Intervention de Bénédicte de Montlaur

Réunion du 10 avril 2013 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Bénédicte de Montlaur, sous-directrice d'Afrique du Nord à la direction d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient du ministère des affaires étrangères :

Pour l'instant, c'est le seul terme dont nous disposons pour désigner les actions violentes contre des civils notamment. Après, les réponses à apporter à chaque situation sont effectivement différentes. Pour notre intervention au Mali, il nous importait que les pays d'Afrique du Nord nous apportent leur soutien. Nous l'avons obtenu grâce à un dialogue très intense. Nous avons envoyé de nombreux responsables discuter avec ces pays, si bien qu'il n'a fallu que quelques semaines pour que les premières déclarations publiques de soutien se fassent entendre.

Le travail de mémoire est l'un des aspects les plus délicats de notre relation bilatérale. Nous essayons de travailler dans le calme. À la faveur de la visite présidentielle, un groupe de travail sur les archives a été mis en place. Ce groupe de travail, qui s'est déjà réuni à deux reprises, va étudier les modalités de coopération avec les Algériens sur ces questions d'archives. Travailler sur des dossiers concrets est un moyen de traiter ce travail de mémoire de manière apaisée.

Sur l'égalité entre hommes et femmes, le travail est délicat. Alors que la Tunisie et la Syrie étaient les pays les plus avant-gardistes en matière de droits des femmes, aujourd'hui, les révolutions arabes suscitent des inquiétudes quant à leur respect. Sur ce sujet, nous entretenons un dialogue fort. Au Maroc, un accord vient d'être signé entre Najat Vallaud-Belkacem et la ministre des droits des femmes.

Il n'existe pas de définition officielle de l'islamisme modéré et de l'islamisme radical, même si des dizaines d'ouvrages traitent du sujet. Pour ma part, je considère comme islamistes modérés ceux qui acceptent les règles du jeu démocratique ; à l'inverse, les islamistes radicaux n'acceptent pas les règles du jeu démocratique. Plus radicaux encore, les djihadistes ont recours à l'action violente. Telles sont les grandes distinctions que l'on peut établir, même si elles peuvent être nuancées de multiples façons.

Les autorités locales et beaucoup de nos contacts dans les pays du Maghreb s'inquiètent du recul du français, qui est considéré comme la langue ouvrant l'accès au marché de l'emploi. Nous mettons tout en oeuvre pour favoriser l'apprentissage du français dont le niveau a pâti des politiques d'arabisation. Il faut voir le succès des écoles françaises dans les pays du Maghreb. Nous scolarisons 30 000 élèves au Maroc, 20 000 de plus entre l'Algérie et la Tunisie, et les listes d'attente sont considérables. Reste qu'on ne peut pas se substituer au système d'éducation local. Tout en maintenant notre réseau d'écoles françaises au Maghreb, nous développons parallèlement nos coopérations avec le système d'enseignement local. Par exemple, nous venons de signer un fonds de solidarité prioritaire de 800 000 euros au Maroc pour améliorer la formation des formateurs en français. En Algérie, nous en ouvrirons sans doute deux nouvelles écoles, une à Oran et l'autre à Annaba. Nous sommes dans une phase de redéploiement. Au Maroc, nous voulons coopérer avec les autorités pour le développement des filières bilingues. La visite d'État a été l'occasion de nouer des premiers contacts à cet égard. Dans ce cadre, des établissements marocains dispenseraient l'enseignement du français comme langue étrangère et certaines disciplines seraient enseignées en français. L'effort à accomplir est énorme, du point de vue financier également. Or nous gérons la pénurie, nos crédits de coopération ont diminué de près de 40 % pour les pays du Maghreb.

Nous avons constaté avec intérêt que beaucoup de députés parmi les nouvelles élites de ces pays avaient la double nationalité. Bien sûr, notre ambassade est en contact avec eux. La relation bilatérale ne peut que profiter de la présence de tels responsables politiques.

N'étant pas en charge des pays européens de la rive nord de la Méditerranée, c'est un peu à dessein que je n'ai pas répondu à la question qui s'y rapporte. Je pense que ces pays sont tous intéressés par une coopération. Par exemple, à l'occasion de l'organisation, au mois de février, d'une réunion intergouvernementale de soutien à la Libye, nous avons beaucoup travaillé avec les Italiens. Ces derniers vont organiser ensuite la prochaine conférence internationale sur la sécurité de la Libye. Nous travaillons sur des secteurs précis, sans oublier le travail au sein des instances déjà mentionnées : le 5+5 au sein duquel les pays de la rive nord sont très dynamiques, et l'Union pour la Méditerranée. Il y a donc des coopérations de fait qui s'établissent au quotidien et des cadres de coopération.

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