Intervention de Dominique Maillard

Réunion du 23 avril 2013 à 17h15
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Dominique Maillard, président du directoire de Réseau de transport d'électricité, RTE :

L'ouverture à la concurrence du transport d'électricité, facilité essentielle, n'a pas paru pertinente – je souhaiterais d'ailleurs bien du plaisir à un concurrent qui voudrait développer un nouveau réseau d'électricité. RTE est donc chargé du transport de l'électricité, c'est-à-dire de son acheminement entre grands producteurs et grands consommateurs ; nous alimentons également, bien sûr, les postes de distribution. Au total, nous gérons 100 000 kilomètres de réseau, dont un quart est constitué de lignes à 400 000 volts, visibles, qui ne sont pas toujours du goût de tout le monde.

Juridiquement, nous sommes une filiale à 100 % d'EDF, mais avec des conditions tout à fait particulières et dérogatoires au code des sociétés : notre actionnaire ne fixe ni nos tarifs ni nos investissements – c'est le régulateur qui le fait. Nous suivons des codes de bonne conduite, et nous avons à demeure un contrôleur général de la conformité, qui veille au respect de nos obligations d'indépendance et de neutralité à l'égard de notre actionnaire.

Nous sommes chargés de construire, d'entretenir et de développer le réseau, missions pour lesquelles nous avons les compétences et les moyens – nous n'avons pas connu les affres du secteur ferroviaire. Le régime est celui d'une concession d'État : nous sommes propriétaires du réseau.

Nos ressources viennent de péages, acquittés par les « soutireurs » : c'est une sorte de système de timbre-poste inversé, où ce n'est pas l'émetteur qui paie mais le destinataire. Ces tarifs sont établis par le régulateur ; un nouveau tarif devrait être fixé prochainement pour les trois ans à venir. Notre chiffre d'affaires est de 4 milliards d'euros. La part du coût du transport dans la facture du consommateur domestique est de l'ordre de 8 %, chiffre qui devrait rester stable.

Nous sommes également responsables de l'équilibre fin entre l'offre et la demande, puisque l'électricité se stocke aujourd'hui difficilement. Les producteurs sont censés fournir au réseau autant d'énergie électrique que les clients sont supposés en consommer. Mais même s'ils sont de bonne foi et excellents prévisionnistes, les changements de température ou les aléas de l'activité peuvent faire naître des écarts. Nous sommes donc chargés du réajustement instantané, en mobilisant ou, au contraire, en suspendant des moyens de production. Nous sommes enfin chargés de gérer les interconnexions avec les pays voisins.

À l'avenir, alors que la consommation d'électricité est stable, nous devrons investir davantage : en effet, un réseau relie des moyens de production et des consommateurs ; or, si la consommation évolue peu, la production – sous l'effet de la transition énergétique – va changer, et les nouveaux lieux de productions d'électricité n'ont aucune raison de coïncider avec les lieux historiques. On construira des éoliennes où il y a du vent, non où existe une centrale thermique !

Malheureusement, on observe une discordance entre les délais de développement des nouvelles sources de production – notamment pour les énergies renouvelables – et les délais de développement du réseau. Ainsi, en Allemagne, en 2009 et en 2010, 7 gigawatts de panneaux solaires photovoltaïques ont été, chaque année, connectés au réseau de distribution, et ont aussi alimenté les réseaux de transport. En Italie, en une seule année, 9 gigawatts ont été connectés au réseau ! Or il nous aura fallu dix ans pour installer, en Normandie, un réseau de 2 gigawatts, quand certains pays qui, comme le Danemark, n'ont pas la réputation de ne pas prendre en considération l'opinion de leurs concitoyens ou les questions environnementales, arrivent à construire de grands ouvrages en trois à quatre ans.

Si nous négligeons cette question, le réseau électrique risque de ne pas être au rendez-vous de la transition énergétique. C'est d'ailleurs la situation que connaissent nos voisins allemands ou espagnols. Cela aboutit à des dysfonctionnements du marché : des excédents de production locale ont pour conséquence des prix négatifs de l'électricité. Cela peut paraître intéressant pour le consommateur, mais je ne suis pas sûr que ce soit arrivé jusqu'à lui ; c'est surtout un signal désastreux pour les investisseurs et les opérateurs.

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