Intervention de Élisabeth Guigou

Séance en hémicycle du 23 avril 2013 à 15h00
Déclaration du gouvernement en application de l'article 50-1 de la constitution sur le programme de stabilité de la france pour 2013-2017 débat et vote sur cette déclaration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉlisabeth Guigou, présidente de la commission des affaires étrangères :

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le programme de stabilité 2013-2017 est destiné à restaurer pleinement la souveraineté budgétaire, économique et sociale de notre pays, fortement dégradée ces dernières années par l'aggravation du déficit, par l'aggravation spectaculaire de la dette – 600 milliards d'euros en cinq ans – et par l'aggravation du chômage qui a augmenté d'un million de personnes entre 2007 et 2012. Ce programme vise aussi à remédier aux déséquilibres structurels de notre économie.

Cet objectif n'est pas imposé par l'Europe. C'est nous-mêmes qui nous l'imposons, comme François Hollande l'a souligné pendant la campagne présidentielle et comme le Premier ministre s'y est engagé dans son discours de politique générale.

Ce programme nous permettra de retrouver des marges de manoeuvre pour mettre en oeuvre nos choix de réindustrialisation et de justice sociale. Il nous permettra également de peser davantage dans le débat européen pour réorienter l'Europe. Il est essentiel que notre Parlement soit totalement associé aux choix nationaux et aux objectifs que nous présentons à nos partenaires européens. En effet, notre programme à moyen terme s'inscrit dans un contexte européen sur lequel il nous faut peser : si la zone euro est partiellement stabilisée, la situation économique et sociale s'est beaucoup dégradée dans l'Union européenne.

Je tiens à apporter mon soutien total au Gouvernement concernant la ligne qu'il a tracée, car elle satisfait à mes yeux deux impératifs : d'une part, réduire notre déficit budgétaire structurel ; d'autre part, conduire des réformes ambitieuses sans étouffer la croissance.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance que nous avons ratifié nous invite à un changement de méthode en nous conduisant à raisonner principalement en termes de réduction du déficit structurel. Bien sûr, la réduction du déficit nominal reste un objectif, mais celui-ci doit être apprécié en fonction de la conjoncture : il doit permettre un équilibre entre la consolidation budgétaire et le soutien de la croissance. C'est ce que fait le Gouvernement lorsqu'il ajuste le déficit public à 3,7 %, repoussant à 2014 l'objectif des 3 %.

L'effort de réduction du déficit structurel réalisé est d'ailleurs sans précédent, et les résultats sont là : notre déficit structurel diminuera de 1,9 % du PIB en 2013. Nous restaurons ainsi la crédibilité de notre pays, indispensable pour peser sur l'avenir de l'Union européenne.

Par ailleurs, le programme national de réforme témoigne de l'effort de redressement de notre pays grâce aux réformes ambitieuses qui sont engagées : le retour de la compétitivité avec le pacte de compétitivité, la lutte contre les licenciements systématiques grâce à l'accord sur l'emploi, et la bataille contre la désindustrialisation avec la création de la Banque publique d'investissement. Il me paraît indispensable que ces réformes soient davantage connues et fassent l'objet de toute la promotion qu'elles méritent auprès de nos concitoyens, bien sûr, mais aussi de la Commission européenne et, surtout, de certains de nos partenaires européens.

Le retour de la croissance est indispensable pour restaurer une Europe forte. Nous devons poursuivre le renforcement de l'union économique et monétaire. Cela implique de consolider le pilier monétaire avec l'union bancaire, et de mieux coordonner les politiques économiques en faveur de la croissance : en d'autres termes, il faut que les pays en excédent soient solidaires des pays en déficit. Mais cela impose aussi, j'en suis persuadée, de conduire une action résolue d'harmonisation pour proscrire le dumping fiscal et social, qui est une concurrence déloyale inadmissible entre États membres d'une même union.

L'évasion et la fraude fiscales ne sont plus supportables : lorsque l'impôt n'est pas payé par tous, des charges plus lourdes pèsent sur ceux qui ne fraudent pas. Le Gouvernement a déjà engagé une action résolue dans la lutte contre la fraude à la TVA, dans la lutte contre le dumping fiscal à l'intérieur de l'Union et, plus récemment, sur l'échange automatique d'informations entre États membres de l'Union européenne pour que le secret bancaire ne puisse plus être opposé aux administrations fiscales et aux magistrats. Je suis heureuse d'entendre le ministre de l'économie et des finances affirmer que le climat est en train de changer au sein du G20 et des institutions européennes et internationales sur ce sujet.

En 2012, le Président de la République a obtenu des fonds supplémentaires pour le financement de la croissance en Europe. Monsieur le ministre chargé du budget, il serait bon que le Gouvernement présente une liste de projets concrets qui seront financés grâce à ces crédits supplémentaires. Ce serait une excellente chose !

La réorientation de l'Europe doit être guidée par la justice sociale. Dans ce domaine, l'Europe doit se donner les moyens d'atteindre quelques objectifs clés : lutter contre le chômage de masse en Europe, en particulier des jeunes, développer un salaire minimum dans chaque État de l'Union européenne proportionné au degré de développement de celui-ci, et combattre les abus, les dérives, voire les fraudes auxquels donne lieu la rémunération des travailleurs détachés, qui constitue une concurrence inadmissible sur les bas salaires, particulièrement dans les secteurs agricoles et les métiers du bâtiment.

Au-delà de la trajectoire des finances publiques proposée par le Gouvernement et que la majorité va approuver aujourd'hui, ces questions devraient désormais être placées au coeur de notre politique européenne. Elles demanderont un décloisonnement des approches et un débat beaucoup plus large au sein de notre assemblée et avec le Parlement européen. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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