Personnellement, je pense que la doctrine française est bonne et bien pensée. Elle a résisté au temps. Si l'on compare cette doctrine à celle des Américains, par exemple, cette dernière peut parfois présenter des évolutions importantes d'une NPR à l'autre. Avoir un concept de dissuasion qui traverse le temps – indépendamment des fluctuations temporelles – me semble largement préférable. Encore une fois, les armes nucléaires sont faites pour assurer la sécurité ultime de notre pays, ce qui est un grand invariant.
Je n'ai pas répondu à M. Folliot sur les conséquences d'un éventuel abandon de notre capacité de dissuasion en termes de technologies duales. Il est difficile de les évaluer à terme. On ne peut donc le faire qu'en s'intéressant au passé. Pour prendre l'exemple du domaine nucléaire, beaucoup d'installations de production du cycle civil « cousinent » avec des installations de défense. L'usine d'enrichissement Georges Besse I n'était rien d'autre que le pendant civil de celle de Pierrelatte. Il s'agissait en effet de la même technologie de diffuseurs de gaz. De même, la Hague est l'enfant de l'usine de retraitement des combustibles de la dissuasion de Marcoule. Sa capacité est plus grande, mais le procédé présente une grande similitude. Je pourrais aussi citer l'exemple de la fibre optique, qui a d'abord été mise au point pour les essais nucléaires. Enfin, la technologie silicium sur isolant, utilisée pour de très nombreuses puces semi-conductrices aujourd'hui, a été imaginée à Bruyères-le Châtel pour la dissuasion. Nous avons ensuite vendu les bibliothèques, qui sont aujourd'hui à la base de nombreux semi-conducteurs. Les retombées des investissements dans le domaine de la défense sont donc très nombreuses et ces investissements ont été à l'origine de très nombreux progrès technologiques.