Au-delà, c'est la question politique, au sens large du terme, de la confiance accordée à la négociation collective qui est posée. L'ANI en est issu, en vertu de la loi Larcher, et il renvoie lui-même à une série d'accords : accords d'entreprises pour le maintien de l'emploi ou concernant la mobilité interne ; accords de branche pour le temps partiel notamment.
Le problème est de savoir si le renvoi de la question de la mobilité interne à la négociation constitue une garantie suffisante. Tel est le cas dans nombre de pays où les syndicats et les partenaires sociaux travaillent volontiers ensemble. En France, en revanche, le renvoi à la négociation n'est pas toujours considéré comme une garantie suffisante, d'où l'ajout de telle ou telle procédure dans la loi. Ce sujet est donc très sensible.
Je ne suis pas sûr que, dans le cadre d'un grand groupe, la négociation n'inclurait pas la question des micro-reclassements, des sites et des territoires. La complexité et la diversité des situations sont telles que l'on peut se demander, sur le plan des principes, dans quelle condition il est possible de poser des règles législatives générales. Il n'est pas question de considérer que la loi ne doit pas intervenir mais il faut trouver un équilibre assez délicat avec la négociation collective.
Le motif économique, quant à lui, ne relève pas du champ de la décision administrative. Juridiquement, il n'appartient pas à l'administration de se prononcer sur son existence ou non et si celle-ci justifie ou non l'organisation d'un PSE. En revanche, et c'est déjà beaucoup, le contrôle de proportionnalité implique qu'elle se prononce sur l'adaptation et la suffisance des mesures de reclassement eu égard à la situation économique. Même s'il faudra faire montre de vigilance, quel que soit le devenir des DRIRE, l'administration s'adaptera.
La question de l'organisation et des niveaux de compétences des DIRECCTE me paraît plus délicate que celle de leurs moyens. Les sujets les plus sensibles tels que la pénibilité ou l'égalité hommes-femmes relèvent à la fois du travail et de l'emploi alors que les pôles T et 3E sont distincts. Il n'est pas question d'une fusion générale mais nous devons parvenir à faire travailler les pôles ensemble.
Je ne répondrai pas directement sur le problème des licenciements diffus mais nous savons combien il est difficile d'avoir une approche globale des ruptures conventionnelles, homologuées ou non par l'administration. J'ai signé des circulaires précisant que ces dernières n'ont pas pour vocation de détourner les règles relatives aux licenciements. L'administration vérifie que leur multiplication ne masquerait pas la volonté de contourner d'agir de la sorte. Jusqu'ici, une telle vérification était possible si tous les licenciements avaient lieu, par exemple, en Rhône-Alpes mais, en cas de licenciements diffus, nous ne disposions pas d'un système informatique permettant de savoir s'il y avait eu cinq ruptures conventionnelles en Rhône-Alpes, trois en Île-de-France et sept en Alsace. Nous sommes en train de remédier à cette situation afin d'avoir une approche globale. Le système d'information de l'inspection du travail, qui est parfois contesté par les syndicats, joue un rôle central en la matière.
Le contrôle de proportionnalité ne sera pas élaboré différemment en fonction des situations qui se présenteront – ce qui pourrait être perçu comme discrétionnaire, voire, arbitraire – mais il n'est pas question pour autant d'exposer des critères dans des circulaires de 300 pages. Avec la DGEFP, nous nous efforcerons de donner des directives à nos administrations en mentionnant des critères généraux auxquels il sera possible de déroger en fonction des cas particuliers. L'essentiel est que les salariés et les chefs d'entreprise comprennent la décision administrative.