La perspective d'une baisse de l'emploi – qui devrait décliner d'un niveau compris entre 1,4 million et 1,5 million de personnes en début de période à 1,3 million en 2020 – n'empêche pas des mouvements de se produire à l'intérieur de cette population, dont les départs à la retraite et les changements de secteur d'activité constituent les principaux ; ils nécessitent un flux d'embauches soutenu, ce que nous avons du mal à faire comprendre, car l'opinion publique ne retient que la diminution globale de l'emploi.
Cependant, le déséquilibre de la pyramide des âges au profit des plus de 50 ans, déjà souligné, fait peser sur la métallurgie un risque d'« évaporation » des compétences industrielles, au moment même où il s'impose d'élever le niveau de qualification dans tous les emplois.
S'ajoute à cela une difficulté sur laquelle l'UIMM et les industriels ne cessent d'appeler l'attention : nos entreprises peinent à recruter. Cette situation peut sembler paradoxale en période de chômage élevé, mais la recherche de personnes disposant de compétences adaptées aux offres de travail se solde par bien des échecs. Nous tentons ainsi d'accueillir, dans le cadre de la préparation opérationnelle à l'emploi (POE), des salariés qui ne disposent pas forcément des qualifications idoines ; or, au bout d'un an de cette expérience, nous sommes frappés du faible attrait de ce dispositif auprès des chômeurs : sur cent demandeurs d'emploi contactés par Pôle emploi et par l'UIMM, moins de dix répondent à l'invitation. Mon propos ne vise pas à stigmatiser les chômeurs, mais à mettre en lumière l'existence d'un problème.
Ce constat nous a poussés à créer un fonds de dotation, doté de 70 millions d'euros, pour guider les jeunes les plus éloignés de l'emploi vers les métiers industriels : entre 10 000 et 12 000 d'entre eux reçoivent ainsi une formation – qui peut porter sur des enseignements de base relevant du socle des connaissances ou simplement viser à resocialiser. Cette action n'a rien de philanthropique : elle vise à répondre à un besoin des industriels.
La localisation de l'emploi constitue une préoccupation majeure, car la composition et la stabilité du corps social dans un territoire reposent largement sur l'industrie. Ce qui était un fait historique reste vrai et la désertification de certains espaces a souvent découlé de la fermeture de sites de production. La compétitivité – « coût » et « hors-coût » –, la localisation des marchés et les compétences des salariés sont les facteurs principaux influant sur les décisions de délocalisation de l'activité hors de France. Le sujet de la compétence, particulièrement, occupe à cet égard une place de plus en plus déterminante, quoique difficile à quantifier. Un article de presse de ce matin faisait état du développement d'un pôle aéronautique au Maroc, dont l'une des causes réside dans la présence sur place des compétences recherchées. Aujourd'hui, assurer la maintenance aérienne au Maroc ou la fabrication d'un avion en Chine ne présente plus aucun inconvénient – en aéronautique, on n'en est pas à mille kilomètres près ! –, et de nombreuses pièces sont produites dans divers endroits du monde, l'assemblage ne comptant d'ailleurs que pour 5 % du prix d'un appareil. Disposer des compétences nécessaires en France constitue donc un enjeu fondamental. Or, les entreprises de carénage et EDF échouent à pourvoir plusieurs milliers de postes de chaudronniers, probablement parce que ce métier pâtit d'une image négative, qui ne correspond plus à la réalité.
Cette situation choque du fait du niveau du chômage et de l'étendue des besoins de main-d'oeuvre qui demeurent insatisfaits. L'UIMM réunit tous les mois des industriels qui ont, lors de leur dernière rencontre, tenue la semaine dernière, fait du recrutement leur sujet majeur de préoccupation.