L'ADEME est en train d'achever la construction d'un scénario à deux horizons, 2030 et 2050, sur la demande en énergie et la question de la production d'énergie renouvelable. Ce n'est pas un scénario bâtiment isolé du reste, mais je vais faire un petit extrait le concernant.
Dans la méthodologie générale, sur l'horizon 2030, la méthode utilisée est celle de l'utilisation des données d'aujourd'hui avec des technologies à notre portée, sans bouleversement majeur ou changement radical de notre mode de vie, avec un minimum de volontarisme. Pour le scénario 2050 il s'agit d'une vision normative, où l'on va chercher l'objectif du facteur 4 pour les émissions de gaz à effet de serre, en vérifiant que l'on peut trouver un chemin réaliste. Ce scénario est tous secteurs. Il s'est attaché au bâtiment, l'industrie, les transports, l'agriculture, et vérifie la cohérence entre les différents secteurs. Sur les hypothèses démographiques et économiques, donc croissance, taille des ménages, etc., nous avons repris les hypothèses de l'INSEE, du ministère, du Centre d'analyse stratégique, ou de l'Agence de l'énergie pour les prix de l'énergie à l'importation.
Sur les principales hypothèses 2030, nous sommes sur un rythme de construction en résidentiel à 350 000 par an, pour 310 000 aujourd'hui. Il y a des fluctuations très importantes bien entendu. Sur le tertiaire nous maintenons les surfaces par employé actif.
Nous n'avons pas regardé les questions de sobriété, très importantes comme on l'a rappelé. Sur les comportements, en particulier les consommations de chauffage et d'eau chaude, nous n'avons pas diminué le nombre de douches ni réduit les températures intérieures. Sur l'enveloppe thermique, nous sommes sur un scénario à 500 000 rénovations thermiques en moyenne par an, détaillées par type de parc, âge du parc, pour considérer les choses de manière précise. Sur les équipements de la maison ou de l'appartement, nous avons fait un certain nombre d'hypothèses en prolongeant des constats que l'on peut faire aujourd'hui. Sur le chauffage, nous arrivons en 2030 à une hypothèse de 20 % de pompes à chaleur, avec des coefficients de performance améliorés à 4 par rapport à 3 aujourd'hui, donc un taux de pénétration équivalent à celui des chaudières à condensation ; pour l'eau chaude nous tablons sur une avancée des chauffe-eau thermodynamiques, 10 % de chauffe-eau solaires. Nous prévoyons une augmentation des consommations liées à la climatisation car la présence des pompes à chaleur a cet effet-rebond, et ceci dans le cadre d'un réchauffement, d'une augmentation des températures ambiantes. Sur les équipements spécifiques, nous avons pris l'hypothèse qu'en 2030 l'équipement moyen correspondrait à ce que l'on fait de mieux aujourd'hui. Par contre, il y a une augmentation du niveau des équipements, ce qui fait que ce poste reste stable.
Sur l'organisation urbaine: nous avons aujourd'hui un parc composé de 58 % de maisons individuelles, et de 48 % de logements collectifs. En 2030 nous considérons un équilibre entre les deux.
Cela donne le résultat suivant : une baisse en millions de TEP de 44 à 32 sur le résidentiel, de 22 à 18 sur le tertiaire, donc globalement une baisse de 23 %. Sur le scénario 2050, nous sommes à un rythme de 300 000 constructions neuves en moyenne par an. Sur le tertiaire, nous avons intégré une baisse de 20 % des surfaces par employé en intégrant la question du télétravail, et la pression sur le foncier : il sera procédé nécessairement à plus d'efforts qu'aujourd'hui sur la consommation de surface.
En termes d'enveloppe des bâtiments, à partir de 2020 le parc neuf aura un niveau de performance très élevé. Nous sommes en moyenne sur le parc rénové à 130 kWh tous usages, et sur le parc neuf à 100 kWh tous usages, en conservant dans ce tous usages 50 kWh d'usages spécifiques, domaine assez difficile à considérer à long terme. Nous avons donc fait le choix de la progression de l'efficacité des équipements, mais aussi de l'augmentation des usages.
Nous arrivons à 50 % de pompes à chaleur en matière de chauffage, un taux important sur les systèmes hybrides, la micro-cogénération, 50 % de chauffe-eau thermodynamiques, 20 % de chauffe-eau solaires, et une augmentation forte de la climatisation, encore plus accentuée par rapport à 2030, avec une multiplication par 6 des consommations par rapport à aujourd'hui. Pour l'organisation urbaine, nous sommes basculés à 40 % de maisons individuelles et 60 % de logements collectifs dans la construction neuve.
Le résultat est le suivant avec la perspective de 2010 à 2050 : nous arrivons pour le résidentiel à 22 millions de TEP, sur le tertiaire à 15 millions, donc au total sur le bâtiment nous passons de 66 en 2010 à 37 en 2050. Une division pas tout à fait par 2.
Je ne détaille pas la répartition des vecteurs énergétiques à 2050. Ce qui est important: de 151 millions de TEP en 2010, nous passons à 123 en 2030 et à 82 en 2050. C'est en gros une division par 2 de l'énergie. Mais sur les gaz à effet de serre, la référence étant 525 en 1990, nous passons à 313 en 2030 et à 131 en 2050. Nous avons donc bien le facteur 4 sur ces émissions.
Sur les éléments financiers, très sommairement, le bâtiment aujourd'hui représente 140 milliards d'euros par an, construction plus rénovation, résidentiel et tertiaire. La répartition est de 55 pour le tertiaire et 85 pour le résidentiel, qui représente 43 milliards de constructions et 42 milliards de rénovation, dont 27 d'entretien-amélioration, et une quinzaine ayant un impact énergétique. Sur cette quinzaine, il n'y en a que deux ayant un impact énergétique réel, dans la gamme de ce que l'on cherche à faire dans notre dénomination appelée « 3 étoiles », avec une réelle efficacité.
Les 42 milliards de rénovation concernent chaque année à peu près 8 millions de logements. Il s'agit donc de petits travaux, de l'ordre de 5000 euros par opération, alors que les « 3 étoiles » concernent 100 000 - 135 000 logements par an, sur des opérations d'un coût d'à peu près 15 000 euros. C'est bien ce type de rénovation qu'il faut multiplier par trois si l'on veut arriver aux 500 000. Nous avons donc à réorienter des sommes déjà investies vers des travaux plus efficaces en matière énergétique : il ne s'agit pas forcément, en intégralité, d'argent en plus. Comme ordre de grandeur, Olivier Sidler parlait tout à l'heure de 18 milliards. Nous sommes plutôt autour d'une dizaine de milliards, la question des prix unitaires étant un sujet en elle-même.
Il nous restera à faire le travail en termes d'impact macroéconomique et sur les emplois.
Les dispositifs opérationnels