Nous avons installé un groupe de travail sur le financement des allocations de solidarité réunissant les départements et l'État ; on y réfléchit à des assiettes fiscales nouvelles. Parallèlement, nous préparons une projection concernant l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER), dont une part importante du produit revient aux régions. Cette réflexion et ces simulations n'étant pas achevées, le projet de loi n'intègre pas la réforme de la fiscalité locale, d'autant que certains préalables, comme la possibilité ou non d'un rapprochement entre impôt sur le revenu et CSG, ne sont pas levés.
Il faut à la fois renforcer la péréquation verticale – portée par la dotation globale de fonctionnement (DGF) – et maintenir la péréquation horizontale qui assure la solidarité entre les territoires. Comme la péréquation est aujourd'hui insuffisante, nous avons créé un fonds spécifique pour la région Île-de-France – que nous souhaitons doter de 60 millions d'euros – et nous avons conservé ce que la précédente majorité avait mis en place. L'évolution de la DGF doit prendre en compte la question des terrains rendus inconstructibles par des dispositions d'intérêt général dans les communes rurales. Nous soumettrons des propositions au Parlement afin que les assiettes fiscales nouvelles soient élaborées au plus tard pour le projet de loi de finances de 2015. Il y a notamment lieu de régler la question du transfert : si une région, disposant d'une ressource particulière, demande une délégation spécifique, le transfert concerne-t-il la ressource ou l'assiette fiscale ? Mais, dans le cas de l'eau, comment déterminer une assiette, sauf à imposer un prélèvement sur chaque mètre cube ? D'où la nécessité de simulations très précises, pour éviter les déboires rencontrés avec la CVAE. Mais, le moment venu, nous constituerons des groupes de travail thématiques auxquels je vous invite à vous joindre, dans un esprit transpartisan…
Monsieur Florent Boudié, il nous faut en effet renouer les liens de confiance que la réforme de 2004 a rompus. Cette année-là, la région a cessé d'être un échelon de mission pour devenir une administration gérant des personnels techniciens, ouvriers et de service (TOS) – en Bretagne par exemple, le nombre d'agents placés sous l'autorité de la région est passé de 1 500 à 7 500, ce qui a engendré des besoins en matière de fonctions supports et des difficultés liées à la distance entre le chef-lieu régional et les cités scolaires. Cette évolution, non prévue par le projet de loi, fut une erreur. Nous devons donc effectuer le mouvement inverse et ramener les régions vers une activité centrée sur la conduite de projets en ne leur transférant aucune tâche de gestion supplémentaire. Elles pourront par exemple participer aux réflexions menées par le nouveau commissariat général à la stratégie et à la prospective sur les filières économiques et sur les coopérations internationales.
La France ne possède pas l'exclusivité du mille-feuille : la Suède, par exemple, emploie 140 fonctionnaires pour 1 000 habitants – contre 90 en France –, percevant des salaires bien supérieurs à ceux pratiqués dans notre pays, pour, entre autres choses, animer 400 agences indépendantes chargées de la conduite des politiques publiques. Le modèle n'est donc pas là…
En revanche, nous pouvons clarifier ! Nous proposons au Parlement qu'on ne puisse pas autoriser de cofinancement sans signature de pacte de gouvernance. En l'absence d'entente, le chef de file s'imposera, ce qui revient à reconnaître un principe de compétence exclusive. Cette réforme pourrait certes être jugée contraire à la libre administration des collectivités territoriales, garantie par la Constitution, mais une telle règle permettrait de développer la confiance et d'adapter les règles d'organisation à chaque région. Il me semble plus intéressant pour les élus d'élaborer des pactes de gouvernance plutôt que de suivre des directives qu'on leur imposerait.
La loi du 16 novembre 2010 conférait au préfet le dernier mot sur le schéma départemental de coopération intercommunale, ce qui a heurté les élus. Il aurait été préférable de donner le pouvoir de décision à la commission départementale de coopération intercommunale (CDCI), quitte à prévoir éventuellement la possibilité de former un recours. Cela étant, ce qui est fait est fait.
