Intervention de Pierre Bocquet

Réunion du 28 mai 2013 à 17h15
Commission des affaires économiques

Pierre Bocquet, directeur du département banque de détail à la Fédération bancaire française, FBF :

Je tiens à rappeler que le crédit à la consommation ne va sans confiance dans l'avenir. Or la situation économique est atone, le chômage augmente, les amortisseurs sociaux sont poussés à leur limite et le pouvoir d'achat des foyers les plus modestes est malmené, notamment en raison de l'augmentation des dépenses contraintes. Le sentiment qui domine est donc celui de l'insécurité professionnelle, sociale et économique.

Toutefois, les banques françaises n'ont pas, contrairement à ce qui se passe dans d'autres pays européens, constaté une forte augmentation des incidents de paiement en matière de crédit à la consommation : dans plus de 98 % des cas, les remboursements s'effectuent sans problème aucun. L'attitude des Français face à l'endettement est culturellement raisonnable – il fut même un temps où on reprochait aux ménages de ne pas suffisamment s'endetter et de ne pas adopter des modèles aujourd'hui accusés d'avoir alimenté la crise. De plus, la loi Lagarde a conduit à une modification structurelle de l'offre et de la distribution de crédit.

Ce sont le plus souvent des événements extérieurs et postérieurs à l'octroi de crédits qui provoquent le surendettement. Le crédit est une préoccupation naturelle des banques qui sont engagées dans une relation de long terme avec leurs clients : c'est pourquoi elles répondent le plus souvent de manière positive à leurs besoins de financement.

L'Observatoire des crédits aux ménages qui rend depuis plus de vingt ans un rapport annuel observe que, dans plus de neuf cas sur dix, le crédit à la consommation sert bien à financer des projets d'équipements – achat d'un véhicule ou de biens d'équipements ou travaux dans la maison. Le nombre des Français recourant au crédit à la consommation a chuté ces dernières années pour atteindre 27,6 % : c'est le taux le plus bas depuis plus de vingt ans. Il faut savoir que la baisse touche toutes les tranches d'âge et toutes les tranches de revenus.

Contrairement aux idées reçues, depuis vingt ans, la part du crédit renouvelable dans l'ensemble des crédits à la consommation est en baisse au profit des prêts personnels. Ce phénomène a été accéléré par l'entrée en application progressive de la loi Lagarde depuis dix-huit mois.

Cette loi a généralisé les bonnes pratiques dans l'analyse de la solvabilité des clients, laquelle doit prendre en compte non seulement les crédits en cours mais également les autres charges et les comparer aux revenus et à leur permanence, seul moyen de déterminer le risque pris par les banques. En effet, les crédits étant financés par les dépôts, la maîtrise des risques doit être la plus forte possible. Le prêt responsable est un prêt consenti à ceux qui ont la capacité de le rembourser.

Les modifications inscrites dans la loi Lagarde ont assurément été sources de complexification, si bien que le volume du contrat a augmenté de 50 % – il est désormais équivalent à un Que Sais-je ?. J'ignore toutefois si les emprunteurs sont nombreux à le lire de manière exhaustive.

Seuls 3,5 % des ménages envisagent de recourir au crédit à la consommation dans les mois à venir : c'est le taux le plus bas depuis plus de vingt ans, ce qui devrait nous inquiéter en termes d'emploi et de croissance.

La profession bancaire continue de prêter à ses clients. Comme l'a révélé l'enquête conduite par une association de consommateurs, neuf fois sur dix, un client venu demander un prêt à une agence bancaire ne repart pas avec un crédit renouvelable mais ressort avec un crédit amortissable. La loi Lagarde a recentré le crédit renouvelable sur son usage d'origine.

Nous appelons à un choc de stabilité réglementaire et légal, à défaut d'obtenir un choc de simplification, lequel serait pourtant nécessaire pour rendre les contrats de crédit plus compréhensibles pour nos concitoyens.

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