L'agenda stratégique France Europe 2020 pour la recherche, le transfert et l'innovation est le support de cette nouvelle ambition, présente dans les articles 9, 10, 11, 12, 13 et 53 du texte. Cet agenda définira nos priorités ainsi que des mesures spécifiques pour favoriser le transfert et l'innovation et assurer à notre pays sa place dans l'espace européen de la recherche.
L'enjeu est de préparer la recherche française, dans toute sa diversité, à mieux répondre aux grands défis des décennies à venir, en cohérence avec la dynamique européenne impulsée par le programme Horizon 2020. La santé, la sécurité alimentaire, la gestion sobre des ressources et la lutte contre le changement climatique, la transition énergétique, la mobilité et les systèmes urbains durables, le développement de l'économie numérique et des technologies spatiales, et enfin bien sûr la réindustrialisation de nos territoires sont les défis majeurs qui doivent mobiliser les acteurs de la recherche et de l'innovation.
Pour relever ces grands défis, la recherche fondamentale sera préservée. Nous pouvons être fiers de nos prix Nobel, de nos médailles Fields, de nos médailles d'or du CNRS, de nos lauréats de l'European Research Council. Nous pouvons être fiers des performances de nos équipes de recherche fondamentale dans les grands programmes scientifiques : dans le robot Curiosity sur Mars, dans la preuve de concept du boson de Higgs au CERN, dans la lutte contre le sida où nous sommes les deuxièmes « publiants » et intervenants internationaux après les États-Unis, en dépit de moyens cent fois inférieurs.
Nous pouvons partager cette fierté. Mais la recherche fondamentale n'est pas qu'une des fiertés de notre pays, elle est aussi une des clés de son avenir. L'ensemble de la recherche scientifique restera mobilisée pour contribuer à l'avancée des connaissances au meilleur niveau international. Ce développement du savoir, programmé ou non, rarement prédictible, a souvent été à l'origine des ruptures majeures qui bouleversent nos sociétés.
La recherche fondamentale de long terme, risquée et exploratoire, productrice de savoirs transférables ou non à des applications, est au coeur de la stratégie scientifique nationale et s'articule naturellement avec les grands défis sociétaux identifiés. Je l'ai préservée dès 2012, en instaurant des programmes pluriannuels à l'Agence nationale de la recherche – ANR – et en réorientant 60 millions de son budget vers des crédits récurrents indispensables aux laboratoires.
Pour élaborer l'agenda stratégique de la recherche dont le pays a besoin, et que nous ne laisserons pas à des agences extérieures comme cela a été le cas précédemment par défaut, le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche s'appuiera sur les compétences des Alliances, avec une mission transversale confiée au CNRS, présent dans toutes les Alliances. L'État s'appuiera aussi sur un Conseil stratégique de la recherche, placé auprès du Premier ministre, ce qui favorisera l'indispensable mobilisation interministérielle. Le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie intégrera le CNESER, dont les compétences seront élargies aux stratégies nationales. La composition du Conseil stratégique de la recherche sera fixée par décret ; il est prévu une représentation parlementaire, via l'OPECST.
À la fin de l'année, cet agenda fixera collectivement les axes prioritaires de progrès des connaissances et des technologies d'ici à 2020 et indiquera les modalités de leur mise en oeuvre. Un rapport biennal sera réalisé par l'OPECST afin que la mise en oeuvre de cette stratégie nationale soit soumise à l'évaluation démocratique. Cette nécessaire transparence est d'ailleurs amplifiée dans l'article 11, qui prévoit que la stratégie nationale de recherche s'appuie sur une concertation avec la communauté scientifique, le monde socio-économique, les autres ministères concernés et les collectivités territoriales.
En aval, les procédures d'évaluation doivent aussi évoluer. Un consensus existe aujourd'hui sur la nécessité d'une évaluation indépendante mais son mode d'organisation actuel, avec l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur, l'AERES, ne fait pas, quant à lui, consensus, comme on a pu le constater tout au long des assises.
Le projet de loi prévoit, dans ses articles 48 à 52, la création d'une nouvelle instance d'évaluation, le Haut conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur – qui remplacera l'AERES – et indique les modalités de son action. Il s'agit non pas d'un simple ravalement de façade, comme je l'ai parfois entendu, mais d'un véritable changement de méthode destiné à tourner la page de la surcharge administrative et des évaluations pilotées par le haut et parfois jugées contestables, notamment en sciences humaines et sociales. Cette autorité indépendante aura pour première fonction de valider les procédures d'évaluation menées par les établissements et les unités de recherche, avec des experts qu'ils proposeront, et effectuera elle-même les évaluations dans certains cas.
Je l'ai dit, aujourd'hui, notre point faible, c'est la transformation de l'invention de laboratoire en innovation industrielle ou de services, dans le but de créer des emplois. Pourtant en Europe, 80 % des créations d'emplois sont fondées sur ce transfert porteur d'innovation. La part de notre recherche technologique est inférieure à 10 % de la dépense intérieure de recherche et développement, alors qu'en Allemagne, au Japon, aux États-Unis, en Corée, en Israël, elle dépasse 20 %. C'est l'outil privilégié du transfert de la recherche vers l'industrie.
Dans son rapport pour avis, le député Christophe Borgel …