Je laisse à la rapporteure le soin de présenter une conclusion. En revanche, je tiens à répondre à certaines observations et questions qui viennent d'être formulées.
En ce qui concerne la notion de bassin d'emploi évoquée pour la mise en place de pôles spécialisés dans le traitement des procédures collectives, je tiens à dire que je vois mal comment de tels pôles pourraient être établis au milieu de nulle part. Ils doivent être installés dans des bassins d'emplois particulièrement importants, là où l'on peut percevoir toute la diversité du contentieux commercial, qu'il s'agisse de contentieux général ou de procédures collectives. Je prendrai volontiers pour exemple le bassin industrieux de Montbéliard. Ce territoire abrite les deux tiers des ressources et des richesses de Franche-Comté et pourrait tout à fait – je le dis sans arrières pensées – être le ressort d'un pôle spécialisé. Les pôles ne doivent pas nécessairement se trouver au siège d'une cour d'appel.
S'agissant de la faculté envisagée, en matière de contentieux général, de permettre de délocaliser une affaire sur la demande d'un justiciable présentée in limine litis, je persiste à craindre qu'une telle mesure favorise des manoeuvres dilatoires. On m'objecte que cette procédure serait enfermée dans un temps contraint. Nous sommes dans des matières où il faut aller vite et tout délai peut être préjudiciable. Le temps que l'on laisse passer peut permettre à un débiteur d'organiser bien des choses.
Pour ce qui est enfin de la possibilité donnée à un justiciable de demander à ce que son affaire soit jugée par une formation mixte, je rappelle une fois encore qu'il est un principe que l'on ne saurait fouler aux pieds : il s'agit du principe suivant lequel on ne choisit pas son juge. Nous nous sommes accordés sur l'importance d'une formation initiale et continue qui doit permettre aux juges consulaires et aux magistrats professionnels d'acquérir une maîtrise du droit dans les domaines les plus pointus. Dès lors, pourquoi vouloir adjoindre à un juge consulaire un magistrat professionnel alors que – de surcroît – nous n'avons pas les moyens de cette mesure ? Les autres réformes que nous avons précédemment évoquées se suffisent à elles-mêmes. J'ajoute que les justiciables peuvent toujours interjeter appel et qu'à ce stade de la procédure, ce sont des magistrats professionnels qui siègent.
J'ai connu à la fois une chambre commerciale – dissoute dans le cadre de la réforme engagée par Mme Rachida Dati –, des juridictions reposant sur le principe de l'échevinage, et des tribunaux de commerce dans leur organisation actuelle. Le taux d'infirmation des décisions rendues par ces derniers ne dépasse pas celui des décisions des chambres commerciales ou des formations de jugement échevinées. Il faut se garder de conceptions surannées pour privilégier l'efficacité, la cohérence et la modernité. C'est dans cet esprit que je souscris volontiers à la proposition de créer des pôles spécialisés formés de juges consulaires mais que je ne vois nullement l'utilité de recourir à des formations de jugement mixtes.