Intervention de Patrice Caillaud

Réunion du 23 avril 2013 à 17h15
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Patrice Caillaud, directeur commercial électricité de la société Itron :

Le monde industriel, en tant que promoteur des réseaux intelligents, est déjà un acteur de la transition énergétique. Mais il a besoin de décisions rapides pour pouvoir investir.

En Guyane, nous avons contribué à une expérience intéressante, consistant à relever tous les sites de production isolés du département de façon à améliorer la gestion du réseau électrique, à avoir une meilleure connaissance des incidents et à réaliser des économies. En Corse et en outre-mer, la production d'électricité est du ressort de la filiale d'EDF vouée aux systèmes électriques insulaires (SEI).

Dans les îles, la part des énergies renouvelables a augmenté au point, dans certains cas, de dépasser le seuil légal de 30 % au-delà duquel on a le droit de déconnecter le dernier entrant sur le réseau. Là encore, nous avons contribué à une expérience intéressante de réseau intelligent : tous les sites de production sont équipés de compteurs qui transmettent des informations à intervalles réguliers. Ainsi, toutes les cinq minutes, on est capable, en un point central de l'île, de savoir si le seuil est ou non dépassé, auquel cas le réseau peut devenir instable. Il est dès lors plus facile d'intervenir pour éviter un black-out. Nous avons aussi découvert, à cette occasion, que le simple passage d'un nuage pouvait entraîner une variation de production de 20 % en cinq minutes. Les îles sont un champ d'expérimentation intéressant, dont il est possible de tirer des enseignements valables pour la métropole. Car, demain, avec le développement des énergies renouvelables, les mêmes problématiques devront être traitées à l'échelle de toutes les mailles territoriales. Les enjeux sont donc très importants.

Une question portait sur le besoin des consommateurs. Je pense qu'il est pris en compte, comme l'a noté Mme Michèle Bellon. Les groupes mis en place après l'expérimentation ont permis à la Direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services et à la DGEC de vérifier la qualité de la liaison informatique vers le client final. Celle-ci rend possible la connexion de modules additionnels, dont les données télétransmises permettront de gérer les tarifs et la consommation à l'intérieur de la maison.

Rappelons que la consommation des 35 millions de ménages augmente plus vite que les autres formes de consommation. Si la consommation française augmente, ce n'est pas à cause des électro-intensifs ou du reste du monde industriel. De même, ce sont les ménages qui contribuent le plus aux pointes. À cause du secteur résidentiel, la pointe augmente de 5 % par an, et la consommation générale, de 2 % par an. Il faut donc donner aux ménages les moyens de gérer leur consommation et de réaliser des économies, d'autant que le mode de veille, gourmand en énergie, a été généralisé à tous les appareils des nouvelles technologies de l'information.

Mais sans un outil spécifique, sans un compteur intelligent équipé d'un afficheur déporté dans la maison, le particulier aura du mal à économiser l'électricité parce que, comme aujourd'hui, il ne découvrira sa consommation qu'a posteriori, en lisant sa facture.

Nous avons investi considérablement dans la filière des réseaux intelligents, mais les projets que nous développons n'ont pas encore l'envergure de Linky et ne nous permettent pas de donner un véritable coup d'envoi à cette révolution. L'expérience réalisée dans 300 000 foyers – à laquelle nous avons contribué pour un tiers – est achevée depuis 2010. La CRE a rendu ses conclusions en 2011, et les décrets et arrêtés sont prêts. La filière industrielle a absolument besoin que le projet se concrétise, sans quoi elle risque de connaître le sort des promoteurs du minitel, cette belle invention qui n'a pas su se transformer en internet. Le décollage des réseaux intelligents entraînera le développement de la filière des appareils de comptage, mais aussi de celle des appareils électriques domestiques, qui concerne des entreprises majoritairement françaises. Nous avons donc besoin, je le répète, de décisions rapides.

Il faut respecter non seulement les lois de la physique, mais aussi celles du monde industriel. La filière industrielle qui est sur le point de se mettre en place et d'exporter vers l'étranger pourrait rapidement se retrouver dépassée par ses concurrents. Rappelons que l'Italie est passée aux réseaux intelligents il y a plusieurs années ; l'Espagne, le Portugal et les pays du Nord y viennent également. La perspective de poser 35 millions de compteurs est une occasion à saisir.

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