Cette discussion est très intéressante et je voudrais en profiter pour saluer les propos de notre collègue Pascal Deguilhem.
Il est vrai qu'au cours des dernières années le dispositif a été gradué. Les circulaires en question – et Mme la ministre l'a elle aussi noté – n'ont pas permis de résoudre tous les problèmes dans les relations entre l'« université centrale » et ses composantes, et plus particulièrement ses IUT. Pour un ministre, dans une logique de gradation, la circulaire n'ayant pas suffi, le décret s'impose. Mais pour le Parlement, il peut y avoir la loi.
La question est celle du bon niveau et dont nous débattrons à l'occasion de l'article 32. Mais nous en sommes toujours au stade de la discussion et vous ne nous entendrez pas exposer, de ce côté-ci de l'hémicycle, une vision totalement arrêtée. Quoi qu'il en soit, il est impératif que nous sécurisions les choses.
Permettez-moi toutefois un petit retour en arrière sur ce fameux article L. 713-1 du code de l'éducation, qui a trait aux composantes de nos universités. Cet article distingue deux types de composantes : les composantes dites de droit commun, directement mises en place et supprimées par les universités elles-mêmes, et certaines composantes dotées d'un statut un peu spécifique – on parle alors d'institut ou d'école – qui supposent un niveau de formalisation plus important : la création d'un institut ou d'une école se fait, sur proposition des universités, et après avis du CNESER, par un arrêté signé du ministre.
On peut se demander quelle est la raison d'un tel dispositif dans le code de l'éducation ; c'est en remontant aux origines que l'on pourra comprendre ce qui est en jeu. En fait, on considère qu'il est possible de développer des instituts ou des écoles dans nos universités dès lors que ces composantes ont à assurer des missions spécifiques qui peuvent nécessiter des statuts dérogeant au droit commun applicable aux autres composantes.
L'histoire montre que cela a été le cas pour les IUT et pour un certain nombre d'écoles d'ingénieurs au sein même de nos universités. Dès la fin des années 1950 et au début des années 1960, on a également vu se développer, par exemple, des instituts d'administration des entreprises, eux aussi dotés d'un statut spécifique. Le but était de piloter le déroulement de certaines missions et de permettre au besoin au ministère de leur attribuer des moyens spécifiques pour assurer la réussite de leurs missions. Cela fait d'ailleurs écho à l'article L. 713-9 du même code de l'éducation, relatif à la question des moyens.
Pourquoi ce développement ? Tout simplement pour vous rappeler que le Gouvernement lui-même a été le premier, alors que nous n'étions pas d'accord avec la loi proposée par M. Peillon, à recourir à cette disposition de l'article L. 713-1 en développant les écoles supérieures du professorat et de l'éducation. D'où cette question, parfaitement légitime : en quoi voyez-vous juridiquement une différence entre les ÉSPÉ et les IUT ?
Lors de l'examen du texte sur l'école, nous avons entendu un vibrant plaidoyer en faveur de la création d'une composante de droit spécifique pour les ÉSPÉ. Aujourd'hui, on est amené à se poser la question : jusqu'où va-t-on dans la sécurisation des relations, au sein même des universités, entre ces composantes de droit spécifique et l'université prise au niveau central ? C'est une question essentielle, madame la ministre, et le débat que nous avons eu au sujet des ÉSPÉ montre bien que le Gouvernement a lui-même utilisé la « boîte à outils » du code de l'éducation, qui prévoit le recours à des statuts spécifiques.
Quoi qu'il en soit, cette affaire est suffisamment complexe pour que nous poursuivions cette discussion lors de l'examen de l'article 32. Trois questions se posent, au-delà des aspects strictement techniques : comment faisons-nous pour que notre système fonctionne de manière satisfaisante ? Comment faisons-nous pour essayer de réduire les conflits potentiels ? Que faisons-nous, enfin, pour nous assurer que les étudiants et les personnels qui se trouveront dans ces composantes rempliront leur mission de manière satisfaisante, car c'est bien de cela qu'il s'agit ?
En tout cas, la discussion est ouverte. Vous nous proposez de recourir au décret ; nous verrons bien comment les choses peuvent évoluer. Pour ce qui nous concerne, l'essentiel est que cette affaire puisse se traiter dans un climat apaisé, pour l'ensemble des composantes. J'ai tenu à ce qu'on ne se focalise pas uniquement sur le seul cas, pourtant extrêmement important, des IUT, auxquels nous tenons tous ; le sujet est bien plus large et touche d'autres composantes, comme les IAE ou les écoles, mais aussi, on l'a vu encore récemment, les ÉSPÉ nouvellement créées par la loi Peillon.