Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous voilà réunis en ce 25 avril pour débattre d'un sujet grave – la fin de vie –, pratiquement huit ans, jour pour jour, après l'adoption de la loi du 22 avril 2005.
Si vous me permettez une boutade sur un sujet dont la gravité relève de l'évidence, je dirai qu'Éros est, forcément, plus sexy que Thanatos.
L'actualité avait placé sous les feux des projecteurs Chantal Sébire, Vincent Humbert et tant d'autres. En octobre 2009, un président de groupe parlementaire, alors député de Nantes, devenu depuis lors Premier ministre – c'est évidemment de Jean-Marc Ayrault que je parle – a déposé une proposition de loi, qui avait été examinée le mois suivant. Début 2011, le sénateur Jean-Pierre Godefroy avait déposé une proposition de loi sur le même sujet.
Les initiatives ont été nombreuses, dont il est important de retracer l'historique. Notre histoire est en effet jalonnée d'interventions et de propositions, la dernière en date étant évidemment la proposition n° 21 de François Hollande, alors candidat à la présidence de la République, qui était, nous dit-on, un engagement à part entière de son programme de campagne.
La fin de vie intéresse évidemment chacun d'entre nous. Nul ne peut y être indifférent puisque, par définition, nous serons tous concernés. Il importe donc de débattre sereinement, avec calme, tact et respect. Nul ne détient la solution, la bonne réponse absolue, au savant mélange d'aspects juridiques et éthiques, et faisant appel aux convictions et aux valeurs. Soyons à l'écoute des souffrances et des plaintes, ayons de l'empathie, soyons attentifs à l'autre, ne manquons pas d'humanité sur un tel sujet.
Ce débat appelle en effet une forme de modestie, d'apaisement.
Alors que le dossier du mariage homosexuel est encore chaud, qu'il a profondément divisé la société et continue de le faire, il me semblerait sage et prudent, de ne pas vouloir ouvrir un nouveau front, une nouvelle fracture sociétale – car il s'agit bien là d'une question de société, qui doit dépasser, mes chers collègues, les clivages politiques.
Parce que la fin de vie dans la dignité pose aussi la question de la dépendance, du rôle de la famille, bien sûr, et des équipes médicales, de la volonté personnelle ou non de ceux que nous aimons, il faut prendre le temps de la réflexion et agir avec prudence.
Une fois n'est pas coutume : je voudrais saluer la démarche du Président de la République qui, le 17 juillet dernier, a confié au professeur Sicard une mission dont les travaux ont abouti au mois de décembre à la remise d'un rapport. Je tiens à saluer également la saisine, enfin, du Comité consultatif national d'éthique sur un tel sujet, alors que d'autres ont été beaucoup plus dubitatifs. La réponse du Comité était attendue ces prochaines semaines, nous ne l'aurons finalement qu'à la fin du mois de juin. Le projet de loi qui devait être présenté prochainement sera donc reporté au second semestre. Il est néanmoins important de disposer de temps.
Permettez-moi de revenir brièvement sur le rapport Sicard. Je note l'attachement à la loi Leonetti de 2005, votée à l'unanimité – il faut le rappeler – à l'Assemblée nationale et dont la mission recommande à juste titre l'appropriation par tous. À cet égard, l'amélioration de la formation médicale et l'introduction d'un stage obligatoire en soins palliatifs durant l'internat et d'un enseignement sur l'obstination déraisonnable me semblent des mesures très intéressantes qui faciliteraient cette appropriation.
La loi Leonetti permet de prendre en compte l'ensemble des situations de fin de vie en proscrivant l'obstination déraisonnable. Elle autorise l'arrêt des traitements, même lorsqu'une telle interruption risque d'abréger la vie du patient, et prévoit également une sédation d'accompagnement encadrée. C'est une bonne loi – je le dis de nouveau devant son auteur – qui doit être appliquée avant qu'il soit envisagé de la modifier, ou alors retouchée dans le cadre des éclaircissements proposés par le rapporteur.
Il faut bien sûr renforcer les moyens des services de soins palliatifs, les créer dans les territoires qui en sont peu ou pas pourvus. Je n'ignore pas le coût d'une telle mesure, un coût qui peut paraître encore plus lourd en période de disette budgétaire, mais il s'agit là de choisir la société dans laquelle nous voulons vivre. L'équilibre de la société dépend aussi de la place que l'on accorde aux plus faibles. Voulons-nous une société solidaire, y compris à la fin de la vie, ou une société qui abandonne celui qui souffre ?
Je reste bien sûr fermement opposé au suicide assisté,…