Intervention de Philip Cordery

Séance en hémicycle du 23 mai 2013 à 21h30
Projet de loi relatif à l'enseignement supérieur et à la recherche — Article 22

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilip Cordery :

L'inadéquation entre le nombre de places dans les filières médicales, paramédicales et vétérinaires et les besoins de notre société est aujourd'hui flagrante. D'une part, la France manque de médecins, de praticiens et de vétérinaires, notamment en milieu rural. D'autre part, des milliers de jeunes, après avoir subi un échec souvent traumatisant en fin de première année commune aux études de santé ou à l'entrée des formations sélectives, sont condamnés à l'exil pour étudier.

En Belgique, on dénombre plus de 16 000 étudiants français dans ces filières. Or la très grande majorité d'entre eux reviennent exercer en France et n'ont aucun mal à trouver un emploi, preuve de l'inadéquation du numerus clausus et des quotas avec la demande médicale. Le comble de l'absurde a été atteint avec l'ouverture en France d'une antenne d'une université privée portugaise, très chère, qui délivrerait des diplômes portugais ayant vocation à être reconnus en France grâce à la reconnaissance des diplômes au niveau européen.

Je rencontre très régulièrement en Belgique des étudiants en médecine, en écoles vétérinaires, en orthophonie, kinésithérapie ou autres qui m'ont fait part de leur expérience et de leur sentiment d'avoir été abandonnés par la France. Pour ces étudiants, la situation n'est pas tenable. Après avoir perdu une ou plusieurs années et pour nombre d'entre eux dépensé des sommes faramineuses dans les écoles préparatoires hors de prix et les concours à répétition, ils perdent de plus leurs droits à l'aide sociale lorsqu'ils partent à l'étranger.

Cette situation n'est pas tenable non plus pour la France, qui ne contrôle en rien la qualité des formations effectuées à l'étranger, ce qui pourrait dans certains cas être risqué pour la santé publique. Enfin, elle n'est pas tenable pour les pays d'accueil qui investissent dans des étudiants qui repartent après leurs études.

La France ne peut plus sous-traiter la formation de ses étudiants dans les filières de santé et vétérinaires. Les articles 22 et 22 bis du projet de loi constituent un progrès sur l'aspect pédagogique, mais ne règlent cependant pas la question de l'adéquation avec la démographie médicale. C'est pourquoi, si je me félicite des avancées que constituent les expérimentations – et je tiens à saluer le travail du Gouvernement et du rapporteur de la commission des affaires sociales – je souhaite que ce ne soit que le début d'une grande réflexion pour faire évoluer ce mode de sélection dans les filières médicales, paramédicales et vétérinaires et mettre en adéquation le nombre de praticiens formés avec les besoins de la société.

Cette réflexion devra associer tous les acteurs – professionnels, étudiants, en France ou à l'étranger, universités, collectivités locales – et se faire dans l'intérêt de tous et particulièrement des étudiants.

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