Intervention de Alain Schmitt

Réunion du 22 mai 2013 à 10h00
Commission des affaires économiques

Alain Schmitt, chef du service de la compétitivité et du développement des PME à la Direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services, DGCIS :

Je ne me prononcerai évidemment pas sur les décisions que le Gouvernement pourrait prendre mais certains constats l'interrogent.

Entre 55 % et 60 % des auto-entrepreneurs ont une activité secondaire, et entre 40 % et 45 % une activité principale : c'est ce qui ressort des différentes études. Ces chiffres montrent que ce régime est utilisé à deux fins fondamentalement différentes : d'une part la création d'une activité principale, donc pérenne ; d'autre part, l'exercice d'une activité secondaire.

Par ailleurs, 50 % des auto-entrepreneurs ne réalisent aucun chiffre d'affaires et 90 % ont un revenu inférieur au SMIC après trois ans d'existence. De plus, le revenu moyen des auto-entrepreneurs représente un tiers du revenu des entrepreneurs individuels. La mission évalue également à 10 000 le nombre des radiations d'auto-entrepreneurs par franchissement des seuils, ce qui est très faible eu égard au nombre total d'auto-entrepreneurs. Le rôle des auto-entrepreneurs dans la création d'entreprises dynamiques n'est donc pas avéré. Or l'une des faiblesses de la France réside non pas dans le nombre d'entreprises créées – nous sommes à cet égard dans la moyenne européenne –, mais dans le fait que les entreprises françaises croissent moins vite et emploient moins de salariés que celles des pays européens équivalents après un même nombre d'années d'existence.

Les risques d'externalisation des salariés par fausse sous-traitance sont assurément difficiles à documenter mais réels : le sujet est important dans un contexte où la relation de travail se distend. L'externalisation se traduit en effet par l'accroissement, pour le salarié, à la fois de sa précarité et de sa responsabilité, et par une réduction de l'assiette d'imposition, dans un contexte d'insécurité juridique plus marqué pour le salarié et pour l'employeur.

Le problème de la sous-déclaration est mieux documenté : la fréquence est identique à celle des autres entreprises individuelles, mais le montant des redressements est plus important.

Le manque de statistiques est également une des grandes conclusions du rapport. Les raisons sont connues : caractère très succinct de la déclaration, difficultés de chaînage des bases de données entre l'Acoss, l'INSEE et le RSI. Aussi avons-nous des difficultés à appréhender la réalité du parcours des auto-entrepreneurs : la seule solution est de recourir à des enquêtes ponctuelles, qui sont lourdes à réaliser – l'INSEE en a effectué une en 2010.

Enfin, les dispositifs d'accompagnement à la création et au développement des entreprises ne touchent que difficilement les auto-entrepreneurs, notamment parce que la création s'effectue hors du cadre habituel des centres de formalités des entreprises. Or le fait de disposer d'un accompagnement augmente les chances de succès de l'entreprise. Les statistiques établissent qu'après cinq années, seulement 33 % des entreprises non accompagnées survivent, contre 50 % des entreprises accompagnées.

Le Gouvernement souhaite donc adapter le régime de l'auto-entrepreneur pour répondre à deux objectifs précis. Le premier est de faciliter la création d'entreprises en la rendant simple et accessible : le régime des auto-entrepreneurs doit devenir un « tremplin » à la création d'entreprises. Aussi ce régime doit-il être limité dans le temps tout en permettant, à terme, de créer une vraie entreprise sous forme classique.

Le second objectif est de prévoir un statut adapté à l'exercice d'une activité complémentaire, simple et sans limite de durée. En revanche, ce revenu d'appoint devra être plafonné.

Les modalités précises de ces orientations ne sont pas arbitrées à l'heure actuelle. Elles sont en cours de concertation : Mme la ministre reçoit à cet effet tous les acteurs concernés. Le Gouvernement partage les orientations du rapport concernant le renforcement du suivi statistique et donc des obligations déclaratives, l'ajustement du cadre fiscal, notamment en matière de CFE, et les contrôles.

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