pour réduire les déficits n'avaient pas vocation à obérer la croissance.

J'ai lu, au cours des derniers jours, certaines déclarations ou propositions qui laissaient à penser qu'il y avait une antinomie entre l'effort d'ajustement structurel auquel nous procédons, l'effort de redressement des finances publiques dans lequel nous sommes engagés, et la capacité du Gouvernement à faire des investissements stratégiques relevant des politiques publiques sur lesquelles nous sommes le plus attendus.

La stratégie d'investissement de l'État et de ce Gouvernement n'a jamais été aussi offensive qu'au cours de ces derniers mois.

Faut-il rappeler que nous avons engagé un plan de numérisation de notre pays, à hauteur de 20 milliards d'euros, qui doit se déployer pendant dix ans ?

Faut-il rappeler que nous avons engagé une stratégie extrêmement volontariste en faveur du développement du logement social et des travaux destinés à améliorer le bilan thermique de nos bâtiments d'habitat collectif ? Le Président de la République a indiqué lors de son déplacement récent en région parisienne que nous allions diminuer le taux de la TVA sur les travaux lourds dans le logement social, de manière à dynamiser l'industrie du bâtiment.

Faut-il rappeler que nous sommes dans une stratégie d'investissement extrêmement volontariste, portée par le Commissariat général à l'investissement et le Programme d'investissements d'avenir ?

Faut-il également rappeler qu'à travers les travaux conduits par la commission « Mobilité 21 » nous essayons de définir dans le domaine des transports une stratégie et un calendrier d'engagement qui mobiliseront, dans les années à venir, de gros investissements ?

Faut-il rappeler que le plan de 120 milliards d'euros décidé par l'Union européenne a une déclinaison française précise, 2,5 milliards d'euros de fonds structurels étant mobilisés dans les régions pour accompagner le développement du numérique, le développement des transports de demain et la transition énergétique ?

Faut-il rappeler que les fonds de la Banque européenne d'investissement, grâce à une augmentation de son capital de 10 milliards d'euros, doivent permettre à la France de récupérer à peu près 7 milliards d'euros de prêts et que, sur les 4 milliards d'euros de project bonds, nous attendons pour l'année 2013-2014 quelque 650 millions d'euros destinés à financer des opérations structurantes ?

Ce sont donc 11 à 12 milliards d'euros qui seront mobilisés au titre du plan de 120 milliards d'euros dans les deux années qui viennent, soit environ le tiers de l'effort d'ajustement demandé aux Français lors de l'élaboration du budget de 2013.

Tels sont les quelques éléments que je voulais vous donner, à la fois sur la stratégie d'ajustement budgétaire et sur sa compatibilité avec la croissance et l'investissement. Nous aurons l'occasion, à l'occasion de l'élaboration du projet de loi de finances pour 2014, d'approfondir toutes ces données ensemble de manière à consolider un certain nombre de réflexions que nous conduisons de concert. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.)

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