La discussion de cette proposition de loi est un signal désastreux à trois égards.
Elle contribue d'abord à affaiblir l'autorité de l'État. Comment le ministre de l'Intérieur pourra-t-il, chaque semaine, lors des questions au Gouvernement, continuer de proclamer qu'il fera respecter la loi républicaine si la majorité vote une amnistie qui fait fi de cette même loi ?
Elle affaiblit aussi le Parlement : non seulement ce texte, bancal comme M. Patrick Devedjian l'a brillamment démontré, suscite des désaccords entre le Sénat et l'Assemblée nationale ainsi qu'au sein même de la majorité, mais, alors même que la commission des Lois ne s'est pas encore prononcée, le ministre des Relations avec le Parlement vient d'annoncer la position défavorable du Gouvernement. Il est humiliant pour le Parlement d'être ainsi ballotté pour être in fine désavoué.
Enfin, ce texte affaiblit les syndicats : alors que l'accord national interprofessionnel de janvier dernier, auquel l'Assemblée a donné force de loi, a ouvert la voie à un nouveau mode de concertation entre partenaires sociaux, il vient donner une prime à ceux qui préfèrent à la négociation le recours à la force. C'est un coup porté à tous ceux qui pourraient travailler à la paix sociale !
Il ne s'agit donc ni d'une loi d'équilibre, ni d'une loi de cohésion sociale, mais d'une loi de circonstance au profit de quelques-uns.