Intervention de Martine Conin

Réunion du 11 avril 2013 à 9h00
Mission d'information sur les immigrés âgés

Martine Conin, directrice des affaires sociales au conseil général du Val-de-Marne :

En région parisienne, la dimension des logements est si réduite que l'accueil à domicile reste limité. Cependant, les difficultés sont moindres dans le Val-de-Marne qu'à Paris et le nombre de familles candidates pour accueillir des immigrés âgés augmente depuis trois ou quatre ans : les trois quarts d'entre elles sont d'origine maghrébine et vivent dans de grands logements que leurs enfants ont quittés. Elles disposent donc de l'espace nécessaire. L'accueil familial constitue pour elles une véritable tradition qui leur permet de surcroît de bénéficier d'un emploi et d'une rémunération comprise entre 1 300 et 1 500 euros par mois en fonction des sujétions dont elles doivent s'acquitter. Quant aux personnes accueillies, elles peuvent bénéficier de l'aide sociale à l'accueil familial et de l'APA. On pourrait imaginer que cette aide sociale fasse l'objet d'une récupération sur succession, mais c'est impossible car les biens des bénéficiaires se trouvent le plus souvent à l'étranger.

Dans les foyers, comme dans d'autres secteurs de l'action sociale et médico-sociale, les équipes, les institutions et les dispositifs demeurent trop cloisonnés pour que nous puissions exploiter les données dont disposent les associations gestionnaires, qui connaissent pourtant fort bien les problèmes rencontrés par les résidents. S'il est vrai que les CLIC favorisent les rencontres entre professionnels, ce cloisonnement institutionnel transforme néanmoins les démarches des migrants en un véritable parcours du combattant – d'autant plus que les associations qui y interviennent sont relativement fragiles. Et même les plus solides d'entre elles, telles que les associations gestionnaires, ne rencontrent pas suffisamment les services sociaux des CCAS. C'est pourquoi, dans le Val-de-Marne, nous avons souhaité que les CLIC concentrent leurs efforts sur l'animation de réseau et l'accompagnement.

Dans l'habitat diffus, nous organisons depuis quelques années des formations de gardien d'immeuble avec certains bailleurs sociaux à qui nous demandons de prêter une attention particulière à l'isolement des personnes âgées, handicapées et migrantes : ce système fonctionne bien dès lors que le bailleur social se montre volontariste. Quoi qu'il en soit, il s'agit d'un processus de longue haleine.

Quant au placement en EHPAD, nous devons tenir compte du libre choix des immigrés âgés concernés car ils risquent de comprendre encore moins que les autres pourquoi on le leur propose. Si les pressions qu'ils ressentent ne sont pas toujours mal intentionnées, elles leur sont souvent difficiles à vivre. Et s'il est vrai que les EHPAD accueillent des personnes de plus en plus dépendantes, il reste qu'environ 30 % de leurs résidents ne comprennent pas bien ce qui se passe autour d'eux et revendiquent une certaine qualité de vie. Or, comme l'indiquait Liliane Capelle, les personnes migrantes, parce qu'elles n'ont souvent pas pu accéder aux soins, sont couramment atteintes de pathologies multiples – notamment d'hypertension et de diabète – et donc susceptibles d'entrer plus jeunes en établissement, alors qu'elles ne sont pas forcément désorientées psychologiquement. Leurs revendications étant par conséquent beaucoup plus fortes, elles risquent de se replier sur elles-mêmes si les EHPAD ne s'en préoccupent pas suffisamment. C'est pourquoi, nous leur portons une attention particulière. Pour ma part, je ne serais pas choquée qu'un EHPAD accueille quelques personnes de même origine. Cela étant, gardons-nous bien de créer des établissements communautaires. Il serait également important que des associations puissent venir soutenir les équipes de l'établissement en y apportant une dimension culturelle – essentielle pour les populations migrantes.

En tout état de cause, il convient sans doute d'explorer différentes pistes dans la mesure où il n'existe pas de personne migrante âgée standard, chacune d'entre elle ayant une vie et une culture qui lui sont propres.

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