Intervention de Philippe Haim

Réunion du 4 avril 2013 à 9h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Philippe Haim, chef du pôle efficacité énergétique GDF SUEZ énergie France :

Sans nier les difficultés qui ont pu être abordées, je vais essayer de donner une note d'optimisme en regardant le verre à moitié plein. La RT 2012 a permis de faire un grand bond en avant. Nous avons cité 50 kWh par mètre carré et par an. C'est une division par trois par rapport à la précédente règlementation, et aucune règlementation antérieure n'avait permis de franchir un tel saut. Nous l'avons vu, les premiers retours d'expérience sont positifs et c'est heureux.

Il me semble néanmoins qu'il y a peut-être un sujet non estimé à sa juste valeur, celui de l'apprentissage par le ménage de l'utilisation de son logement, et plus largement de sa relation à la performance énergétique et à l'énergie au sens large. C'est un point à étudier dans le futur.

Pour revenir à la question posée, de mon point de vue il est clair que la RT 2012, qui est en rupture par rapport à la précédente règlementation, a conduit les industriels à innover, comme rarement dans le passé. C'est vrai, la règlementation thermique a stimulé l'innovation, et je voudrais pour vous en convaincre citer quatre exemples.

Le premier est la chaudière à condensation. Il est encore possible d'innover avec la chaudière à condensation, notamment avec celles à très forte modulation de puissance. Il existe des systèmes aujourd'hui pouvant descendre très bas en puissance, jusqu'à 800 W, pour les très faibles besoins de chaleur des logements, et monter à 12 ou 24 kW pour la production d'eau chaude sanitaire, qui, elle, a besoin de puissance. Cela découle directement de la RT 2012.

La chaudière hybride gaz naturel, monsieur François l'a évoqué tout à l'heure, est un système intégré qui combine une chaudière à condensation et une pompe à chaleur électrique. Ce système permet de disposer du meilleur de chacune des technologies à tout moment de l'année. En mi-saison la pompe va fonctionner, en hiver elle va laisser la main à la chaudière à condensation. Un avantage supplémentaire qui n'est pas indifférent, c'est qu'un tel système ne dégrade pas la pointe électrique saisonnière, que la France connait et dont on a parlé un peu tout à l'heure.

Un autre produit prend tout son sens dans le logement fortement isolé et limite la pointe électrique, est la micro-cogénération, encore assez chère, mais qui commence à être commercialisée et devrait se développer dans les années à venir.

Le chauffe-eau thermodynamique également, que l'on ne connaissait pas il y a trois-quatre ans, découle directement de cette nouvelle règlementation thermique, de même que les systèmes solaires individuels, pour lesquels les industriels font encore beaucoup d'efforts d'innovation afin d'en réduire les coûts.

Je ne vais pas m'étendre sur la roadmap (feuille de route) technologique qui donne une vision partagée entre GDF SUEZ et Uniclima, le syndicat des fabricants de matériel de chauffage et de climatisation, à l'horizon 2030.

Il y a un bénéfice collatéral de la RT 2012; ces innovations qui en sont issues, profiteront directement au marché de la rénovation thermique du parc existant dont la dynamique ne permet pas aux industriels d'innover et de proposer de nouveaux produits.

Il y a un mais, il faut aussi le dire. Ces innovations technologiques qui commencent à être commercialisées, ont besoin de trouver leur place sur le marché. Il y a long entre l'innovation et le produit standard sur le marché, et les industriels ont besoin de stabilité règlementaire, de visibilité pour que ces produits puissent un jour devenir des succès commerciaux et des produits courants.

Je voudrais terminer mon propos sur un point qui a été évoqué par le premier intervenant, monsieur Sidler : le poste de consommation d'électricité spécifique. Il me semble que l'enjeu principal pour les années qui viennent, c'est ce poste. On a donné des chiffres, je crois qu'un dessin vaut mieux qu'un long discours. Vous avez sur ce graphe représentés en partant du bas les postes de consommation d'un logement type existant ; au-dessus un logement rénové au label BBC rénovation ; au-dessus, au label RT 2012 ; et au-dessus, au niveau RT 2020, que l'on pourrait faire correspondre au label très haute performance énergétique. Le constat est flagrant. Il faut travailler pour les années qui viennent sur le poste jaune, qui correspond à la consommation d'électricité spécifique, et moins sur les postes chauffage et eau chaude sanitaire sur lesquels vous voyez qu'il n'y a plus grand-chose à gagner. Les investissements nécessaires devraient plutôt porter sur le poste d'électricité spécifique. Il y a deux façons de faire. La première est de trouver une règlementation qui arrive à maîtriser ces consommations d'électricité spécifique, mais en accompagnant les ménages dans leur relation à la performance, et la seconde en valorisant toutes les solutions performantes de production décentralisée d'électricité.

Débat

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