Intervention de Etienne Crépon

Réunion du 4 avril 2013 à 9h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Etienne Crépon, directeur de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages, DHUP :

Le secteur de la construction est complexe, et fait appel à de multiples intervenants, maître d'ouvrage, maître d'oeuvre, contrôleurs techniques, assureurs. Tout l'enjeu est de faire en sorte que l'ensemble des partenaires fassent un produit innovant, aient confiance en lui et soient d'accord pour l'utiliser. Un certain nombre d'expériences, ou de tentatives d'expériences, se sont concrétisées par de véritables réussites, d'autres par un total échec.

Dans le secteur de la construction, les matériaux, à rebours d'autres produits de consommation, sont utilisés pour de très longues durées puisqu'ils sont intégrés aux bâtiments, et peuvent avoir des impacts sur la sécurité et la sûreté des gens, qui peuvent être dramatiques. Nous avons connu par le passé des exemples douloureux sur le sujet. Tout ceci a conduit à mettre en place des grands principes sur l'encadrement des produits mis sur le marché. Pour les produits standards, l'application du système européen avec marquage CE, permet de mettre le produit en commercialisation. Pour les produits innovants, et nous en venons au coeur du sujet de la table ronde, il existe quatre dispositifs : un agrément technique européen, pour avoir le marquage CE, un avis technique reconnu par les pouvoirs publics, d'autres procédures du type certification volontaire ou Pass'innovation, et enfin une possibilité d'auto-déclaration des performances. Tout l'enjeu est de savoir parmi ces quatre scénarios, quels sont ceux qui sont reconnus par l'ensemble des acteurs de la construction, car je le redis, le processus de construction d'un bâtiment est partagé par de multiples acteurs, l'objectif étant que l'ensemble de ces acteurs aient le degré de confiance suffisant pour faire appel à ce produit innovant.

Un regard rapide sur les avis techniques : ils sont délivrés par une commission indépendante, chargée de formuler les avis techniques, mise en place auprès du ministre chargé de la construction, mais qui prend ses décisions en toute indépendance. Elle est présidée par un membre du Conseil général de l'environnement et du développement durable. Elle rassemble l'ensemble des acteurs du bâtiment, architectes, maîtres d'ouvrages publics et privés, les entreprises, les artisans, les fabricants des filières traditionnelles, et depuis peu les fabricants des filières biosourcées, et les assureurs. Sur la base de référentiels techniques, elle émet ses avis après expertise collégiale effectuée par des groupes spécialisés. C'est un opérateur de l'État, le Centre scientifique et technique du bâtiment, qui assure le secrétariat des groupes spécialisés et la gestion de la procédure.

Depuis sa mise en place il y a quarante ans environ, le bilan de la procédure des avis techniques montre qu'il y a eu 20 000 avis techniques délivrés. Cela correspond à la délivrance de 2 avis techniques par jour ouvrable. Ils ont été un levier de développement pour les entreprises innovantes, pour leur permettre d'accéder au marché en bénéficiant par cet avis indépendant de la confiance de l'ensemble des partenaires de l'acte de construire.

Cela dit, cette procédure quarantenaire des avis techniques méritait un ravalement pour reprendre une expression de la précédente table ronde, qui a amené le ministère et la direction que l'ai l'honneur de diriger à élaborer un plan d'amélioration des avis techniques autour de quatre mesures essentielles, avec plusieurs objectifs : accroitre la transparence des décisions, accélérer le processus de décision, et faciliter l'accès des TPE et des PME aux avis techniques. Il est clair que la procédure, dans sa complexité, pouvait constituer une barrière à l'entrée pour certaines entreprises innovantes. Ce plan de modernisation a été lancé dans le courant de l'année dernière, nous n'en avons pas encore tous les effets, les 14 mesures ne sont pas toutes opérationnelle, certaines sont encore en phase d'élaboration, mais les premiers résultats constatés sont une réduction des délais d'instructions, divisés par deux et ramenés à 9 mois, une réduction des frais d'instruction pour les PME primo-accédantes dans le dispositif, la mise en place d'un médiateur indépendant des avis techniques, magistrat de la Cour des comptes, et la nomination, je l'ai évoqué tout à l'heure, d'un représentant des filières biosourcées, et d'un représentant des énergies renouvelables au sein de la commission.

Le Pass'innovation, procédure lancée dans le cadre du Grenelle de l'environnement, était une sorte de pseudo-avis technique, car purement déclaratif, et n'avait pas cette procédure d'évaluation collégiale. Force est de constater que c'est un flop total. Le nombre de Pass'innovation sur trois ans se chiffre à quelques centaines, à comparer avec le nombre d'avis techniques que nous délivrons. La collégialité, le niveau d'expertise approfondi qu'il y a dans les avis techniques apparaît comme étant la condition sine qua non pour rassurer l'ensemble des acteurs du marché.

Sur la prise en compte des innovations dans la règlementation thermique 2012, le dispositif interne à l'administration est le titre V, qui est une possibilité de prendre en compte de nouveaux dispositifs pour répondre à la règlementation thermique. Il y avait des titres V dans la règlementation thermique 2005, il y en a pour celle de 2012. Ils peuvent être à l'échelle d'une opération, ou d'un système, c'est-à-dire d'un produit, ou d'un système énergétique, ou au niveau d'un réseau de chaleur. Nous sommes à chaque fois sur un dispositif d'évaluation collégiale par des experts désignés par le ministère, et une décision prise par le ministre en charge de la construction, et par délégation, par votre serviteur.

Si l'on fait un bilan de la procédure titre V, nous sommes à 160 opérations agrées, 40 systèmes, 7 réseaux de chaleur. De la même manière que nous avions lancé l'an dernier un processus d'évaluation et de modernisation des avis techniques, les ministres nous ont demandé de lancer un processus d'évaluation et de modernisation des procédures de titre V.

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