Intervention de Catherine Coutelle

Réunion du 24 avril 2013 à 13h45
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Coutelle, présidente :

Je vous remercie pour ce travail qui permet d'aborder beaucoup de sujets importants.

Celui de la place des jeunes filles dans les filières scientifiques, et donc ensuite des femmes dans les carrières scientifiques, est important. Je souligne que la ministre de l'Enseignement supérieur et de la recherche, Mme Geneviève Fioraso, a souhaité améliorer l'information des étudiants en licence, afin qu'ils accèdent à des orientations plus diverses et adaptées à leurs capacités, ce qui n'est pas le cas si les jeunes filles « s'autolimitent » dans leur ambition et leurs choix.

Vous abordez dans votre rapport une autre question : celle de la stricte prise en compte des quatre dernières années d'enseignement et de recherche pour la constitution d'un dossier de demande de prime ou de promotion. Cette règle est critiquée à juste titre car elle désavantage les femmes ayant eu un ou plusieurs enfants pendant les années sur lesquelles porte l'évaluation. Il faut apporter un dispositif correcteur, en ajoutant à la période d'évaluation la durée du congé de maternité ou parental pris par le salarié. La période d'évaluation de l'activité sera alors prolongée, permettant de rétablir une égalité pour la femme qui aura cessé son activité et donc, par exemple, moins publié.

La question de l'accueil des enfants en bas âge des personnels des établissements d'enseignement supérieur et éventuellement des personnes en formation est pertinente ; toutefois, il faut prendre en considération le fait que ces établissements ne sont pas ouverts toute l'année. Créer ce genre de lieux d'accueil de la petite enfance auprès des universités serait une bonne chose, si l'on peut trouver la solution qui permettra l'emploi de leurs personnels toute l'année et une bonne utilisation des investissements réalisés, qui ne seront pas négligeables.

Je souligne enfin que la loi la loi du 12 mars 2012, « dite loi Sauvadet », relative notamment à la lutte contre les discriminations dans la fonction publique, sera applicable aux universités, qui devraient donc être soumises à l'obligation d'établir un rapport de situation comparée. Il sera intéressant de préciser à qui ce rapport devra être adressé et qui va contrôler la mise en oeuvre de l'égalité dans ces établissements. Il s'agira en tout cas d'un outil à la disposition des chargés de mission Égalité nommés dans les établissements.

La Délégation adopte le rapport de M. Sébastien Denaja ainsi que les recommandations suivantes :

1) Élaborer des statistiques nationales sur la place des femmes dans l'enseignement supérieur et la recherche.

Adresser une circulaire aux établissements d'enseignement supérieur et de recherche demandant la mise à disposition de données relatives à la répartition entre les sexes des postes de chercheur et d'enseignant-chercheur, aux différents stades de la carrière. Ces données doivent être disponibles pour les personnels et les usagers des établissements, et transmises au ministère pour l'élaboration des statistiques nationales.

2) Favoriser l'orientation des jeunes femmes vers les carrières scientifiques et en particulier vers les disciplines où elles sont encore très minoritaires.

Dans cet objectif, prévoir, dans les cahiers des charges des médias publics, la diffusion d'émissions scientifiques, impliquant des acteurs du monde de l'enseignement supérieur et de la recherche, et tendant à respecter la parité femmeshommes parmi les intervenants.

3) Le ministère de l'Éducation nationale doit veiller à l'égalité d'accès aux internats des classes préparatoires afin d'assurer l'égalité des chances et éliminer les obstacles pouvant freiner la réussite des jeunes filles.

4) Les établissements d'enseignement et de recherche, sous la direction de leur président (e), doivent élaborer un plan d'action Égalitéparité pour l'établissement, déclinant notamment le plan d'action pour l'égalité élaboré par le ministère de l'Enseignement supérieur et de la recherche en 2012.

5) Les établissements d'enseignement supérieur et de recherche doivent nommer un (e) chargé (e) de mission Égalité, dont la mission sera de mettre en oeuvre la charte pour l'égalité signée le 29 janvier 2013, de définir avec le (la) président (e) de l'établissement une politique de l'établissement et d'en suivre la mise en oeuvre.

La loi doit préciser les éléments essentiels de sa mission de même que les moyens d'information et d'action dont il ou elle dispose.

