Intervention de Virginie Duby-Muller

Réunion du 17 avril 2013 à 9h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVirginie Duby-Muller :

Je tiens à saluer, moi aussi, au nom du groupe UMP, ce travail remarquable. Les auditions exhaustives menées par la mission ont permis de montrer combien les métiers artistiques couvraient un spectre large et diversifié. Le dernier travail, conduit par Christian Kert, sur cette question remontait à 2004 et nécessitait donc d'être actualisé.

Ce secteur joue un rôle essentiel de vecteur d'éducation et d'émancipation, mais a aussi un poids économique important car, comme le rappelait le rapporteur, les emplois ne sont pas délocalisables.

Cette mission a permis à la représentation nationale d'aborder les problématiques concernant l'ensemble des métiers artistiques, en étudiant de nombreux sujets, parfois très techniques et transversaux.

Le rapport traite ainsi de l'épineuse question du régime d'assurance chômage des intermittents du spectacle, dérogatoire au droit commun, et qui fera bientôt l'objet de négociations entre les partenaires sociaux. Cette question récurrente fait l'objet de débats passionnés entre ceux qui s'alarment de la générosité d'un système déficitaire de près de 1 milliard d'euros alors qu'il ne bénéficie qu'à 3 % des allocataires de l'assurance chômage et ceux qui jugent illégitime d'individualiser le déficit d'un régime relevant de la solidarité interprofessionnelle et de lui imputer la situation financière de l'Unédic.

Le rapport dépassionne le débat. D'une part, le coût réel du régime serait de 320 millions d'euros et non de 1 milliard d'euros, montant largement diffusé par les détracteurs du dispositif. D'autre part, les recommandations nos 13 et 14 qui font l'objet d'un consensus semblent garantir la pérennité du régime, grâce à l'augmentation des contributions des intermittents les mieux intégrés et la maîtrise des dépenses.

Cela étant, les travaux de la mission ne peuvent être réduits à la question de l'intermittence du spectacle. Je souhaiterais revenir sur deux points.

En premier lieu, le rapport, comme celui de Christian Kert en 2004, s'alarme de la situation de l'audiovisuel public qui utilise le système de la « permittence », que l'on définit comme l'emploi d'un salarié, auprès d'un même employeur, durant au moins 900 heures. À cet égard, la situation des 7 000 personnes physiques en contrat à durée déterminée d'usage, dont la durée moyenne est de 3,8 jours chez France Télévisions, laisse perplexe. Il en est de même des témoignages recueillis par la mission d'information : son rapport n'hésite pas à citer le cas d'un machiniste intermittent chez France Télévisions qui aurait enchaîné 700 CDDU en huit ans. Dans un tel cas de figure, peut-on encore parler d'intermittence ? Je ne le crois pas, et la direction de France Télévisions semble elle aussi en convenir.

Cette entreprise doit faire un effort et transformer ses emplois de permittents en contrats à durée indéterminée. On peut estimer que 350 personnes devraient bénéficier d'une telle mesure, mais cela paraît hors de proportion avec les moyens financiers du groupe, d'autant que le Gouvernement ne cesse de réduire les crédits prévus dans le cadre de son contrat d'objectifs et de moyens. Le contexte budgétaire ne semble donc pas favorable à une « permanentisation » des salariés intermittents, mais espérons que le travail de la mission permettra de mettre en relief leur situation, voire de les protéger de plans sociaux, ou encore d'insister, comme le rapport, « sur la nécessité de réfléchir à la trajectoire financière du groupe et ses modalités de financement ». Les excellentes préconisations du rapport ne risquent-elles pas d'être sacrifiées sur l'autel du réalisme économique ?

Ma deuxième question concerne les « matermittentes », femmes artistes ou techniciennes que leur grossesse place face à une double difficulté, celle de ne pouvoir bénéficier d'un congé de maternité indemnisé par la sécurité sociale, et celle de ne pouvoir rouvrir leurs droits à l'assurance chômage. Leur audition a ému l'ensemble des membres de la mission, tant les situations qu'elles nous ont exposées étaient inconcevables. Le rapport esquisse un certain nombre de solutions, mais renvoie surtout à une circulaire visant à rappeler les règles relatives au maintien des droits à la sécurité sociale afin de sensibiliser les caisses primaires d'assurance maladie. Ayant moi-même été touchée par les témoignages que nous avons entendus, j'ai interpellé le Gouvernement sur sa volonté d'aider réellement les matermittentes, en adressant une question à Mme Marisol Touraine, ministre chargée de la santé. Le témoignage de ces femmes qui préfèrent ne pas déclarer leur grossesse, au risque de se mettre dans l'illégalité, de peur de ne pas être indemnisées, quitte à mettre leur santé, ainsi que celle de leur enfant, en danger, ne peut laisser indifférent le législateur. Comme indiqué dans le rapport, la situation des matermittentes « appelle une action résolue des pouvoirs publics ».

Telles sont les questions que je souhaitais vous soumettre. Pour le reste, le groupe UMP est favorable à la publication de ce rapport de qualité, dont il espère que de nombreuses recommandations seront suivies d'effets pour améliorer les conditions d'emploi dans les métiers artistiques et conforter l'exception culturelle.

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