Intervention de Paul Giacobbi

Séance en hémicycle du 23 avril 2013 à 15h00
Déclaration du gouvernement en application de l'article 50-1 de la constitution sur le programme de stabilité de la france pour 2013-2017 débat et vote sur cette déclaration — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Giacobbi :

Je le dis avec beaucoup de tristesse : voilà un débat qui n'est pas celui que l'on pouvait attendre.

Je siège ici depuis des années et je connais les qualités économiques, financières, budgétaires de nombre de ceux qui se sont exprimés. Je ne les ai pas reconnus ce soir : la passion des mots, la polémique remplaçaient le raisonnement économique et quelque chose qui, malgré tout, devrait tous nous rassembler.

Monsieur le ministre, j'ai évoqué la théorie économique. Malheureusement, elle a des applications redoutables. Si elle ne tue pas, elle fait beaucoup de mal. Pendant vingt ans, nous avons subi M. Greenspan et son âme damnée, M. Bernanke. Le bernankisme, c'est cette théorie selon laquelle il suffisait d'augmenter la masse monétaire et de baisser les taux d'intérêt pour que les questions soient réglées. C'est cette croyance, cette idée que la manipulation d'un paramètre permettait de faire aller les choses encore mieux qui est à l'origine de la crise et de la folie financière qui en a résulté. Certes, on est sorti de la crise de la bulle Internet de 2002, mais pour entrer dans une bulle encore plus grande. Et aujourd'hui, après 2007 et cinq ans d'augmentation des bulles d'une manière ou d'une autre, il y a tout de même de quoi s'inquiéter. Je vous ai montré tout à l'heure que, à l'évidence, le système bancaire revenait sur les chemins dont il avait été détourné par la crise.

Je remarque au passage que la moitié de la communauté économique dans le monde trouve la rigueur budgétaire totalement inepte, tandis que l'autre moitié, y compris les professeurs Rogoff et Reinhart, s'appuient sur des calculs absurdes, faux, et sur une idée qui confond la corrélation et la causalité, autrement dit une faute élémentaire.

Quant à l'expérimentation, bien évidemment, on l'observe. Mais la Grèce, l'Italie et l'Espagne, les pays touchés par la rigueur vont-ils mieux pour autant ? À l'évidence non. On a l'impression que le tissu s'effondre. On ne voit rien qui pourrait les sortir de la crise, hormis cette compétitivité nouvelle à laquelle j'ai fait allusion. Et à quel prix !

Par ailleurs, et vous avez raison, monsieur le ministre, il est évident qu'à long terme il est toujours mieux d'avoir une économie et des finances publiques saines que malsaines. Mais, comme le disait Keynes, ce grand économiste, à long terme nous serons tous morts, et à court terme c'est probablement catastrophique.

Cela dit, le Gouvernement n'a pas le choix : il fait très courageusement ce à quoi il ne croit qu'à moitié. Il le fait avec plus de rigueur et d'efficacité que ne l'ont fait ses prédécesseurs. M. Mariton à l'instant reprochait au ministre de se cramponner au déficit structurel. Mais j'en ai entendu parler à de multiples reprises par M. Woerth, un homme que par ailleurs je respecte et pour qui j'ai de l'amitié.

Voilà la situation d'aujourd'hui. Le Gouvernement essaie de desserrer l'étau européen. Pour le faire, il se doit d'être relativement exemplaire, ce qui n'est pas facile compte tenu de la complexité de la situation actuelle. Ce débat aurait dû nous rassembler en ce qui concerne un certain cadrage budgétaire. Les uns ne peuvent tout de même pas jeter la pierre aux autres, après ce qui s'est passé pendant un certain nombre d'années. Entendre ceux qui siègent à droite dans l'hémicycle parler des dérapages budgétaires me paraît tout de même exagéré alors que ceux qui siègent à gauche essaient de rattraper les choses…

En tout cas, notre groupe, dans sa très grande majorité, soutiendra le Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.)

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