6) Prévoir dans la loi qu'il appartient aux établissements d'enseignement supérieur de mener une action contre les stéréotypes sexués, tant dans les enseignements que dans les différents aspects de la vie de la communauté éducative.

7) Inciter les universités à construire des licences comportant des modules obligatoires sur le genre, ancrés dans les disciplines ou pluridisciplinaires.

Prévoir une formation obligatoire sur l'égalité entre les sexes et les stéréotypes de genre dans la formation des enseignants, de la maternelle au supérieur.

8) Assurer la parité au sein du conseil d'administration et du conseil académique des établissements d'enseignement supérieur et de recherche.

Pour cela, s'assurer que le mode de désignation des personnalités extérieures membres de ces deux conseils garantisse cette parité.

Les modalités de désignation peuvent s'inspirer par exemple du mécanisme de tirage au sort prévu pour la constitution du Haut conseil des finances publiques.

9) La loi prévoit la parité parmi les vice-présidents, ou au sein des bureaux des organes de gouvernance des établissements d'enseignement publics à caractère scientifique, culturel et professionnel.

10) Le bureau de l'établissement d'enseignement supérieur doit veiller à la composition paritaire de la commission gérant le Fonds de solidarité et de développement des initiatives étudiantes (FSDIE).

11) Dresser le bilan, deux ans après l'entrée en vigueur de la loi, de son application et de son résultat en ce qui concerne la composition paritaire des conseils d'établissement.

12) Veiller à respecter la parité sein des conseils et des comités de sélection des agences nationales de financement de la recherche.

13) La composition paritaire du CNESER est affirmée par le projet de loi. Il convient de s'assurer que les modalités d'application traduisent cette parité, et en particulier que le décret d'application à venir prévoie la nomination paritaire des représentants des grands intérêts nationaux par le ministre de l'Enseignement supérieur.

14) La composition du conseil d'orientation scientifique du Haut conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur doit respecter le principe de la parité entre femmes et hommes.

15) Les comités de sélection des universités et des grandes écoles doivent être composés de manière paritaire.

16) Prévoir un dispositif correcteur pour éviter la discrimination, dans le cadre de l'évaluation préalable à une promotion ou une demande de prime, envers les femmes ayant eu des enfants au cours des quatre dernières années, en ajoutant la durée du congé intervenu pendant la période.

17) Développer un accueil de la petite enfance au sein de l'université. Le plan d'action Égalitéparité de l'établissement pourrait créer les conditions de l'ouverture d'une crèche sur son emprise territoriale à destination des personnels, mais aussi des usagers ayant des enfants en bas âge.

18) Faire figurer, au sein du projet annuel de performances accompagnant la présentation du projet de loi de finances, un objectif de parité entre les femmes et les hommes dans les instances de recrutement des établissements et un objectif d'égalité entre les femmes et les hommes dans le déroulement des carrières.

19) Réformer la procédure disciplinaire applicable aux plaintes portant sur des violences, des situations de harcèlement ou de discrimination.

Á cette fin il y a lieu de permettre la saisine de la section disciplinaire par, outre le président de l'établissement, une autre autorité, qui pourrait être, par délégation du président, le (la) chargé (e) de mission Égalité au sein de l'établissement.

La section disciplinaire doit être composée de manière paritaire entre les femmes et les hommes. Les personnes chargées de l'instruction des faits ne doivent pas participer au jugement du conflit. La possibilité d'appel auprès de l'instance nationale doit être ouverte au plaignant, ainsi qu'au chargé de mission Égalité.

20) En coordination avec le (la) chargé (e) de mission, mettre en place, dans les établissements d'enseignement supérieur et de recherche, une cellule de veille et d'information sur les discriminations, les violences et le harcèlement sexuel, ou au moins, désigner une personne référente pour informer et orienter les victimes et les témoins.

21) Les personnels des établissements doivent se voir remettre un document d'information spécifique relatif au harcèlement sexuel, comportant au moins la définition de ce délit, les peines encourues et les voies de saisine de la section disciplinaire compétente.

Ces informations doivent être accessibles sur les sites Internet des établissements et faire l'objet d'un encart dans les documents de présentation générale des droits et devoirs des étudiants.

La séance est levée à 15 h 15.

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