Intervention de Dominique Orliac

Séance en hémicycle du 14 mai 2013 à 15h00
Réforme de la biologie médicale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Orliac :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, il nous revient, après l'accord intervenu lors de la réunion de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi portant réforme de la biologie médicale, d'examiner et de nous prononcer sur les modifications apportées par la CMP, figurant dans le rapport rédigé par nos collègues rapporteurs membres du groupe socialiste, Ségolène Neuville pour l'Assemblée Nationale et Jacky Le Menn pour le Sénat.

Comme je l'avais annoncé, lors de l'examen en première lecture le 25 mars dernier, cette proposition de loi a pour objectif de réformer, enfin, la biologie médicale qui pâtissait d'une réglementation obsolète, puisque la dernière modification de fond du régime juridique applicable à la profession remonte à la loi du 11 juillet 1975 relative aux laboratoires d'analyses de biologie médicale et à leurs directeurs et directeurs adjoints. Après plus de cinq passages devant le Parlement sans jamais aboutir à une quelconque réforme, il est temps de mettre à jour cette loi et de la moderniser.

Le groupe RRDP est tout d'abord satisfait que l'article 1er ait été conservé par les deux chambres du Parlement. L'ordonnance du 13 janvier 2010, issue du rapport Ballereau et non encore ratifiée, avait pour objet de mettre en place une accréditation obligatoire des laboratoires de biologie médicale, de les responsabiliser tout en maîtrisant les dépenses de santé et de mieux organiser l'offre de soins en fonction de l'intérêt du patient. La présente proposition de loi, en ratifiant ladite ordonnance, met fin à cette situation d'insécurité juridique, où le texte organisant la profession n'a que valeur réglementaire. Elle garantit la sécurité et la qualité des examens par l'accréditation et permettra également de limiter la financiarisation du secteur libéral.

S'agissant du renforcement de la médicalisation de la profession, abordée par les articles 4 à 6, nos remarques sont les suivantes. Les propositions tendant à limiter aux prélèvements la partie hors laboratoire étaient, à nos yeux, beaucoup trop restrictives, car il est très courant que les professionnels de santé, notamment les infirmiers, soient conduits à transporter directement au laboratoire les prélèvements qu'ils sont chargés d'effectuer. Nous sommes donc satisfaits que des dispositions moins contraignantes, faisant référence au seul prélèvement, aient été retenues par la commission mixte paritaire.

Il est satisfaisant de noter que l'article 5 a fait consensus. Ainsi, les ristournes accordées en vertu de contrats signés alors qu'elles étaient autorisées, c'est-à-dire avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance de 2010 et dans la période courant entre l'entrée en vigueur de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 et l'entrée en vigueur de la présente proposition de loi, continueront à être pratiquées jusqu'à l'expiration de ces contrats, ménageant une phase de transition avant l'interdiction totale de ces ristournes, en cohérence avec la médicalisation de l'analyse biologique comme avec le principe de tarification des actes médicaux.

Tout en ayant pris connaissance de la contestation exprimée par la conférence des doyens des UFR de médecine et de pharmacie et par celle des présidents de commission médicale d'établissement des centres hospitaliers, nous déplorons la réintroduction de l'article 6 qui avait été supprimé par le Sénat. Nous continuons de croire qu'il y a quelque paradoxe à prévoir un diplôme d'études spécialisées et à considérer que celui-ci n'est pas forcément nécessaire pour obtenir un poste en CHU. Cette réintroduction de l'article 6 tel que voté par l'Assemblée nationale ne nous satisfait aucunement, comme nous l'avions déjà exprimé dans la discussion générale le 25 mars 2013.

Nous persistons à penser qu'il n'y a pas de raison objective de créer une voie dérogatoire nouvelle pour l'exercice de la biologie médicale, car différentes voies sont d'ores et déjà prévues par l'ordonnance que le texte de loi vient justement ratifier. Il y a possibilité de dérogation pour les médecins et pharmaciens non titulaires du DES de biologie médicale après obtention de la qualification en biologie médicale par les ordres respectifs ; possibilité pour les personnels enseignants et hospitaliers des CHU de continuer à réaliser des activités d'enseignement et de recherche fondamentale et appliquée après nomination par le CNU ; possibilité, enfin, pour les biologistes non titulaires du DES d'exercer la biologie médicale dans un domaine de spécialisation. Je veux le rappeler ici : nous sommes attachés à la pratique hospitalo-universitaire fondée sur le triptyque soins-enseignement-recherche. Nous estimons par conséquent que les soins ne doivent, dès lors, pas être relégués.

Concernant les articles 7 et 7 bis, nous sommes satisfaits de la décision de la CMP de retenir les propositions de l'Assemblée nationale. Coeur de la présente réforme, l'accréditation obligatoire garantira la qualité de tous les actes biologiques sur l'ensemble du territoire. Elle permettra également d'assurer la permanence des procédures, la qualité du matériel, bref, un degré de qualité globale en ce qui concerne les laboratoires. Mais, si nous savons que cette accréditation peut paraître onéreuse pour les laboratoires les plus modestes, les paliers fixés successivement à 50 % des actes en 2016, à 70 % des actes en 2018 et à 100 % des actes en 2020 nous semblent être un bon compromis. Cela devrait permettre aux laboratoires les plus modestes de s'organiser afin d'obtenir leur accréditation. Celle-ci portant notamment, pour ne citer que ces exemples, sur le niveau de qualité du matériel d'analyse, des machines ou des procédures, elle contribuera également à renforcer la confiance des citoyennes et citoyens dans les laboratoires et la qualité des services proposés.

Je dirai, enfin, quelques mots de l'article 9, qui tend à renforcer la régulation de l'offre de biologie médicale sur le territoire et à préciser les attributions reconnues à ce titre aux agences régionales de santé. Comme je l'ai déjà dit, le dispositif qui complète les dispositions du code de la santé publique posant le principe de l'interdiction pour un investisseur de prendre part au capital de société de biologie médicale lorsque cette opération lui permet de contrôler une part, fixée à 33 %, de l'offre de biologie médicale sur un même territoire de santé, semble satisfaisant. Il s'agit d'affirmer plus fortement l'indépendance des professionnels et de préserver le maillage territorial face aux regroupements imposés. Les intérêts financiers ne doivent pas avoir un champ d'application illimité, dans le domaine de la santé en particulier comme dans d'autres ! Dès lors, nous sommes satisfaits que cet article soit resté inchangé. La préservation de laboratoires indépendants et de proximité est un objectif indissociable de la politique que soutient le groupe RRDP.

Pour conclure, les députés du groupe RRDP, s'ils se félicitent que le cadre juridique de la biologie médicale soit enfin actualisé et sécurisé, s'abstiendront majoritairement sur ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.)

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