Intervention de Yamina Benguigui

Réunion du 21 mai 2013 à 16h45
Commission des affaires étrangères

Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la francophonie :

Les 800 millions de locuteurs en 2050, dont 80 % en Afrique, représentent peut-être la chance de la francophonie. Nous sommes à un tournant avec cette Afrique francophone très malmenée depuis des années, un continent que nous n'avons même pas vu comme émergent. Dès les années 60, on a fait venir massivement des travailleurs immigrés, des bras et des jambes. Comme m'avait dit une maman malienne dont tous les enfants avaient été jusqu'à l'université mais qui se voyaient refuser l'accès à des stages : nous ne mettons pas des enfants au monde pour qu'ils soient pauvres, nous avons de l'ambition pour eux-mêmes si nous sommes issus d'un continent pauvre. Dans l'inconscient collectif des années 60 jusqu'à aujourd'hui, celui qui venait d'un espace francophone, maghrébin, africain ou autre, n'était pas pensé comme un cerveau. Personne ne se battait pour accueillir ces étudiants étrangers, que l'on a toujours perçus comme des immigrés. Pendant toutes ces années, on s'est ingénié à les empêcher d'obtenir un visa, même si ce n'était pas dit. Je le dis sans ressentiment, je fais partie de cette histoire. Si j'avais pu penser que mes vingt ans de travail me conduiraient à la francophonie ! Alors qu'on parle aujourd'hui de l'article 2 de la loi Fioraso, j'espère que vous quitterez cette salle avec cette idée que nous avions des étudiants francophones par milliers et qu'on n'en a pas voulu.

On a pensé l'Afrique comme un continent qui allait mourir. Dans les années 80, souvenez-vous, on barrait les pays d'un trait avec le sida. Aujourd'hui, on est à un grand tournant. Depuis un an, je dis que la francophonie s'est débarrassée des oripeaux du colonialisme ; la langue française est une langue égalitaire, solidaire. Aujourd'hui, on se doit d'être ouvert, et d'abord sur cet espace francophone où le français s'est affaissé. On ne peut pas rater non plus notre rendez-vous économique avec l'Afrique et le Maghreb francophones. Nous avons une chance en face de nous. Je suis allée à plusieurs reprises en Afrique du Sud où l'on apprend le français pour pénétrer la RDC, ce pays dont tout le monde se fichait, ce marché qu'on a laissé aux Chinois et aux Américains. Or nous avons une chance aujourd'hui : nous parlons français, ce qui nous donne, à compétences égales et dans la règle des marchés publics, un moyen de toucher la population. Dans le transfert de compétences qui peut se mettre en place, la langue a un rôle important. L'hymne national de la République démocratique du Congo est en français, la langue officielle est le français alors qu'il s'y parle quatre-vingt langues.

M. Jean-Marc Berthon, sous-directeur de la diversité linguistique et du français, va maintenant vous préciser comment, malgré notre petit budget, le projet « 100 000 professeurs pour l'Afrique » peut se mettre en place.

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