Intervention de Cécile Duflot

Séance en hémicycle du 21 mai 2013 à 21h30
Autorisation de légiférer pour accélérer les projets de construction — Article 1er

Cécile Duflot, ministre :

Il n'y avait aucune ironie dans mon propos, et je rends hommage aux parlementaires qui demeurent présents tout au long de la séance. Nous allons passer une soirée ensemble, et je vais vous répondre de manière précise.

Monsieur Boisserie, l'objectif du Gouvernement est de mettre fin à la garantie intrinsèque lorsque les opérations en VEFA sont l'oeuvre d'opérateurs susceptibles de faire faillite, ce qui n'est pas le cas des collectivités locales. Aussi ne suis-je pas certaine de comprendre à quel type d'opérations vous faites référence. Néanmoins, j'insiste sur le fait que la position du Gouvernement consiste à mettre fin à la garantie intrinsèque pour des opérateurs susceptibles de faillite.

Vous m'avez interrogée sur le dispositif de défiscalisation. J'ai longuement expliqué la raison pour laquelle il convient de limiter les zones sur lesquelles ce dispositif pouvait être opérant : des résultats insatisfaisants ont en effet été observés dans certaines communes, où des propriétaires de logements éligibles au dispositif n'arrivent pas à louer leur bien et ne peuvent donc bénéficier de la réduction d'impôt. Je rappelle que la dérogation est possible après instruction du préfet et pour répondre à des cas particuliers concernant des logements situés dans une ville de la zone B2 qui serait éligible au droit jusqu'au 30 juin 2013.

M. Cinieri a évoqué trois sujets. S'agissant tout d'abord de la TVA, nous avons décidé – le Président de la République l'a annoncé – de faire passer son taux de 10 % à 5 % pour la construction et la rénovation de logements sociaux dès le 1er janvier 2014. Ensuite, j'ai déjà répondu au sujet de la suppression de la majoration uniforme de 30 % des droits à construire : il y a une différence entre imposer aux collectivités locales un dispositif sauf pour elles à délibérer dans le sens contraire, et leur permettre de prendre, si elles le veulent, des mesures de densification complémentaires ou de dérogations aux règles de stationnement, sans avoir besoin de réviser leur PLU.

M. Cinieri a enfin évoqué le dossier des ascenseurs. Je tiens à la disposition de ceux qui seraient intéressés des éléments beaucoup plus précis. Ce dossier complexe mérite une attention aiguë, et c'est ce qui nous a conduits à décider à la fois du report d'un an de la date d'échéance de la deuxième phase des travaux de modernisation – les travaux concernés ne portent pas sur des équipements essentiels pour la sécurité des utilisateurs – et du moratoire sur le dispositif de précision d'arrêt. Ce dernier fait peser des dépenses très importantes sur les copropriétés alors que son efficacité immédiate n'a pas été démontrée avec certitude. Il fait donc l'objet d'une évaluation.

Monsieur Pupponi, vous avez mentionné la question du logement intermédiaire. Nous aurons sans doute l'occasion de revenir sur le sujet lors de la discussion des amendements. Je le répète : la vigilance du Gouvernement est constante sur ce point.

Madame Andrieux, vous avez souligné l'efficacité de la procédure intégrée, qui permet aux collectivités locales de fusionner les délais et les dispositions applicables plutôt que de les additionner. C'est tout le sens de ce travail : simplifier, clarifier les procédures sans remettre en cause les démarches engagées, afin de faciliter les opérations qui nécessitent une rapidité d'action.

Monsieur Bies, vous avez salué le pragmatisme et le consensus relatifs autour de ces questions. C'est le travail engagé depuis le milieu du mois de décembre qui a donné lieu à un consensus sur certaines des mesures présentées aujourd'hui, lesquelles sont très largement soutenues. Il nous semblait nécessaire de les appliquer plus rapidement grâce à l'habilitation à légiférer par ordonnance. Pour certaines de ces dispositions, nous y gagnerons, car nous respecterons ainsi le temps parlementaire pour le débat sur le projet de loi dit « Duflot 2 ». Certaines des dispositions qui ont émergé de la préparation de ce projet de loi seront par conséquent mises en oeuvre avec sans doute un an d'avance.

Vous avez rappelé que la superficie des grandes aires urbaines a augmenté de plus de 39 %, faisant ainsi référence à la nécessité impérieuse de lutter contre l'artificialisation des sols. C'était un des grands objectifs du Grenelle, un objectif affiché, partagé, et notamment soutenu par le monde agricole. La perte de surfaces agricoles est très importante en France, l'un des pays européens les plus touchés par le phénomène, ainsi que Mme Bonneton l'avait rappelé tout à l'heure dans son intervention. Les bonnes intentions qui avaient été énoncées lors du Grenelle n'ayant pas permis de lutter efficacement contre celui-ci, nous aurons à travailler de manière approfondie sur le sujet dans le cadre du futur projet de loi.

