Intervention de Laurent Collet-Billon

Réunion du 4 avril 2013 à 10h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Laurent Collet-Billon, délégué général pour l'armement :

Les programmes d'armement en coopération occupent maintenant une place importante dans notre politique d'acquisition d'équipements militaires, notre principal partenaire en la matière étant le Royaume-Uni. Les investissements réalisés en coopération représentent, ainsi, environ 30 % du total de nos investissements dans l'armement, hors force de dissuasion.

Le champ des coopérations n'est pas limité et permet une gestion plus économique d'un argent public devenu rare. Mais la coopération exige des concessions et provoque parfois des frustrations.

Le flux annuel de paiements correspondants s'élève à environ 1,5 milliard d'euros, inscrits au programme 146 (Équipement des forces) de la mission Défense. Il est confié, pour 1,3 milliard, à l'Organisation conjointe pour la conduite des programmes d'armement en Europe (OCCAr) et, pour le reste, à la NAHEMA, l'agence de l'OTAN chargée de la conduite du programme d'hélicoptères NH90. Quelque 17 à 18 % de nos paiements s'effectuent dans le domaine de la recherche et de la technologie (R&T). Les quelques grands exemples de coopération sont : l'A400M, le Tigre, le NH90, le système de défense antiaérienne Météor.

Après le traité de Lancaster House de 2010, qui comportent un volet nucléaire, la coopération avec le Royaume-Uni continue de progresser. Nous collaborons aussi avec d'autres pays, notamment ceux du triangle de Weimar, spécialement la Pologne.

Une réunion commune des ministres de la défense des différents ensembles régionaux européens s'est tenue récemment. La transparence progresse, les malentendus s'estompent.

La coopération multilatérale se pratique d'abord dans le cadre de l'OTAN. Elle porte sur la défense antimissile balistique et la gestion de l'espace de défense aérienne en mettant en commun des outils de communication et de contrôle. Elle s'exerce ensuite au sein de l'Agence européenne de défense (AED).

Seule la coopération nous permet d'accéder à un certain nombre de capacités, qui seraient impossibles à développer seuls en raison de leur coût de recherche et développement. C'est le cas, par exemple, pour l'A400M.

Notre collaboration avec le Royaume-Uni porte non seulement sur les équipements mais aussi sur les technologies. Nous travaillons ensemble à un missile antinavire léger (ANL), à un système de lutte antimines qui remplacera nos vieux chasseurs de mines, à des drones tactiques – dont le contrat fut signé à la fin de 2012 et qui font maintenant l'objet d'une évaluation à Istres – à des drones de combat, à un démonstrateur de guerre des mines, à la rationalisation industrielle des missiles présents des deux côtés de la Manche et à la qualification de petits équipements.

L'Italie représente un autre partenaire historique : dans le domaine maritime, avec les frégates multi-missions et Horizon ; dans le domaine spatial, avec le programme Hélios ; pour le développement des missiles sol-air Aster 15 et 30, utilisés par l'armée de terre comme par la marine ; enfin dans le domaine électronique avec la radio tactique.

La coopération avec l'Allemagne constitue un champ d'espoirs. Les réalisations tardent mais nous discutons de l'observation de la terre, des drones MALE, des systèmes terrestres…

Le démonstrateur de drone de combat nEUROn donne lieu à un mode de coopération particulier. Nous avons demandé à Dassault Aviation, tout en conservant 50 % des parts, de réunir des industriels européens qui devront eux-mêmes motiver leurs gouvernements, ce qui a donné de bons résultats. Le premier nEUROn a ainsi volé à la fin de l'année dernière et ouvre d'importantes perspectives.

La réduction générale des budgets militaires en Europe conduit à une diminution des programmes en coopération. Les ajustements financiers ont été assez forts dans certains pays. Même les Britanniques ont procédé à quelques coupes. L'Espagne a quasiment disparu du champ des discussions, sauf sur quelques sujets marginaux. La collaboration s'est également restreinte avec l'Italie. L'Allemagne, engagée très tôt dans une politique de résorption du déficit budgétaire, a sauvegardé son effort de défense tout en se montrant très prudente à l'égard de la coopération, du fait de la professionnalisation de son armée et de l'attente des prochaines élections générales.

Redynamiser la politique de coopération exige de regarder au-delà de l'Europe. Hormis la Russie et la Chine, qui annoncent régulièrement de très grands programmes d'armement, et avec lesquels il sera difficile de collaborer au-delà des bâtiments de projection et de commandement (BPC), des pays émergents se lancent aujourd'hui dans d'importants efforts de défense : la Malaisie a accru son budget militaire de 20 % entre 2010 et 2011, l'Inde de 13 %, la Corée du Sud de 10 % et le Brésil de 9 %. Ces pays, traditionnels clients pour nos exportations, vont devenir des partenaires dans un nouveau type de coopération. Ils demandent en effet des transferts de technologies en échange de l'adoption de matériels français, ce qui doit nous inciter à investir massivement dans l'innovation, faute de quoi nous serions évincés du paysage.

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