Intervention de Danielle Auroi

Séance en hémicycle du 23 avril 2013 à 15h00
Déclaration du gouvernement en application de l'article 50-1 de la constitution sur le programme de stabilité de la france pour 2013-2017 débat et vote sur cette déclaration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanielle Auroi, présidente de la commission des affaires européennes :

Monsieur le président, messieurs les ministres, madame la présidente de la commission des affaires étrangères, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, au moment où toute l'Europe s'interroge sur le tout austérité, je voudrais à mon tour rappeler la nécessité de ne pas sacrifier la solidarité sur l'autel du sérieux budgétaire.

L'évolution inquiétante du chômage en Angleterre, qui applique scrupuleusement ce type de recommandations, témoigne des limites et des écueils de la politique de rigueur. Le FMI en dénonce les effets dévastateurs. M. Barroso, lui-même, vient de reconnaître que cette politique d'austérité a atteint ses limites. M. Olli Rehn plutôt que d'écouter ses sirènes habituelles devrait s'en inspirer.

Même s'il faut contenir les déficits, ne négligeons pas les investissements pour l'adaptation au changement climatique, le développement des énergies renouvelables, l'innovation, les services publics.

Les crises écologique, sociale, économique et financière, auxquelles nous devons faire face aujourd'hui appellent des réponses ne devant pas hypothéquer l'avenir. C'est ainsi que nous redonnerons du sens à la construction européenne, qui en a bien besoin. D'ailleurs, le Conseil européen de mars 2013, dans le cadre du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance, a rappelé la nécessité de trouver un équilibre entre les besoins en investissements d'avenir et les objectifs de discipline budgétaire. Il doit encore préciser ce que cela sous-tend.

En tout état de cause, nul ne peut faire l'économie d'une réflexion sur l'application, aujourd'hui uniforme, du critère des 3 %. Ce type de traitement ne peut en effet qu'inciter les pays sous tension budgétaire à réduire leur participation à la construction concrète d'un avenir commun.

Plusieurs options sont envisageables pour assouplir le rythme de réduction des déficits avec une meilleure prise en compte de la situation de chaque pays, voire même réviser leur calcul, par exemple en sortant les investissements d'avenir du critère des 3 %.

Il serait important également de dégager de nouvelles recettes, je pense bien sûr à une véritable fiscalité écologique. Les recommandations européennes adressées à la France l'an dernier, et reprises cette année, proposent d'ailleurs de transférer une part de la pression fiscale sur le travail vers des taxes environnementales.

Le Gouvernement a déjà fait part de son intention de mobiliser cette fiscalité écologique pour participer à hauteur de 3 milliards d'euros au financement du crédit d'impôt compétitivité et emploi.

La semaine dernière, le comité pour la fiscalité écologique a proposé de diminuer l'avantage fiscal dont bénéficient les carburants diesel, avec souplesse pour les ménages.

Pourriez-vous nous indiquer, messieurs les ministres, quelles sont les pistes privilégiées à ce stade pour que ces mesures positives pour nos recettes et la santé publique soient mises en oeuvre ?

Par ailleurs, le tableau de suivi des objectifs nationaux de la stratégie Europe 2020, présenté dans le programme national de réforme, montre que la France a accumulé du retard sur les énergies renouvelables. Or le Gouvernement s'est engagé à aller vers la transition énergétique et tout le monde semble découvrir aujourd'hui ses vertus. Les énergies renouvelables ne représentent que 13 % de la consommation d'énergie finale, alors qu'il reste seulement sept ans à la France pour atteindre l'objectif des 23 %. Mais cela ne semble pas intéresser nos amis de droite…

Quels moyens pensez-vous mettre en oeuvre pour respecter cet engagement ?

Enfin, préparer l'avenir, c'est aussi lutter contre le chômage, en particulier celui des jeunes, et c'est lutter contre la pauvreté. Ce sont aussi des objectifs prioritaires pour l'Union européenne. À cet égard, je me félicite que le Gouvernement lance la « garantie jeunes » dès septembre prochain. C'est en effet un signe important de la vocation, plus sociale, que nous voulons donner à l'Europe.

Dernier point, et non des moindres : il est indispensable de redonner un élan démocratique à ces débats budgétaires – mais cela non plus n'intéresse pas nos collègues de droite. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Dans le cadre du semestre européen de coordination des politiques économiques, les procédures de suivi budgétaire et macroéconomique se sont intensifiées.

Comme la Commission européenne va désormais formuler à l'automne un avis sur les projets de budget nationaux, nous pouvons ouvrir des espaces d'interpellation et de débat pour que notre Assemblée, comme les autres Parlements, soit pleinement associée à cette coordination des politiques économiques.

C'est pourquoi nous avons pris les devants en organisant, dès octobre dernier, un débat sur la prise en compte des orientations budgétaires européennes par le projet de loi de finances. Nous avons ainsi préfiguré la procédure à mettre en place à l'automne prochain.

C'est pourquoi nous avons été à l'origine, il y a un mois, d'une résolution sur les orientations européennes de politique économique.

C'est pourquoi nous allons organiser, en juin prochain, une réunion consacrée aux recommandations formulées par la Commission européenne sur les programmes de stabilité et de réforme.

C'est pourquoi nous avons voulu la Conférence budgétaire interparlementaire, inscrite dans le TSCG, et qui, me semble-t-il, progresse dans l'esprit de tous les Européens.

En cette année européenne de la citoyenneté, il est en effet essentiel que les citoyens se réapproprient les grands enjeux que recouvrent les débats budgétaires et économiques, étroitement liés aux choix politiques qui permettent de faire face aux difficultés d'aujourd'hui tout en préparant demain.

Ainsi, les engagements du Gouvernement pour peser dans la construction d'une Union plus sociale ne peuvent que résonner favorablement dans les têtes de nos concitoyens éprouvés par les difficultés.

Au moment où l'Espagne et le Portugal desserrent l'étau, le Gouvernement français s'est exprimé à plusieurs reprises pour rappeler son souci de résorber les déficits tout en mobilisant son énergie pour la relance et l'emploi. Je ne doute pas que la Commission européenne soit sensible à ses arguments. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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