Intervention de Michèle Bonneton

Réunion du 24 avril 2013 à 17h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichèle Bonneton :

Je vous prie d'excuser Brigitte Allain, cosignataire de ce texte, qui a été retenue à Strasbourg pour participer à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe.

La proposition de résolution répond à l'autorisation donnée par la Commission européenne, le 15 février 2013, de réintroduire les farines animales dans l'alimentation des poissons d'élevage dès le 1er juin 2013. Cette mesure, qui pourrait être étendue aux volailles et aux porcs dès l'année prochaine, est en effet intervenue en pleine crise de confiance des consommateurs sur la filière agroalimentaire, à la suite de l'affaire de la viande de cheval.

Elle permet aux députés d'exprimer leur refus d'introduire les farines animales en France et de soutenir la position du Gouvernement, qui est assez claire – comme l'a d'ailleurs rappelé le Président de la République lors du salon de l'agriculture.

Cette résolution, née de l'excellente initiative du Président François Brottes – que nous saluons – soutient une position courageuse.

Cependant, il faut aussi s'attaquer aux causes pour remédier à la situation dans laquelle nous nous trouvons, qui mène à la défiance des consommateurs : la dépendance de l'Union européenne en matière de protéines, la consommation toujours plus importante de produits carnés et l'absence de recours national vis-à-vis des décisions européennes. C'est pourquoi le groupe écologiste a formulé des propositions d'amélioration. L'une d'entre elles tend à demander un étiquetage obligatoire au niveau européen, mentionnant que le produit a été nourri sans farines animales. Elle a d'ailleurs été adoptée la semaine dernière par la Commission des affaires européennes, qui l'a intégrée au texte, ce qui est une très bonne avancée.

Je souhaiterais, au nom du groupe écologiste, insister sur deux points.

En premier lieu, sur la nécessité de repenser la filière de façon pérenne, notamment grâce à la mise en place d'un plan sur les protéines végétales. Ce plan, demandé depuis des années au niveau européen, conférerait à l'Europe et aux exploitations une autonomie dans la production des aliments pour les animaux. En effet, l'Europe ne couvre que 22 % de ses besoins en protéines végétales, qui constituent pourtant un substitut utile aux protéines et farines animales d'un point de vue économique et environnemental. Il serait techniquement possible de réduire les importations de soja d'Amérique d'au moins 40 % grâce à une augmentation de la production de légumineuses à hauteur de seulement 7 % des terres arables. L'Europe doit de toute urgence saisir cette opportunité.

Le deuxième point touche au moratoire. Si la France a exprimé son refus des farines animales, cette prise de position, en l'état actuel du droit européen, n'a de valeur que déclarative. Il nous faut un outil juridique contraignant, à l'image de la clause de sauvegarde pour les organismes génétiquement modifiés (OGM), afin de protéger les citoyens de ces produits ou pratiques dangereuses dès que le gouvernement et le parlement d'un pays le décident.

On peut en effet craindre que les farines animales de porc et de volaille soient autorisées en 2014 : celles à base de poisson ne sont que la partie émergée de l'iceberg. Il serait alors impossible de contenir par des déclarations politiques et des étiquettes leur entrée sur le marché national. D'autant que la traçabilité des produits en la matière est malaisée et que la baisse drastique du nombre des inspecteurs vétérinaires et de la répression des fraudes ne permet pas d'assurer le service public de protection des consommateurs.

Nous proposons donc une réouverture des négociations au niveau européen afin de permettre la mise en place d'une clause de sauvegarde ou d'un moratoire. Conscients des difficultés juridiques que cela pourrait poser, nous insistons toutefois pour que le principe de précaution s'applique : des éléments nouveaux, à la lumière d'une étude indépendante, ne sont-ils pas susceptibles de surgir à tout moment dans le débat ? Ne répétons pas les erreurs du passé !

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