Intervention de Philippe Boucly

Réunion du 23 avril 2013 à 17h15
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Philippe Boucly, directeur général de GRTgaz :

GRTgaz est une entreprise jeune, créée en 2005. Elle assure le transport du gaz naturel sur les trois quarts du territoire métropolitain, le quart restant étant couvert par TIGF. Le réseau exploité s'étend sur 32 000 kilomètres : c'est le plus long d'Europe. Nous employons 3 100 salariés pour un chiffre d'affaires de 1,5 milliard d'euros. Nous avons aujourd'hui une centaine de clients expéditeurs, c'est-à-dire d'utilisateurs du réseau de transport. Nous livrons le gaz à seize clients distributeurs : GrDF est évidemment le plus important, les autres sont des entreprises locales de distribution. Près de 900 clients industriels sont également reliés directement au réseau de transport.

Le système mis en place depuis 2005 a permis la création d'un marché de gros efficace du gaz naturel. D'après la Commission de régulation de l'énergie (CRE), 83 % des sites industriels raccordés au réseau, ce qui représente 99 % de la consommation, ont choisi de faire appel à des offres de marché pour leur approvisionnement en gaz.

Les réseaux de transport haute pression sont les vecteurs majeurs de la transition énergétique. Le « système gaz », c'est-à-dire l'association du gaz naturel et du réseau de transport, est déjà le complément indispensable des énergies renouvelables, amenées à se développer mais par nature intermittentes.

Dès à présent, nous alimentons treize cycles combinés à gaz pour une puissance de 5,4 gigawatts, c'est-à-dire l'équivalence de trois réacteurs EPR. Nous déplorons l'arrêt de certains projets et la mise sous cocon de plusieurs unités : cela est bien sûr dû à la baisse des prix de la tonne de charbon, ainsi qu'à l'effondrement de la tonne de CO2.

Nous préparons dès aujourd'hui l'injection de biométhane, c'est-à-dire de gaz renouvelable, directement dans notre réseau : à ce jour, nous avons signé dix conventions d'étude et nous encourageons le développement du biométhane notamment par la mise en ligne, sur notre site, de Réso'Vert, carte interactive qui permet à chacun de se localiser par rapport au réseau. L'injection de biogaz dans le réseau devrait être possible dès 2014.

Demain, l'électricité excédentaire sera stockée grâce à l'hydrogène et injectée directement dans notre réseau de transport. Nous avons réalisé une étude qui montre que le réseau de transport offre une solution de stockage massif de l'électricité excédentaire, d'origine éolienne ou photovoltaïque, après sa conversion en hydrogène par électrolyse.

Après-demain, nous envisageons le transport de gaz de synthèse, obtenu par recombinaison chimique de l'hydrogène et du gaz carbonique capté, ou encore le transport de biométhane par gazéification de la biomasse. Nous venons d'achever une étude qui montre que le potentiel de production de biométhane et de gaz de synthèse peut être évalué à 220 térawattheures, à comparer à une consommation actuelle de gaz naturel en France de 520 térawattheures, hors procédés utilisant les micro-algues et production à partir de cultures dédiées. Cette étude montre que, avec une subvention de l'ordre de 5 milliards d'euros, c'est-à-dire de l'ordre de grandeur de celle accordée aux énergies renouvelables d'origine électrique, on pourrait développer 150 térawattheures de biogaz à l'horizon 2017.

La transition énergétique devra nécessairement s'appuyer sur des réseaux fiables, puissants, intelligents. Notre société investit beaucoup, pour assurer la sécurité de l'approvisionnement en France, pour permettre une mutualisation des moyens, pour faciliter l'accès à des sources diversifiées et fluidifier le transit sur le réseau, pour assurer l'équilibrage. Bref, il s'agit de faire vivre la solidarité énergétique entre les territoires et la continuité de l'alimentation, et donc de permettre la péréquation tarifaire entre les régions. Pour ce faire, nous avons absolument besoin d'une visibilité à long terme – cinquante ans plutôt que dix.

Pour la période 2009-2012, nos investissements s'élevaient environ à 2,5 milliards d'euros, et, pour la période 2013-2016, nous prévoyons d'investir 3,2 milliards d'euros.

L'évolution du transport de gaz ne saurait se concevoir qu'à l'échelle européenne. GRTgaz possède déjà deux filiales, l'une en Allemagne et l'autre en Autriche ; nous travaillons au renforcement des interconnexions avec les pays voisins. L'objectif de la Commission européenne est que l'Europe dispose d'un grand marché du gaz naturel, intégré et solidaire : nous nous inscrivons pleinement dans cette perspective. Nous sommes impliqués dans la création d'une Europe de l'énergie : nous avons contribué activement à la mise en place d'une plateforme (PRISMA) de réservation de capacités entre un grand nombre de transporteurs européens : elle est opérationnelle depuis le 1er avril. Enfin, je me rends demain à Bruxelles : GRTgaz et un opérateur suédois vont rejoindre trois autres opérateurs européens pour manifester notre intention d'accueillir sur nos réseaux 100 % de gaz décarboné à l'horizon 2050.

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