La réponse au décrochage des territoires, sujet important, ne se limite pas à la solidarité fiscale. La création des aires métropolitaines permettra de développer la solidarité à l'intérieur du territoire concerné – Lyon constitue un exemple de réussite de cette politique, des zones rencontrant de grandes difficultés se portant dorénavant beaucoup mieux –, mission que le département assurera également pour les autres territoires, notamment ruraux. L'État peut travailler avec les départements pour les zones rurales et avec les régions pour les zones urbaines, même s'il faudra gérer les frictions entre la fonction publique d'État et la fonction publique territoriale pour la répartition des tâches.
La loi définira le contenu des compétences en matière de transition énergétique, ce texte se bornant à prévoir que les intercommunalités et les régions en recevront la responsabilité. Nous aurions pu tout écrire dans le projet – option que nous avons suivie pour la formation professionnelle et pour une partie des transports –, mais il aurait été beaucoup trop volumineux, si bien que nous avons préféré scinder l'identification des compétences et la définition de leur contenu.
Monsieur Martial Saddier, il est normal de nourrir des inquiétudes – je les partage d'ailleurs – quant à la cohérence de la politique que nous mettons en oeuvre. Néanmoins, nous devrions parvenir à les lever si nous définissons précisément les contours des conférences territoriales de l'action publique et du pacte de gouvernance, si nous encadrons les cofinancements et si nous dépassons une fois pour toutes l'opposition entre les villes et les campagnes. Les amendements joueront un rôle éminent pour enrichir le texte sur ces points – je souhaite d'ailleurs qu'ils soient transmis aux présidents des commissions parlementaires à mesure que nous les recevons. Le débat parlementaire pourrait, par exemple, déboucher sur la création des pôles de développement ruraux, idée que défendent certains sénateurs et pour laquelle j'ai moi-même plaidé avant d'occuper ces fonctions.
Le risque de tutelle des schémas régionaux sur l'action des autres collectivités territoriales existe, mais tout schéma local a vocation à s'imposer et comporte donc ce danger – je pense notamment aux SCoT votés par un pays ou par une intercommunalité. Je souhaite que la conférence des exécutifs permette de saisir chacune des instances délibérant sur les schémas : cela allonge certes la procédure, mais cela permet d'avancer des propositions sur leur contenu. À plus long terme, nous devrons aboutir à la fusion des différents schémas régionaux – de développement économique, de l'éolien, de l'énergie entre autres – en un seul schéma régional d'aménagement du territoire.
J'ai proposé à M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur, de ne fermer que des sous-préfectures situées en milieu urbain, car plus personne ne s'y rend. En zone rurale, nous proposons en revanche d'y rassembler des services de différents ministères pour créer des maisons des services de l'État, ouvertes aux usagers, aux élus, aux entrepreneurs et à tous ceux qui en auraient besoin. Cette évolution générerait des économies d'immobilier et de déplacements. Nous conduirons rapidement des expérimentations en ce sens dans quelques arrondissements.
La réforme ne prévoit pas la suppression des pôles transfrontaliers de Nice, de Strasbourg et de Lille, et des études sur l'opportunité d'en créer de nouveaux sont même conduites. Le texte définit un cadre général dans lequel d'autres territoires entreront s'ils le souhaitent.
Monsieur Bertrand Pancher, à l'occasion de la présentation du projet de loi, je dresserai la liste des missions de l'État qui ne peuvent être transférées, afin de distinguer les missions régaliennes des missions de service public. Les premières peuvent être déléguées, mais non transférées.
Monsieur François-Michel Lambert, je n'ai pas le temps d'organiser un débat public avec les collectivités territoriales sur la métropole d'Aix-Marseille-Provence, si bien que cette discussion doit se tenir entre elles, à l'image de la centaine de rencontres organisées par les élus pour le projet de Paris Métropole. En outre, les maires n'ont pas participé à la seule séance publique à laquelle j'ai participé, préférant organiser une manifestation à l'extérieur de la salle !