Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, les deux projets dont nous sommes saisis, après engagement de la procédure accélérée, ont pour objet, je cite notre collègue Fourage, « d'engager une nouvelle étape dans la poursuite de la démocratisation des instances représentatives des communautés françaises vivant à l'étranger ».
Plus prosaïquement, il s'agit de tirer les conséquences de l'instauration, par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, de onze députés élus par nos compatriotes établis à l'étranger, et de l'accentuation des inégalités de leur représentation au sein de l'ensemble du Parlement français qui en résulte directement. L'objectif est également de proroger d'un an le mandat des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger.
Dans l'urgence, alors que l'élection des conseillers de la série B devait avoir lieu en juin 2013 – la loi du 15 juin 2011 avait déjà reporté d'un an, de juin 2012 à juin 2013, le mandat de l'ensemble des conseillers, pour cause d'élections présidentielle et législatives –, le projet de loi n° 900 prolonge encore d'un an le mandat de ces conseillers, dans l'attente de la mise en place de la réforme de l'Assemblée des Français de l'étranger, objet du second texte de loi – Assemblée des Français de l'étranger qui se nommera désormais « Haut conseil des Français de l'étranger », après avoir remplacé le « Conseil supérieur des Français de l'étranger ».
Ce nouveau Haut conseil, plus autonome, à l'effectif resserré, aux fonctions mieux définies, devrait donner une mission claire à cette instance de représentation consultative, dont l'utilité a pu être discutée et la pérennité remise en question par l'institution, aux côtés des douze sénateurs, des onze députés représentant les Français vivant à l'étranger.
Le choix a donc été de maintenir cette instance représentative. Le nombre de ses membres passera de cent quatre-vingt onze à cent deux, alors que le texte initial du projet de loi prévoyait un effectif de quatre-vingt un membres.
Si la commission des lois a suivi le Sénat qui, par un amendement de notre collègue Catherine Tasca, avait augmenté sensiblement le nombre de membres du Haut conseil, elle a préféré ramener le nombre de circonscriptions à cinq, au lieu des vingt votées par la Haute assemblée, tirant ainsi les conséquences du rétablissement, heureux et logique, du suffrage universel indirect pour l'élection des membres.
Le ratio de représentation d'environ 16 000 inscrits sur les listes consulaires par élu au Haut conseil, pour l'ensemble des cinq continents correspondant à chacune des circonscriptions, peut être considéré comme satisfaisant.
La situation sera plus satisfaisante qu'aujourd'hui, même si, selon le constat dressé dans l'exposé des motifs du projet de loi, le déficit de représentativité au niveau local du dispositif de représentation des Français hors de France risque de perdurer avec ces nouvelles dispositions.
Cependant, et dès lors que le Gouvernement se propose de faire des conseillers consulaires le corps électoral des sénateurs représentant les Français de l'étranger – la faiblesse du corps électoral de nos collègues sénateurs représentant nos compatriotes à l'étranger, de l'ordre de quelques dizaines d'électeurs, a été maintes fois soulignée –, le dispositif permettra une amélioration substantielle du rapport de représentativité grâce à l'élection de délégués consulaires membres du collège électoral des sénateurs.
Le problème du chevauchement des circonscriptions nées du présent texte et de celles qui résultent du tableau actuel, présidant à l'élection de nos collègues députés des Français de l'étranger, sera abordé plus tard.
Comme le précise l'étude d'impact, la question d'un éventuel redécoupage des circonscriptions législatives pour l'élection des députés par les Français établis hors de France sera examinée ultérieurement par le Gouvernement. Est-ce à dire que le Gouvernement entend fixer le nombre des circonscriptions législatives au même niveau que celui des circonscriptions sénatoriales, s'agissant des Français de l'étranger ?
L'on ne peut estimer que la représentation de nos compatriotes établis hors de France soit satisfaisante. Issue de réformes successives, dont la dernière en date, la création de députés des Français de l'étranger en 2008, nous avait retenus de longs moments dans cet hémicycle, ainsi que cela a été rappelé tout à l'heure, cette représentation comporte désormais plusieurs étages : l'échelon local formé par quatre cent quarante-quatre conseillers consulaires élus dans cent trente circonscriptions ; l'échelon central formé par cent deux conseillers consulaires élus dans cinq circonscriptions, membres du Haut conseil ; et l'échelon national, formé des douze sénateurs et des onze députés des Français de l'étranger.
Avec cet ensemble, la France fait figure d'exception quand d'autres pays, nations traditionnellement d'émigration plus que d'immigration, se contentent d'un ou de deux échelons. Pourtant, malgré ce maillage, la participation électorale est faible et la cohérence de certaines de ces institutions peut poser question.
Certains de nos collègues, commissaires aux lois, se sont posé la question de l'utilité des instances représentatives des Français de l'étranger. N'est-il pas encore abusif de parler de démocratie de proximité à l'échelle du monde entier où nos compatriotes sont répartis ? Les conseillers consulaires auront-ils les moyens d'être ce relais local utile à nos collègues parlementaires, ainsi qu'à nous tous, qui sommes députés de la nation avant d'être les représentants d'un territoire ? Cette acception de la nation, concept unifiant du peuple français, communauté de choix telle que l'a théorisée Renan lors de sa célèbre conférence à la Sorbonne en 1884, prend ici toute sa signification. Nous représentons, nous aussi, les Français de l'étranger au même titre que nous représentons les électeurs métropolitains.
Nous pourrons donc juger de l'efficacité du maillage territorial ainsi mis en place. Ne préjugeons pas de l'avenir et donnons leur chance au futur Haut conseil des Français de l'étranger et aux conseillers consulaires. Qui peut le plus peut le moins : l'augmentation du nombre de grands électeurs composant le collège électoral des sénateurs des Français de l'étranger est encourageante.
Madame la ministre, les membres du groupe RRDP voteront le projet de loi.