Intervention de Arie Arnon

Réunion du 15 mai 2013 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Arie Arnon, professeur au département d'économie de l'Université Ben Gourion du Néguev et coordonnateur israélien du groupe d'Aix :

Merci de l'occasion que vous nous donnez de présenter nos positions.

Cela fait des années que nous travaillons, ce qui montre que nous voulons aller de l'avant, mais aussi que nous n'avons pas encore de solution aux problèmes auxquels nous faisons face. Le groupe d'Aix a été mis en place en s'appuyant sur l'idée, économique et politique, de l'absence de partenaire de l'autre côté. Cette idée s'est renforcée dans l'opinion publique mais aussi parmi les responsables politiques.

Le statu quo, qui prévaut depuis 1967 et surtout 1993-1994 avec le début des accords d'Oslo et la signature du protocole de Paris – lesquels ont défini les relations politiques et économiques entre Israéliens et Palestiniens –, va à l'encontre de leurs intérêts respectifs.

Notre objectif est de trouver un compromis politique entre eux, mais aussi d'en définir les contours économiques, ce qui n'est pas facile. Je vous renvoie aux détails de nos travaux, notamment sur la solution des deux États, qui soulève un certain nombre de problèmes. Le protocole de Paris a institué une union économique, un peu à l'image de celle qui existe en Europe, mais il s'agit d'un arrangement imposé. Bien que les Palestiniens étaient d'accord à ce sujet, il ne devait durer que cinq ans et être remplacé ensuite par un dispositif permanent, lequel n'a malheureusement jamais vu le jour.

Nous essayons de sortir de cette impasse en promouvant un nouveau régime économique. S'il y a aujourd'hui une Autorité palestinienne, elle n'a pas le pouvoir de définir des politiques économiques, commerciales, monétaires, et, sur les questions budgétaires et fiscales, ses prérogatives sont très limitées.

Le statu quo serait désastreux à plusieurs égards. Il risquerait de conduire les deux parties à poursuivre leur affrontement.

Je rappelle que l'économie palestinienne est très inférieure à celle d'Israël : son PIB représente à peine 5 % de celui de ce dernier et elle enregistre un niveau de vie bien plus faible. La Palestine est donc très dépendante de lui, ce qui n'est pas sain pour établir des relations de qualité entre eux. Israël collecte une grande partie des revenus fiscaux des autorités palestiniennes et, lorsque nous avons des conflits, il opère des retenues sur le transfert. Cette situation doit évoluer, en transférant par exemple le contrôle des douanes aux Palestiniens eux-mêmes.

Israël met en place sur le terrain des mesures visant à faire de la Cisjordanie une partie intégrante de sa politique. Aujourd'hui, plus de 500 000 Israéliens juifs vivent dans les territoires occupés et, à ce rythme, ils seront bientôt un million. Une solution à deux États deviendrait alors impossible et nous ne pourrions pas obtenir de voie politique satisfaisante pour les deux parties.

Les alternatives qui ont été proposées sont à mon sens bien pires que la solution à deux États. Nous estimons que la communauté internationale, notamment l'Union européenne, les États-Unis et la France, doit nous venir en aide. Je tire la sonnette d'alarme pour nos deux peuples. Nombre d'Israéliens affirment qu'ils soutiennent une telle solution : il faut donc aller de l'avant – la solution à un État présentant aussi des inconvénients – car c'est la dernière chance de la mettre en application avant que les faits sur le terrain n'évoluent complètement.

Nous suggérons que les deux parties renouvellent les négociations économiques et que l'économie palestinienne soit un territoire douanier séparé. Si nous avons une solution à deux États, les Palestiniens devront développer la vallée du Jourdain pour avoir plus de ressources en eau, et permettre qu'il y ait des liens entre la Cisjordanie et la bande de Gaza : ils doivent pouvoir se déplacer librement de l'une à l'autre sans devoir traverser des lignes israéliennes. Nous devons planifier tout cela dès aujourd'hui car nous aurons besoin de temps pour le mettre en oeuvre. Beaucoup de détails doivent encore être réglés.

Nous ne pensons donc pas, comme certains, que cette solution, qui est la meilleure d'un point de vue moral, économique et politique, n'est plus possible : c'est une question de volonté. L'Europe doit prendre position à cet égard.

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