Monsieur de la Verpillière, vous avez évoqué la question de la densité. Comme promis, en voici une illustration, avec une modélisation qui permet de comparer sur une même surface la densité d'une tour, de logements en R +3 et de logements d'un seul étage. Vous pouvez donc constater que la densité n'équivaut pas à la hauteur, contrairement à ce qui est communément admis. Puisque j'explique cela pour la deuxième fois, ma pédagogie progresse. (Sourires) Les dispositions que nous allons mettre en oeuvre permettront aux élus qui le souhaitent de s'approprier cette question et d'améliorer la qualité de vie en ville.

Madame Bareigts, vous avez évoqué à juste titre la question du logement outre-mer, qui est absolument centrale et très sensible. Avec mon collègue Victorin Lurel, nous y travaillons. Vous avez mentionné plus précisément la situation de La Réunion, qui est particulière, notamment au regard de la constructibilité sur l'île. Très sensibilisés sur ce dossier, nous réfléchissons aux dispositions spécifiques qui pourront être inscrites dans le prochain projet de loi afin d'apporter des réponses opérationnelles aux difficultés rencontrées par les habitants et les habitantes des outre-mer et, en particulier, de La Réunion.

Monsieur Liebgott, vous avez parlé de la situation des cités minières. Nous avons contribué à résoudre la difficulté s'agissant de la Soginorpa à l'occasion du débat sur le précédent projet de loi. Celle-ci gère le parc de logements des anciennes compagnies minières du Nord-Pas-de-Calais, qui présente toutes les caractéristiques du logement social sans en avoir le statut : il n'entrait pas dans le champ de la loi SRU et ne pouvait pas non plus bénéficier du financement des travaux de rénovation. Il me paraît tout à fait possible d'étudier la situation précise dans votre région pour, le cas échéant, adopter un dispositif législatif similaire dans le cadre du prochain projet de loi, car les questions qui se posent sont sans doute les mêmes que dans le Nord-Pas-de-Calais.

Monsieur Pancher, vous avez dit qu'il s'agissait d'un petit pas, et je vous en remercie. Vous avez également évoqué la contradiction apparente avec l'article 61 du projet de loi sur la consommation présenté par Benoît Hamon. J'ai déjà indiqué tout à l'heure que cet article concernait l'ensemble des secteurs. Bien entendu, dès que le nouveau projet de loi sur l'habitat sera adopté, nous mettrons en cohérence les dispositions des deux textes de loi sur le secteur spécifique de la construction, notamment concernant l'achat des matériaux.

Monsieur Mallé, vous avez souligné l'engagement très fort du Président de la République sur le dossier et vous avez raison. C'est à ce titre que nous avons pris des décrets en urgence dès l'été dernier, que nous avons présenté un premier projet de loi et pris un certain nombre de dispositions, notamment le plan de rénovation thermique, adopté il y a plus d'un moins déjà, et que nous travaillons aujourd'hui sur ce projet de loi d'habilitation. L'idée est bien de faire avancer les dossiers le plus rapidement possible, de penser le long terme – c'est l'objet du travail sur l'urbanisme, la ville dense et la lutte contre l'artificialisation des sols – tout en répondant de manière réactive aux situations de blocage d'un secteur qui souffre tout particulièrement de la crise.

Ces différents éléments me permettent de répondre également à votre interrogation, monsieur Chevrollier : il s'agit non pas de morceler mais d'aller plus vite sur des dispositions qui sont mûres, qui peuvent être appliquées beaucoup plus rapidement et qui sont nécessaires et attendues, tant par les collectivités locales que par le secteur de la construction.

Monsieur Poisson, j'ai pris bonne note de votre courrier. Nous avons déjà eu un débat sur la question que vous avez évoquée à l'occasion de l'examen du précédent projet de loi sur l'habitat. Je vous rappelle que la hausse de la proportion minimale de logements sociaux de 20 % à 25 % n'est pas automatique pour toutes les communes de plus de 3 500 habitants ou de plus de 1 500 habitants en Île-de-France. Elle concerne les seules communes en situation de tension au regard du logement social. Il n'est pas du tout prévu que la totalité des communes des Yvelines – je pense que c'est un département qui vous intéresse – soit concernée. Il ne s'agit pas non plus uniquement de constructions neuves : les dispositions permettant d'atteindre les objectifs en matière de logement locatif social peuvent passer par le conventionnement, notamment pour les bourgs-centres. Nous aurons l'occasion d'en reparler lors de la discussion du prochain projet de loi : la situation difficile d'un certain nombre de villes petites et moyennes nous interpellent. Il est absolument nécessaire de travailler sur la reconquête de leurs centres, notamment par le conventionnement de logements, qui sont alors comptabilisés au titre de la loi SRU.

Monsieur Le Ray, vous avez notamment évoqué les objectifs en matière de programme local de l'habitat. Ces derniers sont fixés librement par les collectivités locales dans le cadre de l'obligation légale des 25 %. Pour les communes qui le souhaitent, l'intégration au PLH d'objectifs en matière de logements intermédiaires permettra, grâce au départ du logement locatif social des ménages qui le peuvent, une meilleure fluidité entre les différents parcs de logements des communes ou des territoires. (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et SRC.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion