Intervention de François Hurel

Réunion du 22 mai 2013 à 10h00
Commission des affaires économiques

François Hurel, président de l'Union des auto-entrepreneurs :

La création du régime de l'auto-entrepreneur s'est appuyée sur trois constats.

D'abord, il manquait à la France environ 1 million d'entreprises – chiffre rapporté à la population active – par rapport à ses voisins, en particulier d'Europe du Sud.

Ensuite, comme l'avait observé l'OCDE notamment, plusieurs pays avaient mis en place des dispositifs visant à favoriser l'émergence de nouvelles entreprises permettant à tout individu, quelle que soit sa situation, de devenir entrepreneur.

Enfin, comme l'ont souligné nombre de rapports, il fallait imaginer un dispositif permettant à l'entrepreneuriat d'être, au mois au départ, cumulatif, alternatif ou exclusif. En effet, il n'était pas question que l'on ne puisse pas revenir en arrière après être passé d'un régime à un autre.

Alain Griset l'a rappelé : le régime de l'auto-entrepreneur n'est en aucun cas un statut ; il s'appuie sur un régime fiscal et un régime social, lesquels ne sont pas issus de la loi de 2008 ni des textes ultérieurs.

Le régime fiscal, adopté par le Parlement en 1991, est régi par l'article 50-0 du code général des impôts. Celui-ci a créé le régime de la micro-entreprise qui permet la forfaitisation des charges et du revenu et l'exonération de la TVA. Il s'agit d'un régime européen.

Le régime social a été adopté par le Parlement en 2001. Sur le même principe que le régime fiscal, il a permis de forfaitiser les revenus, et donc les cotisations.

Le régime de l'auto-entrepreneur a fait l'objet de nombreuses critiques. Après avoir entendu nos 380 000 adhérents, nous nous efforçons de répondre, notamment avec les pouvoirs publics, aux problématiques posées.

S'agissant de la concurrence déloyale, je remercie les rapporteurs de noter dans leur rapport qu'elle n'existe pas. Moins de 1 % de concurrence, cela n'est pas significatif. L'exclusion du champ d'application de la TVA existait avant le régime de l'auto-entrepreneur ; or je n'ai pas entendu beaucoup de critiques à ce sujet entre 1991 et 2008.

S'agissant de la fraude, je reconnais qu'elle existe – mais quel régime entrepreneurial n'en est pas affecté ? Le régime de l'auto-entrepreneur n'est pas à l'origine de la fraude fiscale, du salariat déguisé et du travail clandestin ; au contraire, il permet à certaines activités de bénéficier d'un statut officiel.

Certes, comme le notent les rapporteurs, ce régime permet la sous-déclaration, mais je reste persuadé que les auto-entrepreneurs ne sont pas les plus grands fraudeurs de notre pays – certains d'entre eux oublient ou se trompent, voire ne savent ni lire ni écrire.

Toutefois, si ce régime ne me semble pas devoir faire l'objet de tant de critiques, des actions pourraient utilement être engagées pour encourager davantage d'auto-entrepreneurs à devenir entrepreneurs. Comme cela a été souligné par le rapport, aucun outil administratif ne permet de déterminer si un auto-entrepreneur devient un entrepreneur. Par exemple, lorsqu'une entreprise est créée par deux auto-entrepreneurs, aucun formulaire administratif ne permet de connaître le statut de ceux-ci. Au final, nous ne disposons d'aucune donnée statistique. C'est pourquoi je pense que les formalités administratives devraient favoriser un suivi.

Ensuite, en tant que président de l'Union des auto-entrepreneurs, je milite depuis le premier jour pour l'instauration d'un régime d'assurance en responsabilité civile obligatoire.

Face à la problématique de l'éventuel travail dissimulé, une solution serait que les personnes concernées détiennent une carte leur permettant de justifier de leur inscription en qualité d'auto-entrepreneur et qu'elles pourraient présenter lors d'un contrôle de l'administration sociale ou fiscale.

Pour le secteur du bâtiment, les auto-entrepreneurs pourraient faire une déclaration de travaux a priori pour chaque chantier, ce qui faciliterait le contrôle de l'administration. Je ne souhaite pas voir leur régime mis à mal sous prétexte de quelques abus : ceux-ci n'existent pas seulement chez les auto-entrepreneurs. L'important est de faire en sorte que le plus grand nombre de ces personnes deviennent des entrepreneurs.

En définitive, pourquoi le régime est-il à ce point critiqué, alors qu'il représente en chiffre d'affaires moins de 1 % et seulement 3 000 euros par trimestre ? Pour quelles raisons est-il si contesté, alors qu'il permet de récupérer chaque année environ 1,1 milliard de cotisations sociales et fiscales – dont ne bénéficieront pas un grand nombre d'auto-entrepreneurs cumulatifs ? Et pourquoi vouloir limiter dans le temps ce régime qui semble être le mieux à même de susciter l'esprit d'entreprise chez nos concitoyens et de permettre à un grand nombre d'auto-entreprises de grandir ? Pour ma part, je crois utile de renforcer l'accompagnement des auto-entrepreneurs, en lien avec les réseaux consulaires notamment, pour aider ces gens à devenir entrepreneurs.

Pour finir, j'ai toujours souhaité que soient opérés des contrôles non seulement sur le plan fiscal et social, mais aussi en matière de qualifications. Je souhaite en effet que les assemblées consulaires procèdent au contrôle des qualifications préalables à certaines activités – qualifications indispensables à la sécurité du consommateur. Plutôt que de supprimer le régime au nom de la lutte contre la fraude – qui est le fait de quelques-uns seulement –, il serait préférable de prévenir les abus au moyen de ces contrôles afin de permettre au plus grand nombre d'entrer dans le droit chemin.

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