Intervention de Nicolas Wolff

Réunion du 29 mai 2013 à 17h30
Commission des affaires économiques

Nicolas Wolff, directeur général de Vestas France :

Comme vous l'avez indiqué, monsieur le président, Vestas est le leader mondial de la fabrication d'éoliennes. Cette société emploie 17 000 personnes, réalise environ 7 milliards d'euros de chiffre d'affaires et intervient dans 63 pays. À ce jour, nous avons installé plus de 49 000 machines, soit 55 000 MW installés. Cette puissance correspond aux besoins en électricité pour 19 millions d'habitants.

Au niveau mondial, l'éolien a connu pendant plus de dix ans une croissance moyenne de 26 % par an, ce dont très peu de secteurs industriels peuvent s'enorgueillir. À la fin de 2012, le secteur a atteint 282 GW installés. Mais, depuis deux ans, il vit une crise très forte. Tous les constructeurs ont dû revoir leurs capacités de production en 2012. Cela a été malheureusement le cas de Vestas, qui a presque divisé par deux sa capacité en l'espace d'un an et a dû procéder à plus de 3 000 licenciements. Cette situation est liée à la crise mondiale, aux efforts portés sur les tarifs et à la diminution des besoins en énergie.

Malgré cela, nous pensons que l'énergie éolienne a toute sa légitimité dans le mix. Après une année 2013 qui sera marquée par un repli de l'ordre de 15 %, nous nous attendons à une reprise de la croissance du marché mondial, même si elle sera plus limitée.

Vestas est présente depuis dix ans en France, où elle emploie 250 personnes et a installé plus de 700 machines. Tous constructeurs confondus, le marché français représente plus de 7 500 MW installés. Il a également connu, à son échelle, une croissance forte et représente aujourd'hui plus de 11 000 emplois directs et 150 sous-traitants.

Cela dit, la situation française est paradoxale. Depuis deux ans, le marché de l'éolien est en repli – moins 15 % en 2012. Le cadre réglementaire est de plus en plus difficile et ralentit la mise en oeuvre des projets. Il faut six ans pour développer un projet éolien en France, contre deux ans en Allemagne. Le taux de recours sur les permis déposés est de 40 %. Plus grave, on constate que, après les deux années de traitement administratif, plus de 85 % des permis contestés sont finalement octroyés, ce qui prouve que les recours ont surtout pour objet de bloquer la filière.

Je crois que le rôle que nous pourrions jouer dans la transition énergétique s'inscrit dans le cadre du principe de subsidiarité. L'éolien est complémentaire avec d'autres sources d'énergie beaucoup plus importantes. Son intérêt est qu'il se déploie d'abord dans les régions via de multiples acteurs, constituant ainsi un véritable facteur de décentralisation. Tous les emplois créés le sont dans des régions qui, bien souvent, sont les oubliées de toutes les révolutions industrielles précédentes.

Aujourd'hui, l'acceptabilité est bonne : si l'on en croit le dernier sondage IPSOS, réalisé en 2012, plus de 83 % des Français sont favorables à l'éolien.

L'action de Vestas en France repose sur deux piliers.

Tout d'abord la compétitivité en termes de coût de l'énergie. Le tarif de l'électricité éolienne est aujourd'hui de 82 euros par MW. Cela nous semble compétitif par rapport aux coûts de marché. À titre d'exemple, le prix annoncé de l'électricité produite par l'EPR de Flamanville sera compris entre 90 et 100 euros par MW. Par ailleurs, le coût pour le consommateur est de 2 à 3 euros par ménage et par an, ce qui paraît raisonnable eu égard à la création de valeur que nous représentons.

Ensuite le contenu industriel. Nous devons démontrer à nos concitoyens que chaque machine installée représente des emplois et de la valeur créée au niveau local. Certes, l'éolien est menacé par des concurrents chinois – qui, pour l'instant, restent en Chine –, mais il a aujourd'hui la chance d'avoir une chaîne de valeur essentiellement européenne. Chaque fois qu'un partenaire français est sélectionné, c'est pour l'ensemble des machines réalisées dans le monde, et ce aussi bien pour Vestas que pour tous les autres constructeurs européens présents en France. Nous avons généré l'année dernière plus de 100 millions d'achats sur le marché français, où nous avons 450 sous-traitants qui fournissent des composants installés dans les machines. La balance commerciale de l'éolien en France est à l'équilibre : notre pays exporte autant de composants électriques vers l'Allemagne et le Danemark qu'il importe d'éoliennes. Le tissu industriel est donc en place. Il n'attend qu'une chose pour se développer : la stabilisation de la réglementation.

À chaque installation de machine, nous pouvons mettre en place des techniciens de maintenance. Comme plusieurs entreprises du secteur, Vestas a passé des contrats avec des lycées techniques proposant des BTS de technicien de maintenance éolienne. Nous avons ainsi créé beaucoup d'emplois durables.

L'avenir, pour nous, passe par une stabilisation de la réglementation qui, actuellement, freine notre développement. Si tel était le cas, je puis vous assurer que Vestas et ses confrères seraient prêts à investir sur le sol français. L'Institut pour l'innovation et la compétitivité de l'École supérieure de commerce de Paris a établi que chaque mégawattheure d'éolien installé représente 1,4 emploi créé. Si le système permettait enfin de délivrer les permis de construire dont nous avons besoin, je vous assure que nous serons au rendez-vous de l'emploi.

L'Europe de l'énergie, on l'a dit, est inexistante. Chaque État membre a développé son mix et défend son approche. Je crois qu'il faut travailler ces sujets. Le stockage de l'énergie, notamment, représente une chance pour l'Europe. Compte tenu des compétences existantes, il faut que les politiques s'engagent dans cette voie.

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